Comment peut-il exister des analystes croyants ? alors que pour Freud, religion et psychanalyse sont totalement incompatibles.
Que cherche Freud, pour lui mais aussi nous, lecteurs et commentateurs, à travers la figure (identificatoire / identificatrice) de Moïse ?
Quelle est, ou plutôt, quelles sont les fonctions psychiques du personnage de Moïse pour lui et donc pour nous ?
L’une d’elle s’entreverrait via les réticences de publications précisément envers les deux textes que Freud rédigea sur Moïse :
- Le premier, « Le Moïse de Michel-Ange », fut publié de façon anonyme en 1914, et le resta jusqu’en 1924 ;
- Le second, L’homme Moïse et le monothéisme fut l’objet de longues hésitations et débats quant à sa publication.
Cela signerait que quelque chose de particulier était en jeu pour l’homme Freud, que l’on pourrait mettre en opposition au savant Freud (ce qui fut par exemple le cas auparavant avec la question de l’admission de la sexualité).
En écho, il y a forcément aussi pour nous quelque chose de particulier pour nous en tant qu’hommes et que nos parts savantes tentent de saisir, et de plus pour moi, ne pas oublier que j’ai un « mon » Freud et que je n’ai pas de « mon » Moïse, du moins je pense. De même la Bible est à mes yeux un roman familial à plusieurs voix successives, ou encore une Belle Histoire au sens d’Anna Freud[1]. Tout cela nous met en quête de noyaux de vérité historique.
I : Qu’en dit Freud lui-même ?
Pour éviter de parler à la place de Freud ou de faire parler mon Freud… quelques extraits de correspondances (donc des écrits en théorie intimes) et de textes (donc publics). Cela peut être un peu lourd mais nécessaire.
1 : Le rapport de à la religion
Sa position est très nette, et ce depuis le début ; Freud la résume ainsi à la fin de sa vie, écrivant à Charles Singer, le 31 octobre 1938 :
« (…) je suis foncièrement incroyant. (…) j’ai passé toute ma longue vie à défendre (…) la vérité scientifique. » [2]
De cette position maintes fois affirmée, nous pouvons en inférer que les écrits de Freud sur Moïse ne sont pas ceux d’un croyant mais s’inscrivent bien dans une démarche scientifique, débutée spécifiquement, ainsi qu’il l’a souvent indiqué, avec Totem et tabou, et prolongée, entre autres, avec L’avenir d’une illusion.
Autres exemples, ironiques :
1928, à Jones[3] : s’enivrer avec du jus de pommes (la religion) est réellement ridicule. »
1928, à Binswanger[4] : « ceux qui arrivent à s’enivrer avec une boisson sans alcool (Dieu, la religion) m’ont toujours paru un peu bizarres. »
2 : Croyances et religion sont pour le moins œdipiennes
Les raisons de ce refus de croire trouveront progressivement des explications scientifiques, mais en deux temps, le temps second, œdipien étant celui du père (nous y reviendrons). Quelques exemples :
1910 : « Lorsque quelqu’un a, comme Léonard, échappé dans sa première a enfance à l’intimidation par le père et s’est affranchi dans sa recherche des chaînes de l’autorité, notre attente serait contredite de la façon la plus criante si nous trouvions que le même homme est resté un croyant et n’est pas parvenu à se soustraire à la religion dogmatique. La psychanalyse nous a appris à connaître l’intime corrélation entre le complexe paternel et la croyance en Dieu, nous a montré que le Dieu personnel n’est psychologiquement rien d’autre qu’un père qui a été exalté, et nous donne quotidiennement le spectacle de jeunes gens qui perdent la foi religieuse dès que chez eux s’effondre l’autorité du père.[5] C’est donc dans le complexe parental que nous reconnaissons la racine du besoin religieux ; le Dieu juste et tout-puissant et la bonne Nature nous apparaissent comme des sublimations grandioses du père et de la mère, ou plutôt comme des renouvellements et des réinstaurations des représentations de l’un et de l’autre dans la prime enfance. La religiosité se ramène biologiquement au désaide[6] et besoin d’aide longtemps persistants du petit enfant des hommes qui, plus tard, lorsqu’il a reconnu son délaissement et sa faiblesse effectifs face aux grandes puissances de la vie, ressent sa situation tout comme il l’a ressentie dans son enfance et cherche à en dénier la désolation par le renouvellement régressif des puissances protectrices infantiles. Cette protection, évitant de tomber malade de névrose, que la religion accorde à ses croyants, s’explique aisément par le fait que celle-ci les débarrasse du complexe parental auquel est attachée la conscience de culpabilité de l’individu, comme celle de l’humanité tout entière, et qu’elle liquide pour eux ce complexe, tandis que l’incroyant doit venir seul à bout de cette tâche. »[7] (je souligne)
1910 : à Putnam le 10/03/1910
« Le « Dieu juste » et la « bienveillante nature » ne sont que les plus nobles sublimations de notre complexe parental, et notre détresse infantile est source ultime de toute religion.
« Ce que nous voyons dans la vie ne donne guère l’impression qu’il y a un ordre moral de l’Univers. Mais cela est indépendant de la psychanalyse ; on peut, indifféremment, y greffer la religion ; par principe, j’aimerais qu’elle ne soit pas mise au service d’une doctrine spécifique. »[8]
1913, Totem et tabou :
« Le Dieu de chaque homme est à l’image du père, le rapport personnel à Dieu dépend du rapport au père charnel, il oscille et se transforme avec ce dernier, et Dieu n’est au fond qu’un père élevé au rang supérieur. »
« Dans la phase animiste, c’est à lui-même que l’homme attribue la toute-puissance ; dans la phase religieuse, il l’a cédée aux dieux, sans toutefois y renoncer sérieusement, car il s’est réservé le pouvoir d’influencer les dieux de façon à les faire agir conformément à ses désirs. Dans la conception scientifique du monde, il n’y a plus place pour la toute-puissance de l’homme, qui a reconnu sa petitesse et s’est résigné à la mort, comme il s’est soumis à toutes les nécessités naturelles. »
1937 : À son frère Martin, il lui rappelle que : « Yahvé était en effet un dieu des volcans… » [9] et rien d’autre.
Cela parle tout seul : le dieu-père est un résultat œdipien non résolu, une fixation. L’objet a changé, de profane (le père) a sacré (le dieu) mais la relation est la même.
3 : Sur la religion et ses mécanismes
J’ai souvent pensé que la théorisation de Freud sur la croyance religieuse a connu deux temps, deux époques. L’on peut trouver cela simplement « normal » et en faire le résultat d’un trajet de pensée, on penser qu’il y a là une sorte de révision comme pour la théorie des pulsions. Mais je pense qu’il y a aussi un effet lié à l’objet : il y a un temps préhistorique, et un temps historique. Et Freud mettait souvent la frontière au moment oedipien (sauf, sur le tard, pour les filles).
a : Un premier temps d’élaboration, sorte de préhistoire de la religion
La théorie se fonde à ce moment-là sur la sexualité infantile.
1896, Nouvelles remarques sur les psychonévroses de défense : « … ce qui est reproché (d’avoir accompli l’action sexuelle à l’âge d’enfant) se transforme en honte (si un autre venait à l’apprendre), en angoisse hypocondriaque (devant les conséquences nuisibles pour le corps de cette action à reproche), en angoisse sociale (devant la vindicte de la société pour ce délit), en angoisse religieuse, en délire d’observation (peur de trahir à d’autres cette action), en angoisse de tentation (méfiance justifiée envers sa propre force de résistance morale), etc. »
1897, Lettres à W. Fließ : le 24-1-1897 : « je suis près de croire qu’il faudrait considérer les perversions dont le négatif est l’hystérie comme les traces d’un culte sexuel primitif qui fut peut-être même, dans l’Orient sémitique, une religion (Moloch, Astarté) … »
– le 12-12-1897 : « Imagines-tu ce que peuvent être les mythes endopsychiques ? ( … ). L’immortalité, la récompense, tout l’au-delà, telles sont les conceptions de notre psyché interne … C’est une psycho-mythologie. »
1901, Psychopathologie de la vie quotidienne : 411-412 : « … une large part de la conception mythologique du monde, qui s’étend très loin, jusques et y compris les religions les plus modernes, n’est rien d’autre que de la psychologie projetée vers le monde extérieur. Une obscure connaissance ( … ) de l’existence de facteurs et de faits psychiques propres à l’inconscient se reflète ( … ) dans la construction d’une réalité suprasensible, que la science a pour tâche de retransformer en une psychologie de l’inconscient. On pourrait se risquer à résoudre d’une telle manière les mythes du paradis et du péché originel, de Dieu, du Bien et du Mal, de l’immortalité, etc., à transformer la métaphysique en métapsychologie. »
1908, Minutes de la Société psychanalytique de Vienne, le 29,1,1908 : la fondation du christianisme est une paranoïa à douze.
1910, Correspondance avec Sándor Ferenczi le 1,1,1910 : « L’ultime fondement des religions, c’est la détresse infantile de l’homme. »
1910, Correspondance avec C-G Jung le 2,1,1910 : « La raison dernière du besoin de religion m’a frappé comme étant la détresse infantile (…) À partir de ce moment il ne peut plus se représenter le monde sans parents, et s’octroie un Dieu juste et une nature bonne, les deux pires falsifications anthropomorphiques de l’image de l’univers dont il pouvait se rendre coupable. »
b : Un second temps d’élaboration, œdipien, soit un temps historique
L’appui théorique est ici plus « externe », c’est celui de la culture et de la morale.
1912, Minutes de la Société psychanalytique de Vienne, p. 162 : « La loi est ce que fait le père, la religion, ce qu’a le fils (voir Totem et tabou). »
1912-13, Totem et tabou :
– 302 : « Alors que la magie réserve encore la totalité de la toute-puissance aux pensées, l’animisme a cédé une partie de cette toute-puissance aux esprits et s’est engagé dans la voie menant à la formation d’une religion. »
– 369 : « Dans la scène sacrificielle se déroulant devant le dieu de la tribu, le père est donc effectivement contenu deux fois, comme dieu et comme animal sacrificiel totémique. »
– 370 n1 : « Dans les mythologies, le surmontement d’une génération de dieux par une autre signifie, (…) le processus historique du remplacement d’un système religieux par un nouveau, que ce soit par suite de la conquête par un peuple étranger, ou par la voie d’un développement psychologique. »
– 377 : « Dans le complexe d’Œdipe se conjoignent les commencements de la religion, de la moralité, de la société et de l’art … »
1919, Inquiétante étrangeté, 170 : « … les dieux, après l’écroulement de leur religion, deviennent des démons. »
1923, Une névrose diabolique, 231 : Dieu et le diable ont pour modèle primitif le père.
1924, Petit abrégé de psychanalyse, 353 : … « l’activité d’esprit humaine, celle qui a créé les grandes institutions de la religion, du droit, de l’éthique et de toutes les formes de la vie civique, vise au fond à rendre possible à l’individu la maîtrise de son complexe d’Œdipe et à faire passer sa libido de ses liaisons infantiles aux liaisons sociales souhaitées en définitive. »
1925, Autoprésentation (post-scriptum de 1935), 121 : « Dans l’Avenir d’une illusion », j’avais apprécié la religion d’une façon principalement négative ; je trouvai plus tard la formule qui lui rend mieux justice : son pouvoir repose à vrai dire sur son contenu de vérité, cette vérité n’est pas une vérité matérielle, mais historique. »
1930, Malaise dans la civilisation :
– 14 : le sentiment océanique : « … pourrait en quelque sorte aspirer à la réinstauration du narcissisme illimité, alors que c’est au sentiment infantile de dépendance qu’il faut imputer l’origine de l’attitude religieuse. »
– 28 : la religion « Sa technique consiste à rabaisser la valeur de la vie et à déformer de façon délirante l’image du monde réel, ce qui présuppose l’intimidation de l’intelligence. »
1933, Nouvelles conférences :
– 244-245 : pour la science, la religion est un ennemi sérieux, à la différence de l’art et de la philosophie.
1935, Correspondance avec Lou Andreas-Salomé le 6-1-1935 : « Les religions doivent leur puissance contraignante au retour du refoulé, ce sont des réminiscences de processus archaïques disparus, hautement effectifs, de l’histoire de l’humanité (…) : ce qui rend la religion forte, ce n’est pas sa vérité réelle, mais bien l’historique. »
Cette dernière formulation me semble importante à retenir pour la suite.
Freud a rédigé deux textes sur Moïse qui sont quand même bien différents :
- À partir d’un éprouvé voire une fascination devant la représentation d’un Moïse, disons italien, ou gréco-romain, et externe ;
- Un autre Moïse, Égyptien, et interne puisque résultant de lectures, de pensées et d’études ;
- Mais un point commun : deux grandes hésitations à publier !
Donc un sujet bien sensible, intime certainement, qui viendrait nous indiquer que l’hésitation ne vient pas de l’aspect scientifique. Ou dit autrement : un débat entre l’homme qui craint la publication) et le savant impavide ?
25 sept. 1912, Rome : Freud à Martha Freud (157), p. 317.[10] « …je rends visite tous les jours au Moïse de San Pietro in Vincoli (Saint-Pierre-aux-Liens), sur lequel j’écrirai peut-être un jour quelque chose » sculpté par Michel-Ange.
« Le Moïse de Michel-Ange » est commencé l’année suivante au cours de « trois semaines de solitude en septembre » 1913, à Rome, et sera publié sans nom d’auteur dans la revue Imago (1914, 3, 15-36)[11], malgré les pressions des disciples, avec la remarque suivante :
« La rédaction n’a pas refusé cette contribution qui, stricto sensu, ne correspond pas au programme, parce que l’auteur, connu d’elle, est proche des cercles analytiques et que sa façon de penser montre tout de même une certaine ressemblance avec la méthode psychanalytique. »
Le nom de l’auteur ne fut révélé qu’en 1924 lorsque Freud ajouta à son texte un « Supplément au travail sur le Moïse de Michel-Ange ».
Quelques extraits de courriers sur cette position de Freud :
- 03-01-1914, Freud à Ferenczi: « J’ai terminé le Moïse, mais aujourd’hui encore, je ne sais pas pourquoi vous avez protesté si énergiquement contre mon anonymat ».
- 09-01-1914, Jones à Freud: « Avez-vous décidé de mettre votre nom au Moïse ? »
- 19-03-1914, Freud à Jones: « Moïse sort tout juste des presses, mieux vaut sans doute ne pas reconnaître cet enfant en public. »
- 06-04-1914, Freud à Abraham: « Le Moïse est anonyme, d’une part par amusement, d’autre part parce que j’ai honte de son caractère dilettante évident, auquel d’ailleurs on échappe difficilement dans les travaux pour Imago; enfin parce que, plus que d’habitude encore, je doute des résultats et que je ne l’ai publié que pressé par la rédaction. »
- 6 avril 1914, Freud à Abraham (203F) p. 286 : « Le Moïse est anonyme par amusement, par honte de son dilettantisme, et par doute du résultat. »
Une explication un peu plus profonde, car tardive :
- 12 avril 1933, Freud à Weiss,[12]: (suite à la traduction du Moïse en italien) « Le Moïse italien m’a fait particulièrement plaisir. J’entretiens avec cette œuvre les rapports que l’on a par exemple avec un enfant de l’amour. Durant trois semaines solitaires de septembre, je suis resté chaque jour debout dans l’église devant cette statue, l’étudiant, la mesurant, la dessinant jusqu’à ce que je finisse par comprendre ce que, dans mon article, je n’ai osé bien sûr exprimer dans l’anonymat. Beaucoup plus tard seulement j’ai légitimé cet enfant que la psychanalyse n’avait pas conçu. »
Freud le dit assez clairement, avec cette formule : « enfant de l’amour », c’est-à-dire pas conçu par la psychanalyse. Cette expression désigne le bâtard, enfant adultérin ou illégitime conçu hors des normes sociales : mariage, célibat des prêtres…), ici hors des normes de la psychanalyse. D’où peut-être cette hésitation à publier nominativement. C’est un écrit intime, peut-être auto-adressé à une partie de Freud, du moins l’homme et pas le savant. Il nous en dit quelque chose à partir de l’intention de Michel-Ange à traduire la colère de Moïse lorsque celui-ci découvre la régression idolâtre de son peuple (c’est-à-dire le retour aux visions-du-monde, aux mythes endopsychiques et autres animismes) :
« la musculature exubérante de force du personnage ne sont qu’un moyen d’expression tout matériel servant à rendre l’exploit psychique le plus formidable dont un homme soit capable : vaincre sa propre passion au nom d’une mission à laquelle il s’est voué ».
Soit un modèle cher à Freud : le savant ne doit pas se laisser influencer par l’homme en lui, le monde du sens doit prendre le pas sur celui des sens : un homme qui domine la force pulsionnelle au profit de la Raison et pour le bien de tous… En ce sens, il se livre à une enquête à la manière de Sherlock Holmes (Freud adorait Conan Doyle) selon la méthode de la Sérendipité[13] : déduire à partir de petits détails (la position des mains, les cordons de sa barbe, la position des tables de la loi, le mouvement imprimé aux muscles, ou de détails oubliés et des pistes mineures), quel épisode du récit biblique Michel-Ange a mis en scène.
La scène est remarquable : un homme impressionné, presque hypnotisé, certes, mais par qui ou quoi ? Moïse ou Michel-Ange interprétant Moïse ? sa représentation ou cette représentation tierce puisque c’est celle de Michel-Ange ? En tout cas cela fait penser à une scène d’épreuve de la réalité comme cela se passera plus tard face au Colisée. Mais c’est aussi une scène où l’on voit, suite au saisissement de l’homme, se mettre au travail le savant : ce double aspect se retrouve souvent chez Freud (ne serait-ce sur la question de la sexualité). Voir en ce sens l’analyse de Binswanger.
Les disciples ont participé aux études comme : Ferenczi, Jones, Abraham, Eitingon, etc. Par exemple :
- 7 juin 1908 ; Freud à Abraham (35F), p. 78[14]: La transformation du bâton rigide en serpent souple est la représentation non voilée mais inversée de l’érection.
- 30 oct. 1912, Jones à Freud, (97), p.218[15]: une remarque sur la main gauche de la statue.
- 3 nov. 1912, Freud à Ferenczi, (338F), p. 444 : Freud travaille au texte sur Moïse mais Jones lui a envoyé de Florence des photos de statues de Donatello qui ébranlent ses interprétations : les poses de la statue seraient dues à des souhaits artistiques sans significations particulières[16].
- 5 déc. 1928, Ferenczi à Freud (1143Fer) p. 398[17]: Ferenczi décrit des statues espagnoles de Moïse.
Quelques indications sur la quête de Freud dans ce texte.
30 sept. 1934, Freud à Arnold Zweig[18] : « Le point de départ de mon travail vous est bien connu (…) En face de nouvelles persécutions, on se demande comment le Juif est devenu ce qu’il est et pourquoi il s’est attiré cette haine éternelle. Je trouvai bien tôt la formule. Moïse a créé le Juif, et mon travail reçu le titre : L’homme Moïse, un roman historique (…) La chose se divisait en trois parties, la première intéressante de façon romanesque, la seconde laborieuse et fastidieuse, la troisième dense et ambitieuse. La troisième a fait échouer l’entreprise, car elle apportait une théorie de la religion, certes rien de nouveau pour moi après Totem et tabou, mais tout de même quelque chose de plutôt nouveau et fondamental pour les non-initiés. La pensée de ces non-initiés me commande de garder cet essai secret. Car nous vivons ici dans une atmosphère de rigorisme catholique. (…) Ainsi l’on risquerait ici une interdiction de l’analyse à Vienne. »
27 octobre 1934, Freud à Eitingon : « Moi aussi je vous écris à propos du Moïse. Il est à présent achevé. Les difficultés qui s’opposent à sa publication me paraissent insurmontables. Elles sont d’ordre interne et externe. Pour ce qui concerne les premières, je vous accorde qu’aucune espèce de prudence ou de « camouflage » ne servirait à rien. Il porte de toute façon déjà le sous-titre « un roman historique », mais cela n’empêcherait pas la réaction à son contenu. Une partie cause de sévères offenses à la sensibilité juive, une autre à la sensibilité chrétienne ; à notre époque on ne peut oser ni l’une, ni l’autre. Que le père Schmidt n’y trouve rien de plus agaçant que dans l’Illusion est correct, mais la répétition est aussi quelque chose, surtout en ce moment[19].
Il y a cependant aussi quelque chose de nouveau là-dedans, non pas une idée, mais une formulation qui me paraît précieuse. L’édifice se décompose en effet en trois parties, 1) L’homme Moïse, 2) Le peuple d’Israël, 3) La véracité de la religion. Cette dernière partie contient une réfutation ou, si vous voulez, un complément à l’Illusion. Si l’on y disait que la religion n’est qu’illusion, on concède ici qu’elle a aussi une véracité qui, seule, explique son grand effet. Ce n’est cependant pas une véracité matérielle (ou idéelle), mais historique. Je veux bien entendu parler du retour de l’oublié, qui a été deviné dans la théorie du totem. Pas de nouvelle pensée, donc, mais une formule qui me fascine parce qu’elle est juste et concluante. Un motif de plus pour étouffer ce texte; ce qui nous amène à la difficulté interne.
Celle-ci tient au fait que ma construction historique ne produit pas, sur moi-même, d’impression frappante. À chaque fois, il suffit que j’étudie un fragment de la bibliographie pour ne plus croire à sa vraisemblance. Les spécialistes auraient la part trop belle si on leur laissait mettre en lambeaux la chimère de l’outsider. Or je ne veux pas envoyer ma belle formule dans le monde en si piètre compagnie. Si ma conviction était plus sûre, aucun risque sans doute ne me dissuaderait de le publier. »
13 novembre 1934 : « On ne peut vraiment rien faire pour mon Moïse. Il y a encore plus regrettable que le danger extérieur : l’insatisfaction que m’inspire la faiblesse historique de la première partie. Je ne suis pas bon pour les romans historiques. »
16 déc. 1934, Freud à Zweig A., p. 136 : « Laissez-moi en paix avec Moïse. Que j’ai échoué dans cette tentative pour créer quelque chose – la dernière probablement – me déprime déjà assez. (…) L’homme, ce que je voulais en faire de lui, me poursuit continuellement. »
6 janv. 1935, Freud à Salomé,[20] :
« Je peux compléter aujourd’hui ce que vous savez déjà de mon dernier essai. Il est issu de la question de savoir ce qui, en principe, a créé le caractère du Juif et a abouti à la conclusion que le Juif est une création de l’homme Moïse. Qui était ce Moïse et quelle a été son action ? Il y fut répondu par une sorte de roman historique. Moïse n’était pas un Juif, mais un Égyptien distingué, haut dignitaire, prêtre, peut-être prince de la dynastie royale, un ardent partisan de la croyance monothéiste dont le pharaon Amenhotep IV avait en 1350 av. J.-C. fait une religion d’État. Lorsqu’à la mort du pharaon, cette nouvelle religion s’effondra et que la XVIIIe dynastie s’éteignit, l’effréné ambitieux perdit tout espoir, décida de quitter son pays natal, de se procurer un nouveau peuple qu’il instruirait dans la magnifique religion de son maître ; il alla jusqu’à condescendre à se fixer dans une tribu sémite, venue dans le pays en même temps que les Hyksos, se mit à leur tête, leur fit quitter le servage pour la liberté, les dota d’une religion, celle d’Aton spiritualisée, et introduisit chez eux comme un témoignage de consécration et comme moyen de se reconnaître entre soi la circoncision, qui était de coutume chez les Égyptiens et le devint chez eux. Ce dont se targuèrent plus tard les Juifs, à savoir que Jahvé, leur Dieu, les avait choisis comme son peuple d’élection et délivrés de l’Égypte, se réalisa mot pour mot — pour Moïse. Avec cette élection et le don de la nouvelle religion, il avait créé le Juif.
Ce Juif supporta aussi mal qu’autrefois l’Égyptien la croyance et les exigences de la religion d’Aton. Un savant chrétien, Sellin, a établi avec quelque vraisemblance que Moïse avait été abattu quelques décennies plus tard au cours d’un soulèvement populaire et sa religion rejetée. Il paraît certain que cette tribu revenue d’Égypte a dû s’unir ensuite à d’autres, apparentées, qui vivaient dans le pays de Midian (entre la Palestine et la côte occidentale de 1 Arabie) et y avaient adopté l’adoration d’un dieu du genre Vulcain résidant sur le mont Sinaï. Ce Dieu Jahvé primitif devint le dieu national du peuple juif. Mais la religion mosaïque n’était pas éteinte, il était resté d’elle et de Bon fondateur une obscure connaissance ; la tradition confondit le dieu de Moïse avec Jahvé, lui attribua la libération hors de l’Égypte et identifia Moïse avec les prêtres de Jahvé de Midian, qui avaient introduit ce dieu-là en Israël. En réalité, Moïse n’avait jamais entendu parler de Jahvé, les Juifs n’ont jamais traversé la mer Rouge, jamais été jusqu’au Sinaï. Jahvé expia chèrement son usurpation du dieu de Moïse. Le dieu plus ancien se tenait toujours derrière lui ; au cours de six à huit siècles, Jahvé devint l’image même du dieu de Moïse. La religion do Moïse avait fini par s’imposer bous forme d’une tradition à demi éteinte. Ce processus de formation d’une religion est typique et n’était que la répétition d’une autre plus primitive encore. Les religions doivent leur puissance contraignante au retour du refoulé, ce sont des réminiscences de processus archaïques disparus, hautement effectifs, de l’histoire de l’humanité. J’ai déjà dit cela dans Totem et Tabou. Et je le condense maintenant en une formule : ce qui rend la religion forte, ce n’est pas sa vérité réelle, mais bien l’historique.
Et voyez-vous, Lou, cette formule, qui m’a totalement fasciné, on ne peut plus, de nos jours, dénoncer en Autriche, sous peine d’encourir du gouvernement à prépondérance catholique qui nous dirige une condamnation publique de l’analyse. Et c’est uniquement ce catholicisme qui nous défend contre le nazisme. En outre, les fondements historiques de l’histoire de Moïse ne sont pas assez solides pour servir de base à mon inestimable intuition. Donc, je me tais. Il me suffît de pouvoir croire moi-même à la solution de ce problème. Il m’a poursuivi tout au long de ma vie. »
14 mars 1935, Freud à Zweig A., p. 142-143 : critique du livre d’Auerbach sur Moïse (Désert et terre promise). Cette critique nous permet de saisir les points importants pour Freud et ce qu’il considère comme son apport spécifique : l’égyptianité de Moïse, la dérivation de sa religion à partir du monothéisme égyptien, la fusion de son personnage avec un prêtre madianite, le salut miraculeux et le passage du Sinaï comme fantasmes, et que Moïse n’a jamais connu le nom de Yahvé : « il (Auerbach) n’a pas rompu avec la tradition pour exposer l’histoire refoulée par elle ».
2 mai 1935, Freud à Zweig A., p. 145 : « Le Moïse ne lâche pas mon imagination. »
16 mai 1935, Salomé à Freud[21] : « Comment pourrais-je assez vous remercier de m’avoir répondu personnellement, de votre récit et d’une si longue lettre entièrement de votre main ! Voici trois jours que je la médite et chaque fois, j’ai voulu vous écrire sur-le-champ. Aujourd’hui, même, il ne s’agit que d’un petit cri d’appel* Et naturellement, aussi d’un cri d’alarme à l’idée que tout ce qui est circonscrit dans votre travail doit demeurer médit. Avec raison, sans doute. Vous êtes bien placé pour juger avec exactitude et certitude des circonstances actuelles en Autriche. Mais quel dommage pour nous tous ! Et le fondement même de la chose nous est involontairement apparu si lié à votre pensée, tellement « déjà publié » qu’en principe, cela ne devrait plus, maintenant, faire courir le moindre risque à la situation de fait ? D’autant plus que vous vous autorisez et vous réclamez d’un « savant chrétien », qui a traité le problème de Moïse sur le plan historique.
Dans ces discussions, un point m’a particulièrement surprise : le fait que la « tribu sémite » dans laquelle Moïse aurait condescendu à se fixer — paraît diminuée dans un état secondaire par rapport aux tribus apparentées et égyptiennes. Elle détenait pourtant le bien de Moïse, commença par le détériorer (comme l’avaient fait les autres), fit alors incidemment après maintes tribulations, l’expérience inappréciable du retour du refoulé, mais conserva en soi la dualité do l’élément supérieur et inférieur ?
Le concept de toutes les religions qui s’est imposé à vous à travers le problème juif se trouve déjà dans Totem et tabou comme vous le mentionnez vous-même. Mais ce qui m’a fascinée moi, dans votre conception, c’est un certain caractère du « retour du refoulé », à savoir le fait que l’on voit réapparaître dans ce retour quelque chose de très haut et de très précieux, en dépit de ces très longs « mélanges » avec tout le reste.
Ce sont des vérités « historiques » et non « réelles » qui exercent là secrètement leur véritable puissance ; mais dans ces passés historiques, ce sont cependant des puissances hautement réelles et spirituelles dont le rang élevé s’est conservé sans avoir pu être éteint. Jusqu’ici, nous nous représentions surtout sous l’expression « retour du refoulé » des exemples de processus névrotiques : on ne sait quoi d’injustement refoulé obsédait de façon inquiétante le névrosé de schèmes engourdis par le temps, parce qu’il y percevait quelque chose d’originairement familier et s’en détournait pourtant avec anxiété. Ici, au contraire, nous nous trouvons devant des exemples de la survivance de ce qui fut un jour victorieusement le sommet de la vie, survivance se manifestant à travers tout ce qui consume ou se retourne contradictoirement, sous forme de la plus véridique des possessions. Et ainsi qu’il en a été pour le mosaïsme originaire, ces côtés positifs du processus peuvent aussi avoir été à l’œuvre dans d’autres religions, en sorte que le refoulé ne se trouve plus uniquement impliqué dans des survivances pathologiques. Ce qui, dans les temps des origines, peut avoir résonné chez l’homme et ce qui plus tard nous apparaît comme si évidemment dépassé et faussement clair dans le sens de la Connaissance, contient par ailleurs des éléments de puissances spirituelles qui se retirent plus tard derrière l’intellect, derrière ce qui affaiblit l’affect. »
14 déc. 1937, Freud à N. N., (295), p .479[22] : « … la première expérience, pour ainsi dire l’expérience embryonnaire de ce peuple (Juif), l’influence de l’homme Moïse et l’exode d’Égypte, a déterminé son développement futur tout entier jusqu’à nos jours – à la manière d’un véritable traumatisme de la première enfance dans l’histoire d’un individu névrosé.
Les raisons politiques invoquées
Il s’agissait de ne pas froisser aussi bien la communauté juive que la chrétienne, ce que Freud continua à faire par exemple face à la menace d’Anschluss. Il a longtemps cru que l’Église protégerait l’Autriche contre Hitler[23]…
02 03 1937, Freud à Jones[24] : « si notre ville tombe, les barbares prussiens submergent l’Europe. Malheureusement, la puissance qui nous a protégé jusqu’à présent – Mussolini – semble maintenant laisser les mains libres à l’Allemagne. Je voudrais vivre en Angleterre. »
22 février 1938 : Freud à Ernst : « L’Église catholique est très puissante et elle opposera une forte résistance. »
Peter Gay fit ce commentaire :
« Les hauts dignitaires de l’Église autrichienne, gardiens de la conscience catholique, ne firent rien pour mobiliser les forces saines du pays, les gens honnêtes et modérés ; à l’exemple du cardinal Theodor Innitzer, les prêtres célébrèrent en chaire les vertus de Hitler, s’engagèrent à collaborer joyeusement au nouvel ordre des choses, et firent hisser la croix gammée en haut des clochers, aux occasions appropriées. »[25]
Les raisons religieuses invoquées
14 octobre 1934, 779 E, Eitingon à Freud[26] : « Je me rappelle que vous m’avez dit, au mois d’août, que vous ne vouliez pas infliger aux Juifs la vexation consistant à présenter Moïse comme un Égyptien. »
30 septembre 09 1934, à Arnold Zweig (p.129), Freud avait déclaré : « C’est Moïse qui fait le Juif ».
Défaire Moïse, doublement : un « homme » et rien d’autre, donc pas divin, et un Égyptien de surcroît, serait défaire le judaïsme … C’est un vrai travail de sape de l’édifice religieux !
On pourrait penser qu’il s’agit d’un nouveau meurtre de Moïse : celui de sa désacralisation. Il n’est qu’un homme dont l’humanité définitive demeure distincte du divin. En fait, je préfère plutôt l’idée que Freud défait ici le meurtre de l’homme Moïse, qui avait permis de le sacraliser un fois mort (voir Totem et tabou), ou dit autrement, il met à mort le Moïse sacré en le rendant à l’humain.
Cette position de Freud rejoint celle que Kafka notait dans son journal un peu avant, en 1921 :
« Ce n’est pas parce que sa vie fut trop brève que Moïse n’atteignit pas Canaan, mais parce que c’était une vie humaine ».[27]
Le meurtre ou sacrifice (meurtre qui rend grandiose le mort[28]) est une mise en acte du refoulement (un acte psychique) :
- Pour déshumaniser l’homme et en faire un symbole ;
- Ce qui nous donne deux Moïses : le premier ayant été tué par « son » peuple révolté, le second venant recouvrir l’existence du premier ;
- Et une symbolisation, sans cesse élaborée (renforcement du refoulement) vient recouvrir cela (comme sceller un peu plus la tombe) ;
- Ensuite, il suffit de manipuler des symboles et non plus des réalités, ce qui permet entre autres : fusionner Aton et Yahvé, qui vient après-coup recouvrir et enfouir Aton au service des nouvelles lois mosaïques (« tuer » Aton sacralise Yahvé) ;
- Opération qui se répètera avec le christianisme, presque à la lettre : le meurtre d’un Christ juif pour en faire le premier Chrétien, Josué est ainsi muté en Jésus. La différence est que là, le meurtre est avoué, reconnu et du coup fondateur. (Notons l’insistance de la question des noms : on efface l’ancien et on rebaptise ; changez le nom, vous changez de monde.)
« La nouvelle religion [le christianisme] constitua une régression culturelle par rapport à l’ancienne […] [parce qu’elle] ne se maintint pas au degré de spiritualisation auquel le judaïsme s’était élevé », et rétablit bon nombre d’éléments de l’idolâtrie religieuse : la déesse mère, le polythéisme, des croyances superstitieuses, magiques ou mystiques, « qui devaient représenter une grave inhibition pour le développement spirituel des deux millénaires suivants ».
C’est un roman familial et un refoulement culturel très classique, et c’est cela que Freud défait de façon consciente, selon le travail psychanalytique classique, en une sorte de testament : un peu de raison contre les croyances. Mais avec la crainte de susciter un tremblement de terre, qui n’a pas eu lieu !
Parce que cela ne marche : jamais ! il y eut Platon dans ce même projet d’amener les êtres d’une doxa à une hyperdoxa, il y eu Épicure et bien d’autres, et même Einstein. Bref, les humains ont besoin de croire et de projeter leurs fantaisies endopsychiques…
La première résistance ? Faire de ce texte quelque chose de non analytique… alors qu’il illustre la méthode même de son inventeur.
[1] Anna Freud, „Schlagephantasie und Tagtraum“, Vortrag in der Wiener Psychoanalytischen Vereinigung am 31 Mai 1922. Imago, VIII Band, 1922, Internationaler Psychoanalytischer Verlag, Leipzig – Wien – Zürich – London, pp. 317-332. The Relation of Beating-Phantasies to a Day-Drem”, International Journal of Psychoanalysis, 1923, 4 : 89-102.
[2] Sigmund Freud, Correspondance générale, Gallimard : lettre (309), pp. 494-495.
[3] Sigmund Freud – Ernest Jones, Correspondance complète (1908 – 1939), PUF, 1998.
[4] Sigmund Freud – Ludwig Binswanger, Correspondance, 1908 – 1938, Calmann-Lévy, 1995, (2-4-1928) 275.
[5] Pensons à l’histoire même de Freud dans l’affaire du chapeau de son père.
[6] Faire le lien avec la notion de Nebenmensch.
[7] « Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci » (1910), OCF-P X, PUF, 1993, p.149.
[8] Introduction de la psychanalyse aux États-Unis. Autour de James Jackson Putnam, Gallimard, 1978., pp. 122-123
[9] Sigmund Freud, lettre à Martin Freud, le 16.8.1937, in Lettres à ses enfants, Aubier, 2012.
[10] Sigmund Freud, Correspondance générale. 1873-1939, Gallimard,1979.
[11] Freud : « Le Moïse de Michel-Ange », 1914, in Essais de psychanalyse appliquée, Gallimard.
[12] Sigmund Freud – Edoardo Weiss, Lettres sur la pratique psychanalytique, Privat, 1975, p. 88.
[13] Voir Joël Bernat, « Opsis ou la transmission des modes de penser », in Transfert et pensée (La transmission de pensées en psychanalyse), collection « Perspectives Psychanalytiques », L’esprit du temps – P.U.F., octobre 2001.
[14] Sigmund Freud – Karl Abraham, Correspondance complète. 1907 – 1925, Gallimard, 2006.
[15] Sigmund Freud – Ernest Jones, Correspondance complète (1908 – 1939), PUF, 1998.
[16] Voir Jones, La vie et l’œuvre de Freud, II, PUF, p. 389
[17] Sigmund Freud – Sándor Ferenczi, Correspondance, 1920 – 1933, Calmann-Lévy, 2000.
[18] Sigmund Freud – Arnold Zweig, Correspondance 1927 – 1939, Gallimard, 1973, p. 129-130.
[19] Freud redoutait que la publication, « dans l’atmosphère d’orthodoxie catholique » qui régnait alors en Autriche, n’entraîne une interdiction de la psychanalyse et ne puisse priver les analystes viennois de leurs moyens d’existence ; il ne voulait pas, disait-il, en prendre la responsabilité (Freud/A. Zweig p. 102-103).
Wilhelm Schmidt (1868-1854), ethnologue, historien des religions et linguiste, professeur à l’université de Vienne, directeur du musée pontifical de la Mission. Selon Freud, une force déterminante de la politique autrichienne de l’époque et un adversaire déclaré le la psychanalyse, notamment de la « théorie du totem ». Son initiative venait de provoquer l’interdiction de la Rivista italiana di psicoanalisi (Freud/A. Zweig, p. 102-103, et note 2; cf. p. 141).
[20] Lou Andreas-Salomé, Correspondance avec Freud, Gallimard, 1970, p. 252-253.
[21] Lou Andreas-Salomé, Correspondance avec Freud, Gallimard, 1970, pp. 256-257.
[22] Sigmund Freud, Correspondance générale.
[23] Voir Joël Bernat, « Le nazisme comme mise à l’épreuve de la réalité des théories psychanalytiques sur l’individu et les masses ». Texte de la conférence donnée au Colloque : « Confrontations au national-socialisme en Europe francophone et germanophone (1919-1949) : Interprétations du national-socialisme (politologie, histoire, psychanalyse) à la Maison de l’Homme, Sorbonne, Paris, le 08 mars 2018. À paraître chez Peter Lang.
[24] PUF 1998, p. 863.
[25] Peter Gay, Freud. Une vie, Hachette, tome 2, 1991, p. 386.
[26] Sigmund Freud-Max Eitingon, Correspondance 1906-1939, Hachette
[27] Franz Kafka, le 19 octobre 1921, in Journal intime, Grasset 1945. Voir son texte « Devant la loi ».
[28] A l’instar des Monuments aux Morts des guerres mondiales.