Roseline Bonnellier : « Pour introduire à une lecture de L’interprétation du rêve de Sigmund Freud » (2)

Notes de cours (extraits) de Roseline Bonnellier, chargée d’enseignement en 2010-2015 dans l’UFR d’ « Études psychanalytiques » à l’université Paris VII Denis-Diderot

Avertissement

  1. Bonnellier se réfère davantage à la nouvelle traduction des OCF.P (PUF/Quadrige) tout en reliant le plus possible notions, références et citations à l’ancienne traduction bien connue de Meyerson (M.).

Références bibliographiques principales :

Sigmund Freud,

  • Die Traumdeutung (1900), dans Sigm. Freud, Gesammelte Werke II/III (GW II/III), Fischer Taschenbuch Verlag, Frankfurt am Main, 1999.
  • L’Interprétation des rêves (La Science des rêves, 1926), traduction d’Ignace Meyerson (), nouvelle éd. révisée par Denise Berger en 1967, Paris, PUF, 1987.
  • L’interprétation du rêve, traduit par Janine Altounian, Pierre Cotet, René Laîné, Alain Rauzy et François Robert, dans Sigmund Freud, Œuvres complètes Psychanalyse (P), tome IV, Paris, PUF, 2003 ; Quadrige / PUF, avec préface de François Robert, 2010.

La méthode de l’interprétation du rêve. Analyse d’un modèle (Échantillon / Muster) de rêve

 

Du chapitre II au chapitre III : La méthode de l’interprétation du rêve. Analyse d’un modèle (échantillon / Muster) de rêve

OCF.P / Quadrige, p. 131-156. Meyerson/Berger p. 90-112.

  1. La méthode : préparation à l’interprétation du rêve

« Les rêves sont interprétables » (deutbar)

Le titre du traité, la Td (= Traumdeutung), montre à quelle conception des rêves Freud entend se rattacher. Dans l’ensemble, il va à l’encontre des théories médicales exposées dans le 1er chapitre (mise à part celle de Scherner). Celles-ci décrivent « un processus somatique » au départ, « qui se manifeste par des signes au niveau de l’appareil animique » (am seelischen Apparat). Dans ces théories, le rêve n’est absolument pas « un acte animique » (ein seelischer Akt) [« animique » pour « psychique » (traduction : J.-P. Lefèbvre) : traduction OCF.P] – ou « acte psychique » – ce qu’il est pour Freud, et c’est pour cette raison qu’il est « interprétable » dans la conception de Freud.

  • Vocabulaire : seelisch : « animique » (OCF.P), « psychique ». La traduction Meyerson par « acte mental » ne convient pas du tout. Et Meyerson ne garde pas le même mot, il passe de « mental » à « psychique » pour le même mot alld seelisch (trad. Strachey qui traduit « âme » par mind). Pour la terminologie dans les OCF.P, voir Traduire Freud (A. Bourguignon, P. Cotet, J. Laplanche, F. Robert), puf, 1989.

Citation de Freud, p. 131 (90) : « « interpréter un rêve » cela veut dire indiquer son « sens »… »

Freud préfère encore se ranger auprès de « l’opinion profane » (Laienmeinung) [Meyerson traduit le « sens commun »] Voc. Cf. « laïc » s’oppose à « médical » chez Freud dans La question de l’analyse profane (1926).

  • Complément pour approfondir la question d’un point de vue historique et culturel (réflexions de R. Bonnellier – nous abrégerons : R.B.)

Attention de ne pas trop confondre l’idée de laïcité à la française, assez identitaire chez nous et toujours d’actualité, et la « laïcité » dont parle Freud, écrivain de culture « germanique » (= allemande). Freud est un écrivain de langue allemande dans la seconde « haute période » ou acmé de la littérature de langue allemande qui rayonne autour de son foyer viennois en plein Mitteleuropa. L’idée « allemande » de laïcité remonte au 16e siècle à la Réforme et à « la liberté du chrétien » selon Luther : c’est d’abord une idée chrétienne et protestante. Luther s’oppose à l’autorité du Pape. L’idée seconde et française de laïcité remonte à 1789.

Psychanalyse « profane » veut dire précisément chez Freud qu’elle n’est pas pratiquée par des « spécialistes » offrant la garantie d’une pratique de la « science médicale » détentrice de l’autorité due au savoir à l’instar des autorités « cléricales » au pouvoir desquelles s’attaqua Luther par la Réforme. L’interprétation du rêve, tout en se rapprochant de « l’opinion profane » (des laïcs), voire même en comprenant la quête d’une « clé des songes » peut très bien être une science au sens où la philosophie de Kant définit un sujet de la science à partir de la Critique de la Raison pure. Et le moment kantien est capital dans l’histoire de la conscience occidentale et pour la définition à venir de la psychanalyse après coup au début du vingtième siècle. La scientificité de la psychanalyse doit d’abord s’interroger à partir de ce moment déterminant et fondateur de la philosophie de Kant. La « révolution copernicienne » de la philosophie kantienne dans la seconde moitié du 18e siècle est « spirituelle » ; elle « sécularise la religion » chrétienne (Kant est d’origine protestante luthérienne). Tandis que la Révolution française est plus « factuelle ».

  • Sur Freud et la philosophie : Paul-Laurent Assoun, Freud, la philosophie et les philosophes, Quadrige / P U F.

L’opinion profane (= des « laïcs » / du « peuple ») donc, guidée par un « obscur pressentiment », ne renonce pas à chercher un sens au rêve.

– Le « monde profane » (Laienwelt) recourt à deux méthodes « distinctes par essence » pour « interpréter » (deuten) le rêve :

  • « l’interprétation [-du-rêve] symbolique ». Envisager le rêve comme un tout et le remplacer par un contenu compréhensible. Il ne faut pas que le rêve apparaisse d’emblée incompréhensible ou confus. Ex. Genèse, 41 le rêve du Pharaon des 7 vaches grasses et des 7 vaches maigres (p. 132 / 91).

Et les « rêves artificiels » créés par des poètes, qui restituent une pensée conçue par le créateur littéraire sous un déguisement en accord avec les caractères de notre « rêver » (de « notre activité onirique », tr. Lefèbvre) d’après l’expérience que nous en avons.

Le sens du rêve s’exprime alors au futur prophétique de l’interprétation symbolique. L’interprétation du rêve réussie, « proche du trait d’esprit », relèverait d’un « art » ou d’un « don particulier ». Il n’y a pas en quelque sorte de mode d’emploi, « d’instruction » en la matière.

  • « la méthode du chiffre » (Chiffriermethode) traite le rêve comme une espèce de « cryptogramme » soit une « écriture secrète » (Geheimschrift) : (p. 133/ 92) « chaque signe est traduit, selon une clé bien établie, en un autre signe dont la signification est connue ». Ex. Je rêve d’une lettre, mais aussi de funérailles, et je vais vérifier dans un « livre des rêves » (Traumbuch) que « lettre » est à traduire par « contrariété », « funérailles » par « fiançailles » (Note : Traumbuch: correspond à « clef des songes » et Freud se sert parfois de ce terme pour désigner sa Traumdeutung).
  1. Le rêve est un accomplissement de souhait (der Wunsch : le souhait)

– Le rêve de l’injection faite à Irma (p. 141-156 / M. 98-112)

Rapport préliminaire

  • L’été 1895. Une jeune dame (Irma) de son entourage, une amie de ses proches est en traitement auprès de Freud ; Problèmes posés par le mélange dans les relations : l’intérêt personnel du médecin est plus grand et son autorité moindre. Le succès de la cure fut partiel : Freud n’était pas sûr à cette époque des critères marquant la liquidation (Erledigung) d’une histoire de maladie hystérique et il crut sa patiente susceptible d’accepter une « solution» (Lösung) qui ne lui parut pas acceptable. C’est dans le désaccord sur cette « solution » qu’ils interrompirent le traitement à cause de la période estivale. [Rappel : le rapport de l’hystérie et de l’analyse du rêve de Lösung et Auflösung : la solution ou « guérison » promise va de pair avec « l’explication » – « résolution » (OCF.P)].

[…]

Rêve du 23/24 juillet 1895 (Lecture)

[…]

Le rêve paraît vers sa fin « plus obscur et plus comprimé » (gedrängt) [M. : « touffue » – refoulé se dirait « verdrängt »].

L’analyse plus approfondie va donc avoir lieu : c’est la méthode du chiffre appliquée à chaque détail à cette grande différence près – et c’est toute la différence de l’analyse – ce sont les associations du rêveur Freud qui donnent les explications. L’interprétation symbolique globale en résultera à la fin : de quel souhait (Wunsch) ce rêve est-il l’accomplissement. Et ce « modèle » de l’injection faite à Irma démontre que le rêve est un accomplissement de souhait.

  • Le hall – beaucoup d’invités que nous recevons (empfangen: recevoir. Un sens particulier de empfangen est : « concevoir », « devenir enceinte »). [Éléments diurnes retrouvés : Rêve d’anticipation] : Le rêve s’est passé à Bellevue, maison où les Freud passent des vacances d’été, sur une colline adjacente au Kahlenberg (promontoire du Wienerwald, au nord de Vienne – la Berggasse est dans le 9e arrondissement de Vienne, non pas tout à fait au centre, jouxte le 1er Arrt au nord-ouest). La maison était autrefois un lieu de divertissement (Vergnügungslokal) d’où les hautes salles en forme de hall [Cf. l’expression usuelle Viel Vergnügen ! (« amuse-toi bien ! », souhaite-t-on à quelqu’un s’en allant à une fête, littéralement : on lui souhaite « beaucoup de plaisir ! »)

Complément R.B. – association d’idée (littérature / cinéma) cf. Le film américain « Les yeux grands fermés » (Eyes Wide Shut) de Kubrick, 1999, d’après la « Nouvelle du rêve (Traumnovelle) » de Arthur Schnitzler, frère littéraire de S. Freud – et les tavernes à vin de Grinzing].

 […]

  • Je fais des reproches à Irma pour n’avoir pas accepté la solution; je dis : si tu as encore des douleurs, c’est ta faute à toi. Le mot solution est déterminant. Freud explique qu’à cette époque il pensait (opinion reconnue plus tard comme « inexacte ») que sa tâche se bornait à communiquer aux malades « le sens caché de leur symptôme » [Freud jouait donc assez le rôle de donner la « clé des songes » comme dans un Traumbuch en appliquant la règle de « l’interprétation symbolique » et de la « méthode du chiffre » en guise de « recette »] : aux patients d’accepter ou non cette « solution » – explication / solution valant pour résolution / guérison (selon les tr. des OCF.P ou M.) – Freud n’en n’était plus responsable [cela va être l’argument de culpabilisation-déculpabilisation sur lequel joue le rêve]. Le mot Lösung signifie aussi la solution d’une énigme ou d’un problème (en mathématique), le « dénouement » au théâtre, la dissolution en chimie et un Lösungsmittel est un « dissolvant ». Freud est reconnaissant à cette « erreur » de ses débuts, qu’il a maintenant surmontée, quant aux succès thérapeutiques dont il devait faire état. C’est la faute d’Irma, ce n’est pas la sienne. […]
  • Plaintes d’Irma ; douleurs à la gorge, au ventre et à l’estomac, ça la serre de partout. Déformation du rêve par rapport aux symptômes d’Irma dans la réalité. Explication en suspens.
  • Elle a un air pâle et bouffi. La patiente était toujours rose. Déformation du rêve et substitution d’une autre personne, Freud ne dit pas laquelle ; apparition repérée des processus de déplacement et condensation dans la figuration (Darstellung) re-présentation d’Irma, la figure du rêve qui va « condenser » plusieurs personnes.

[…]

  • Je suis effrayé à la pensée que j’ai quand même omis de voir une affection organique. Vis-à-vis des autres médecins, conflit dans la conscience professionnelle de Freud entre l’organique / somatique et sa méthode thérapeutique appliquée aux hystériques. [On voit à quel point le rêve « modèle » de l’injection faite à Irma fait le lien entre les études sur l’hystérie et « la voie royale » d’accès à l’inconscient que signifie L’interprétation du rêve, cf. p. 663 P, via regia voie royale menant à Rome, ajout de 1909 à prendre avec circonspection cf. la préface de François Robert, p. VIII dans OCF.P/Quadrige]

 […]

  • Je l’emmène à la fenêtre pour voir dans sa gorge. Elle est un peu récalcitrante, comme les femmes qui portent des fausses dents. Je pense en moi-même : mais elle n’en a pourtant pas besoin. Déplacement du rêve sur une autre personne, emprunt à un élément diurne de déguisement : « une gouvernante » qui avait donné l’impression de prime abord d’une beauté juvénile mais cachait son dentier en ouvrant la bouche. Détails de souvenirs d’examens médicaux pour Freud, signifiant des « petits secrets qui sont alors dévoilés, sans que cela fasse plaisir ni à l’un ni à l’autre » : Matériel du rêve du genre « accessoire » qui renvoie aux petits secrets déplaisants du rêveur lui-même et de sa vie, plutôt physique.

« Elle n’en a pourtant pas besoin » ou le compliment pour Irma ? Non, autre pensée « d’arrière-plan » (Hintergedanke) : « Irma a une amie intime que je tiens en très haute estime ». Le personnage plus « accessoire » de la gouvernante […]

[…/…]

Le désir de Freud s’exprime d’avoir une patiente plus raisonnable qui « lui céderait plus volontiers » : Sa bouche s’ouvre alors fort bien. La note 2 en bas de page suggère l’essentiel du non-dit du rêve à la limite duquel s’arrête l’interprétation ici de Freud, l’ombilic (Nabel : nombril) du rêve, le point insondable par lequel il est en corrélation avec le non-connu (Unerkannten : Anzieu, I, 215, rappelle une observation  d’Eva Rosenblum : le choix de ce mot plutôt que Unbekannten, « inconnu » contiendrait l’association d’idée à « connaître une femme » au sens biblique de « s’unir à elle » et celle qui n’est pas connue étant la mère. Didier Anzieu (I, 215) considère que Freud touche là à un « émoi oedipien » qui « se fait jour pour être aussitôt barré, un émoi limité à la dimension incestueuse du complexe d’Œdipe ». Le rêve est alors retour. Lacan (Livre II du Séminaire, 1954-55, Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse, Seuil, p. 177-203) s’occupe du rêve de l’injection faite à Irma au moment où dans le chapitre précédent du Séminaire II, il a traité de la « régression » difficile à expliquer d’un point de vue topique. Dans le chapitre VII, métapsychologique » de la Td, le schéma de l’appareil psychique que Freud décrit est placé sous le signe de la régression dans le rêve à travers les « traces mnésiques » de l’inconscient et vers les « signes de perception » : ceux-ci reviennent dans le rêve sur le mode hallucinatoire (de qui prendrait ses rêves pour la réalité : si cela ne se passe pas « au sens figuré » cela se passe comme dans la folie ; le rêve fonctionnerait comme une folie passagère normale, alors que la motricité est barrée au niveau préconscient ; c’est ce qui va être décrit au chapitre VII dans le schéma de l’appareil psychique, le rêve remonte à l’envers  la voie du refoulé ).

  • Ce que je vois dans la gorge : une tache blanche et des cornets du nez escarrifiés. La tache blanche rappelle la diphteritis et l’amie d’Irma, mais de plus la grave affection de Mathilde, la fille de Freud, il y a deux ans. Les escarres des cornets du nez [Fliess / Flieβ (orthographe de Freud : avant la réforme de l’orthographe de 2005, β = ss) va arriver dans le rêve, mais Freud n’en parle pas encore] font penser à un souci de santé de Freud et à son recours fréquent autrefois à la cocaïne. Une patiente qui faisait comme lui s’est attiré une nécrose étendue de la muqueuse nasale ; et en 1885, Freud, qui avait publié un article « sur la coca » eut droit à de sévères reproches. De plus un ami cher (Fleischl : Ernst Fleisch von Marxow, assistant de Ernst Brücke) avait hâté sa mort par l’abus de ce remède.
  • J’appelle vite en consultation le Dr M., qui répète l’examen. Le « vite » rappelle une triste expérience médicale de Freud qui lui fit appeler d’urgence ce confrère plus âgé et expérimenté pour lui demander assistance : la grave intoxication d’une patiente par le Sulfonal qu’il avait prescrit en croyant le médicament inoffensif. L’élément accessoire associatif était que la patiente qui succomba à l’intoxication portait le même prénom Mathilde que sa fille : « Cette Mathilde-ci à la place de cette Mathilde-là ; œil pour œil, dent pour dent ».

R.B.:Toujours les mêmes phénomènes de déplacement (Verschiebung), un déplacement est un transfert : si Freud n’a pas encore bien repéré à cette époque le transfert sur la personne de l’analyste, il a par contre déjà constaté le déplacement des symptômes hystériques ; et ce processus du déplacement est à l’œuvre dans le rêve. Il y a là également quelque chose qui se passe de l’ordre de l’identification, et il faudrait même parler d’identification hystérique : la patiente qui succombe partage avec la fille aînée de Freud le même prénom ; Martha Freud est enceinte, la grossesse ne va pas sans lui occasionner des problèmes de santé, et l’enfant à venir sera le dernier. Freud va renoncer à ses relations sexuelles, devenir chaste, et sublimer : son œuvre va « décoller ».  Je (R.B.) m’inspire un peu de Didier Anzieu (aussi dans Le corps de l’œuvre : sur la « création »).

  • Le Dr M est pâle, sans barbe au menton, et il boite. Anzieu dit : le Dr M., c’est Breuer/Freud. La figure composite de l’homme sans barbe et qui boite ajoute à Breuer/Freud l’idée du frère aîné (Emmanuel) que Freud explique. […]
  • L’ami Otto se tient maintenant debout près de la malade et l’ami Léopold l’examine et met en évidence une matité en bas et à gauche. […]

 [/…]

  • Une partie cutanée infiltrée à l’épaule gauche. Freud et son propre rhumatisme à l’épaule.

RB : Ce qu’il sent dans son propre corps : ce stimulus perceptif (un Wahrnehmungszeichen est un « signe de perception », « signe pris pour vrai » littéralement) : le parcours régressif du rêve, qui remet dans le scénario du rêve le signe du corps perçu, l’hallucine.

L’« infiltration à gauche, en arrière et en haut » se rapporterait au poumon et ainsi de nouveau à la tuberculose.

  • Malgré le vêtement. […]

[/…]

  • Le Dr M. dit : C’est une infection, mais ça ne fait rien. Il va s’y ajouter encore de la dysenterie et le poison va s’éliminer (sich ausscheiden. RB : L’un des sens de die Scheide, « ligne de partage / de séparation » est anatomique, c’est « le vagin »).

Cela paraît « ridicule », mais une sorte de sens se dessine à l’analyse (si on « décompose ») : diphteritis locale […]

  • Ça ne fait rien est une consolation. [On arrive au dénouement du drame, le souhait va s’accomplir ; il y a une organisation théâtrale du rêve. R.B. : Rappel sur geht auf: le rideau « s’ouvre » comme au théâtre].

[…]

  • Dysenterie […]
  • Nous savons immédiatement d’où provient l’infection. […]
  • L’ami Otto lui a administré, alors qu’elle ne se sentait pas bien, une injection.  […]
  • Avec une préparation de propyl… propylène… acide propionique.

[…]

Note sur « Ananas » : jeux de mots sur les noms, assonance, partage du même son, identification, assonance avec le nom de famille d’Irma [Anna Hammerschlag-Lichtheim et Emma Eckstein, (soit la même Emma que celle du « double traumatisme » et de « l’après-coup » dans L’Esquisse : le « cas Emma »)]

  • Triméthylamine. C’est le mot clé du rêve. Apparition de l’ami Fliess et allusion à ses idées d’une « chimie sexuelle ». La triméthylamine vient illustrer, figurer ou re-présenter (darstellen) comme au théâtre ou sur cette autre scène du rêve, le personnage donnant la formule de Irma : elle représente la sexualité, ce facteur auquel Freud accorde « la plus grande significativité » (die grösste Bedeutung : Bedeutung veut dire « signification » et du coup « importance ») pour la genèse des affections nerveuses qu’il entend guérir. Cette clé du rêve débouche donc sur l’autre perspective que l’accomplissement du souhait le plus évident que Freud met à jour dans cette première analyse. Il s’agit de l’ouverture de son œuvre à venir et de la découverte de la psychanalyse : l’analyse devient déjà analyse infinie, ou non finie.

Autre élément remarquable (« signifiant » en terme lacanien) : les jeunes veuves. Leur sexualité a donc été arrêtée (comme celle de Freud qui va y renoncer à partir de son sixième et dernier enfant. Interprétation de D. Anzieu : W. Fliess a également mis enceinte sa femme Ida Fliess. L’enfant à venir de Freud et de sa femme s’appellera Wilhelm si c’est un garçon, sinon Anna). Freud « pressent » ce qu’il en est de sa relation avec Fliess. Et ce rêve au départ hétérosexuel en diable, si j’ose dire, lorsque la bouche d’Irma « s’ouvre » (le rideau geht auf comme au théâtre) débouche sur la relation quasi amoureuse de Freud avec Fliess recouvrant un fantasme incestueux avec la « mère » ; il est d’une immense richesse par rapport au fantasme incestueux œdipien à découvrir et ici recouvert (RB. J’ajouterais pour ma part : comme il l’est toujours en théorie et en relation avec l’ethnologie, du moins celle de Lévi-Strauss chez Lacan).

Est interprétée ici : la relation que fait Fliess entre « les cornets du nez et les organes sexuels féminins » qui sont représentés par les « trois formations frisées dans la gorge d’Irma ». Didier Anzieu analyse magistralement toutes les structures « ternaires » […]

  • On ne fait pas de telles injections avec une telle légèreté. […] Il est vraisemblable que la seringue n’était pas propre. […]

Conclusion. p. 154 : « Le rêve présente un certain état de choses tel que j’aimerais le souhaiter ; son contenu est donc un accomplissement de souhait, son motif un souhait (Wunsch). »

 

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