Pierre Delmas : « Psychanalyse et neurosciences : deux disciplines qui ne s’excluent pas »

 Après la lecture de Piazza et Bohler, deux spécialistes des neurosciences, qui développent chacun à leur manière leur théorie sur l’homme contemporain face aux défis du monde actuel, j’ai été frappé par le fait que leur connaissance des mécanismes du cerveau humain ne sont pas en désaccord avec les processus psychanalytiques découverts par Freud, et qu’il existe même des similitudes troublantes entre ces deux sciences qui procèdent néanmoins de deux fondements opposés que sont la biologie et la psychologie Si, à première vue, ces deux domaines semblent inconciliables, ils n’en détiennent pas moins de nombreuses analogies. Je me propose d’en citer quelques-unes.

Les conceptions de Piazza

 Dans Homo biologicus,[i] Piazza dit en substance que depuis des millénaires l’homme a cru (et croit encore) à une dualité corps/esprit alors même que ce dernier n’est en réalité qu’un prolongement du cerveau selon les toutes dernières découvertes des neurosciences. Cette dualité corps/esprit a été largement répandue jusqu’à nos jours par la religion judéo-chrétienne. Et ce n’est que tout récemment que le postulat d’une interpénétration de ces deux entités, tout du moins pour les biologistes, est devenue une évidence, et que tous les raisonnements qui tendent à scinder le corps et l’esprit en deux blocs autonomes, compte tenu des expériences réalisées sur le cerveau, ne sont plus défendables même si la majorité des individus reste encore attachée à cette image bipolaire du fonctionnement humain. Et la société tout entière serait encore, selon lui :

Pétrie de l’idée que si l’homme est une entité biologique, il n’en est pas moins une entité spirituelle, et que ces deux éléments existent de manière bien distincte chez lui. La civilisation judéo-chrétienne nous aurait bercé avec cette idée que nous considérons depuis comme une vérité absolue alors même que les dernières découvertes biologiques en ont montré l’inanité.

Cette idée est l’un des fondements sur lequel s’appuie Piazza pour exposer ensuite sa théorie visant à répartir les hommes en deux grandes catégories : les exostatiques et les endostatiques. Avant de définir ces deux grandes orientations humaines, je souhaiterais toutefois tempérer l’idée exprimée par le biologiste. En effet, si l’église et la religion ont longtemps été prédominantes dans notre société occidentale, cela n’est plus le cas de nos jours, et l’argument selon lequel les individus restent indéfectiblement attachés à l’idée que le biologique et le spirituel sont deux sphères bien distinctes, n’est sans doute plus aussi vrai.

Dès le début du 20°siècle, les théories psychanalytiques ont d’ailleurs largement contribué à remettre en question ce présupposé en affirmant que le corps et la psyché étaient interdépendants. L’exemple de l’hystérie, point de départ de la découverte de l’inconscient par Freud, et l’interaction du psychique sur le somatique a montré que ces deux entités sont subordonnées l’une à l’autre. Même à cette époque l’idée de la dualité du corps et de l’esprit n’était donc plus un dogme en soi puisque l’on avait découvert qu’il existe une interconnexion entre la matière et l’esprit. On partait néanmoins du principe que le psychisme avait des répercussions sur la sphère somatique tandis que les neurosciences considèrent que la psyché s’est incarnée dans la matière, qu’elle en est, en quelque sorte, le prolongement.

Cela dit, il est fort possible que cette idée reste en partie ancrée dans l’esprit des hommes. Les recherches en neurosciences ont donc montré – ce qui est loin d’être négligeable – que tout ce qui constitue le spirituel émane certainement du cerveau qui a profondément évolué depuis la naissance de l’humanité, ce qui a permis de comprendre comment cet organe est en mesure de produire de la pensée – depuis le langage jusqu’au raisonnement en passant par la capacité à concevoir des idées abstraites. Mais la psychanalyse a sans doute posé le premier jalon permettant de ne plus considérer le corps et l’esprit comme deux entités strictement séparées l’une de l’autre.

Piazza considère par ailleurs que la biologie ne détermine pas l’individu contrairement à ce que l’on pensait au siècle dernier. Les expériences de vie contribuent à façonner la personnalité humaine et, si l’on résume son propos, on pourrait dire que l’environnement et le biologique sont interdépendants et fonctionnent de concert. L’homme est le produit d’une interaction entre ses expériences de vie et ses gènes. Voilà une idée qui n’est pas foncièrement nouvelle non plus puisque la psychanalyse avait déjà conçu d’une certaine manière cette porosité entre les processus psychiques et l’environnement. Ce que Piazza appelle les gènes n’est rien moins que ce que l’on nomme habituellement en psychologie les prédispositions caractérielles. Ces prédispositions vont être en interaction avec le vécu du sujet et le façonner par cette constante imbrication entre l’une et l’autre. Piazza n’exprime rien d’autre lorsqu’il écrit ces mots :

Vos gènes vont déterminer comment vous réagissez aux expériences de vie, et celles-ci vont déterminer ce que vous allez devenir.

La biologie n’a donc fait que démontrer ce qui avait été pressentie par la psychanalyse : l’idée qu’il existe une interdépendance entre le soma et la psyché. Ce qu’elle n’avait peut-être pas bien appréhendé, c’est que la psyché est une construction qui s’est opérée à partir du cerveau, et qu’il existe une étroite collaboration entre ces deux entités non plus opposées comme le prétendaient les tenants du monothéisme chrétien mais complémentaires et participatives.

On peut donc seulement affirmer que la biologie du 21ème siècle a démontré de manière évidente ce qui n’était encore qu’une simple hypothèse au siècle précédent.

A partir de ce postulat Piazza constate que la liberté est une des aspirations fondamentales de l’homme, et il l’explique en énumérant tous les efforts que celui-ci a fourni pour se libérer des besoins essentiels qu’il doit satisfaire pour survivre. Si, dans un passé lointain, la dopamine (neurotransmetteur qui provoque la sensation de plaisir) le récompensait lorsqu’il trouvait de la nourriture, un endroit sûr à l’abri des intempéries, ou tout autre besoin nécessaire à sa survie dans le milieu hostile où il baignait, de nos jours tous ces besoins sont pourvus sans qu’il ait nécessité de faire de gros efforts pour se les procurer. Il a donc dû inventer d’autres sources de plaisir, celui-ci étant, avec la recherche de la liberté, l’une des motivations les plus fortes qui le guide en permanence dans sa quête hédoniste. Actuellement, grâce aux technologies, il a réussi à avoir du temps libre pour s’adonner à toutes sortes d’activités visant à se faire plaisir

Freud avait évoqué également, en son temps, le principe de plaisir comme moteur de la vie humaine sinon qu’il l’avait considéré comme un mécanisme psychique. Mais déjà, à cette époque, la frontière entre le spirituel et le biologique n’était plus si étanche même si bien des individus pouvaient encore y croire. Il apparaît qu’à l’heure actuelle cette distinction a de moins en moins d’écho, et c’est ce qui a sans doute contribué à faire de l’homme un être de plus en plus matérialiste au fil du temps.

Pour expliquer sa théorie Piazza se fonde sur les plaisirs matériels inventés par l’homme qui visent le plus souvent à satisfaire des plaisirs artificiels. Ces réflexions le conduisent à bien distinguer le bonheur du plaisir et à en faire deux voies presque opposées. Le bonheur vise, selon lui, à un retour à l’état d’équilibre, au bien être fondamental alors même que le plaisir est la recherche de la jouissance et de l’excès. Il met sur le même plan des activités telles que la sexualité et son aboutissement l’orgasme, et la consommation de drogues, de chocolat, de vitesse qui, elles, sont artificielles comme il le souligne. Or la sexualité est avant tout une fonction naturelle au même titre que la faim et la soif, puisqu’elle pourvoie au cycle des générations. S’il apporte du plaisir et de la jouissance, l’orgasme n’en est pas moins une fonction équilibrante aussi bien biologique que psychique. C’est Reich, qui, le premier, a mis ce processus en évidence[ii] et a montré que lorsque l’individu est atteint d’impuissance orgastique, celle-ci peut engendrer une stase sexuelle – accumulation d’énergie n’ayant pu être libérée au cours de l’orgasme – qui engendre alors des comportements névrotiques, agressifs voire antisociaux et fait le caractère « névrosé », à l’inverse du caractère « génital » doté cette fois de la puissance orgastique et considéré comme un individu sain.

Selon Piazza l’homme ne dispose donc que de moyens artificiels tels que la consommation excessive de nourriture, de drogues, d’alcool, de tabac et de loisirs. C’est tout du moins ce que l’on observe dans notre société fondée sur le consumérisme à outrance de produits et de services qui servent bien souvent à compenser les frustrations affectives et sexuelles des hommes. La consommation de plus en plus élevée de vidéos pornos sur le web, en est sans doute la meilleure illustration.

Epicure avait émis l’idée que le bonheur n’est pas la recherche du plaisir mais l’absence de douleur. Dans le même registre Piazza définit le bonheur comme un retour à l’équilibre : absence de besoins et de douleurs qui engendrent un état serein. Mais, pour l’homme contemporain, le bonheur ne signifie-t-il pas bien plus que l’absence de douleur ? il est comparable à une forme de plaisir augmenté proche de la joie. C’est un instant d’exception, un degré d’exaltation qui, par définition, est assez bref. L’état amoureux est sans doute l’exemple le plus parfait de la sensation de bonheur et l’on sait que cet état n’est ressenti que dans les premiers moments d’une liaison même si, par après, l’amour existe mais se modifie.

A partir des notions de bonheur et de plaisir, le biologiste crée deux types d’individus : le type exostatique et le type endostatique. L’un, généralement matérialiste et progressiste, est à la recherche de plaisirs toujours plus sophistiqués, quand l’autre aspire au bonheur (retour à l’équilibre) et affiche des idées conservatrices. Il ajoute néanmoins une catégorie d’individus qu’il dénomme interstatique. Elle se situe entre ces deux extrêmes et recherche le bonheur et les plaisirs mais de façon modérée.

Pour revenir à l’orgasme que Piazza range à tort, me semble-t-il, dans les plaisirs artificiels, Reich a très bien décrit le mécanisme de la pulsion sexuelle qui, au même titre que la faim et la soif, demande à être assouvie non seulement parce qu’elle vise la recherche d’un plaisir, mais aussi qu’elle aspire à un retour à l’équilibre de l’organisme, condition de la détente, outre qu’elle constitue une symbiose émotionnelle entre deux êtres humains. Si bien que l’acte sexuel, lorsqu’il n’est pas entravé ou dévoyé, combine tous les critères de satisfaction biologique, émotionnelle et spirituelle recherchés par les êtres humains.

Une autre contradiction apparaît dans la théorie du biologiste lorsqu’il compare le manger et le boire. Il prend l’exemple de l’eau que l’individu absorbe pour étancher sa soif, et une fois ce besoin assouvi il lui est difficile, pour ne pas dire désagréable, de boire un second verre. Il oppose à cela la nourriture en faisant valoir que, même rassasié, celui-ci appréciera un gâteau savoureux en fin de repas. Mais, n’en est-il pas de même si après un verre d’eau on propose à une personne un verre de vin ou un apéritif ? Elle ne le refusera pas plus qu’un gâteau en fin de repas car si la faim et la soif demandent d’abord d’être satisfaites pour les raisons biologiques que l’on connaît, elles sont également source de plaisir qui ravissent le palais au-delà du besoin.

Cela signifie qu’aussi bien la recherche du plaisir et du retour à l’équilibre (l’exostasie et l’endostasie) se retrouvent dans les quatre fonctions essentielles de l’organisme humain que sont le boire et le manger, le dormir et l’acte sexuel.

Or Reich a souligné le fait que la sexualité avait été largement réprimée depuis l’avènement de la civilisation judéo-chrétienne. Il serait trop long ici d’exposer les causes de cette répression mais elle n’est plus mise en doute. Même si, de nos jours, tout du moins dans les sociétés occidentales, la sexualité peut s’exprimer librement, cette coercition millénaire a laissé d’importantes séquelles chez l’homme qui a dû, et doit sans doute encore, compenser cette frustration dans d’autres domaines. Reich avait d’ailleurs prévu que, même libéré des carcans de la sexualité, l’humanité mettrait du temps à retrouver sa puissance orgastique d’origine :

Ta dégénérescence biologique sous forme de rigidité ne dure que depuis six mille ans. Il faudra attendre cent ou cinq cents ou peut-être cinq mille ans pour que tu redécouvres ta propre nature, c’est-à-dire la méduse en toi.[iii]

De nos jours, on pense avoir réglé le problème de la sexualité. Mais l’humain peut-il retrouver aussi rapidement sa vraie nature (sexuelle) après tant de siècles de coercition ? Si Reich a su parfaitement définir le processus de l’orgasme et son rôle au sein de l’organisme, il n’est pas sûr pour autant que ce terme soit bien compris ! Il est bien souvent galvaudé et confondu avec la jouissance qui n’est pas l’orgasme proprement dit, même si elle y participe. On peut jouir au cours de relations sexuelles sans pour autant avoir un orgasme tel que Reich le définit :

(Comme) le point où l’excitation change de direction. Concentrée d’abord vers les organes génitaux, elle se tourne vers la direction opposée, c’est-à-dire vers le corps tout entier, engendrant une perte de conscience, des contractions involontaires de l’organisme et la complète décharge de l’excitation.[iv]

Et de conclure :

L’expérience clinique montre que l’homme – par suite du refoulement sexuel général – a perdu la faculté de l’abandon involontaire végétatif ultime. Ce que j’entends par « puissance orgastique » est précisément cette partie ultime, non reconnue jusqu’ici, de la capacité d’excitation et de libération de la tension.[v]

Cette idée se confirme lorsque l’on songe à la différence qui existe, chez l’homme, entre éjaculation et orgasme, deux mécanismes qui peuvent être dissociés l’un de l’autre. En effet, si elle apporte une certaine jouissance, l’éjaculation ne conduit pas nécessairement aux contractions involontaires de l’organisme, à la perte de conscience et à la complète décharge de l’excitation comme formulé par Reich. Dans certains cas, ces manifestations sont moindres voire presque inexistantes et conduisent, selon lui, au déséquilibre de l’organisme. Il ajoute, de surcroît, un facteur non négligeable, cette fois d’ordre psychoaffectif, qui montre que la puissance orgastique est également dépendante de l’amour que les partenaires éprouvent l’un pour l’autre :

En l’absence d’inhibition, l’orgasme est plus intense chez les deux sexes si les sommets de l’excitation génitale coïncident. Cela arrive fréquemment chez des individus capables de concentrer sur un partenaire leurs sentiments tendres en même temps que leurs sentiments sensuels.[vi]

Cette remarque importante et pleine de bon sens démontre que la puissance orgastique est d’autant plus favorisée que les partenaires ont des sentiments mutuels réciproques. Inversement on peut affirmer qu’une relation sexuelle dépourvue d’amour ne débouche pas nécessairement sur l’orgasme tel qu’il est décrit par Reich. Ce qui veut dire que deux causes peuvent être imputées à l’impuissance orgastique : la première étant la stase sexuelle due à l’inhibition chronique des pulsions génitales, la seconde étant liée à une carence des sentiments éprouvés pour le partenaire. Lorsque cette faiblesse des sentiments est réciproque, il va de soi que cela contribue encore plus à une forme d’impuissance orgastique liée à une défaillance des sentiments au sein du couple dont l’éjaculation précoce chez l’homme est sans doute une des conséquences les plus fréquentes. Au-delà des troubles de la stase sexuelle, l’impuissance orgastique va de pair, dans bien des cas, avec l’incapacité à éprouver dans une relation autre chose que du désir sexuel. Si l’on tient compte de ces deux paramètres, bien des individus sont concernés par ce problème et non seulement une minorité comme on aurait tendance à le croire.

Après avoir décrit ces deux types, Piazza montre à quel point l’homme, par sa quête désormais artificielle du plaisir, en vient à transformer le monde en une sorte de Luna Park géant dont on peut mesurer maintenant les conséquences funestes qu’il a sur lui et son environnement.

La raison de cette prolifération d’activités inutiles mais plaisantes est à rechercher dans l’explosion des capacités cognitives de l’homme, il y a cinquante mille ans. C’est à partir de ce moment que nous avons appris à détourner les systèmes exostatiques et endostatiques de leur fonction primaire et à les activer artificiellement pour en retirer la sensation qu’ils procurent. C’est peut-être là que réside l’une des plus grosses différences entre les humains et les autres êtres vivants : dans la faculté de conceptualiser le plaisir et le bonheur. Ces deux sensations générées à l’origine par les systèmes biologiques afin de nous faciliter la survie, acquièrent une dimension propre, une fois détachées de leur but originel. Nous commençons à les rechercher pour elles-mêmes, et nous découvrons progressivement des activités qui permettent de les obtenir indépendamment de leurs fonctions initiales. Paradoxalement, l’un des principaux signes extérieurs de la révolution cognitive, de l’explosion de notre intelligence, est l’extrême futilité de notre espèce.

Dégagé des impératifs de survie, l’homme aurait donc utilisé son intelligence à des fins futiles selon les conclusions de Piazza. On peut se poser la question de savoir pourquoi l’humanité en est arrivée là. Disons tout d’abord que le plaisir, tant qu’il reste en phase avec les besoins naturels, n’est pas futile puisqu’il possède une fonction biologique équilibrante qui permet à l’homme de vivre dans de bonnes conditions. Il en est de même pour les aspirations telles que la connaissance aussi bien concrète qu’abstraite ainsi que les créations de la matière et de l’esprit qui favorisent l’épanouissement de l’homme. Les plaisirs que Piazza qualifie de futiles sont plus discutables puisqu’ils sortent du champ des besoins biologiques et spirituels ayant pour but de maintenir l’homme dans un état de bien-être. Ils sont en quelque sorte le fruit d’aspirations primaires n’ayant pas été satisfaites et qui ont dû trouver à se réaliser par des voies détournées. La psychanalyse a très bien exposé ce mécanisme qui transforme les pulsions primaires non assouvies en pulsions secondaires sous l’effet d’une contrainte névrotique. Piazza montre donc sous l’angle biologique que les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Il se peut qu’une rupture majeure se soit produite à un certain moment de l’histoire humaine. Peut-être, comme l’avait théorisé Reich, est-elle survenue avec l’avènement du patriarcat qui a mis à mal les relations sexuelles – et par voie de conséquence affectives – entre hommes et femmes en raison de la répression qui en a découlé. Avant cela les sociétés vivaient selon le principe du matriarcat régi par une sexualité sans tabous (seul l’inceste n’était pas admis), par la filiation maternelle et la propriété collective. Les enfants que la femme mettait au monde étaient élevés par le frère de celle-ci et non par leur géniteur. L’homme n’avait donc pas le pouvoir qu’il aura par la suite dans la sphère du foyer. Il était un simple compagnon de jeux pour les enfants. Mais à partir du moment où il s’est rendu compte que la femme n’est pas seule détentrice du pouvoir de procréation mais qu’il y participe également, et qu’un lien de paternité peut être établi entre lui et les enfants qu’elle met au monde, il s’est sans doute efforcé de faire passer la société du stade matriarcal au stade patriarcal, tout d’abord en restreignant la liberté sexuelle au sein de la famille pour s’assurer qu’il est bien le père des enfants. C’est aussi sans doute à cette période que le mariage a été inauguré, avec comme conséquence pour la femme l’interdiction des relations sexuelles extraconjugales. Et l’établissement de la filiation paternelle eut comme conséquence directe l’avènement de la propriété privée. Ces principes ont constitué les quatre piliers du patriarcat. C’est ainsi que les humains sont passés de l’état de nature à l’état de culture.

 Par la suite, avec l’avènement de la religion judéo-chrétienne, ces valeurs se sont renforcées au point que la sexualité est devenue une activité diabolisée sauf à l’intérieur du mariage et dans un but purement reproducteur alors même qu’elle est une fonction naturelle, source de plaisir et d’équilibre pour l’organisme et le psychisme humain. Cette répression sexuelle a sans doute contribué largement à ce que Reich a appelé l’impuissance orgastique devenue progressivement de plus en plus prégnante dans les sociétés de type patriarcal dominées par le dogme religieux. Il a donc fallu compenser ce manque par d’autres plaisirs, en l’occurrence des plaisirs artificiels tels que ceux décrits par Piazza qui se sont peu à peu multipliés avec l’évolution des technologies. C’est ainsi qu’on en est arrivé à échanger des plaisirs naturels contre des plaisirs artificiels qui, pour une grande part, ont contribué, de surcroît, à polluer notre planète. Il me semble que si l’homme était en mesure d’assouvir pleinement ses besoins biologiques et affectifs, non seulement il retrouverait l’équilibre qu’il a perdu mais il se détournerait plus facilement des plaisirs artificiels qu’il a dû créer de toute pièce pour pallier certains manques.

On en est donc arrivés au point où l’homme souffre d’insatisfaction chronique qu’il tente de compenser par des plaisirs toujours plus artificiels sans véritablement y trouver son compte.

Si Piazza reconnaît les plaisirs artificiels conçus par l’humanité comme le reflet de son extrême futilité, il n’explique cependant pas la cause de tout cela, et cette révolution cognitive qui s’accompagne de l’explosion de notre intelligence peut sembler dérisoire lorsque l’on constate qu’elle n’a servi que des objectifs plus ou moins frivoles.

Le biologiste met également en avant l’idée que l’homme est fasciné par la puissance, une des raisons sans doute pour lesquelles il a développé l’ensemble des moyens technologiques pour atteindre cet objectif. Prenant l’exemple parmi tant d’autres de l’automobile et des moteurs construits à cette fin, il relève que la plupart sont très consommateurs d’énergie alors qu’ils ont en réalité un rendement très faible. La tendance exostatique de notre société serait, selon lui, la cause de ce gaspillage énergétique :

Notre société est largement basée sur des technologies mécaniques qui génèrent beaucoup de puissance, mais dont le rendement (la part réellement utilisée pour fournir un travail) est très faible. Par exemple celui d’une voiture propulsée par un moteur à combustion est de 16%. En effet, pour obtenir de l’essence on utilise du pétrole, par un processus de raffinage qui a un rendement de 80%. Puis, l’essence est brûlée par le moteur avec un rendement de 35% mais seulement 60% de l’énergie produite arrive aux roues. C’est en additionnant toutes ces pertes d’énergie que l’on arrive à un rendement final de 16%. En d’autres termes 84% de l’énergie utilisée par un véhicule pour aller d’un point A à un point B est perdue. Inverser ce rapport permettrait de diviser par quatre la consommation d’énergie et la pollution. Est-ce impossible ? Non, puisque nous savons construire des moteurs électriques avec un rendement de 95%. Mais ce sujet n’a jamais fait partie du cahier des charges de nos développeurs technologiques guidés plutôt par un amour exostatique de la puissance. [vii]

Ce désir de puissance partout présent chez l’homme dans toutes les sphères de son existence ne serait-il pas in fine le résultat de son impuissance orgastique et émotionnelle qu’il a cherchée à compenser par la technologie, ce qui a eu, dans certains domaines, un résultat négatif aussi bien sur la société que sur l’environnement ? Cette course à la puissance se retrouve d’ailleurs à tous les échelons de la société : l’économie avec le classement des pays en fonction de leur PIB, l’éducation avec le palmarès des lycées, des universités et des écoles supérieures les mieux notées, et il en est de même pour la médecine, l’armée, les individus, etc. On ne juge un pays qu’à l’aune de sa puissance économique, financière, militaire. Même le bonheur qui n’est pas un bien matériel est calculé en fonction des revenus par habitant et des prestations dont il peut bénéficier. Certes il faut un certain degré de bien-être matériel pour être en mesure d’apprécier les joies de l’existence. Mais, comme le souligne Piazza, tous ces plaisirs artificiels inventés par l’homme sont bien souvent de piètres compensations qui n’apportent que l’illusion du bonheur.

Les conceptions de Bohler

Spécialiste lui aussi des neurosciences, il en arrive à de semblables conclusions lorsqu’il développe sa théorie fondée sur le cerveau qui commande toutes les activités humaines. Selon lui, certaines structures cérébrales cohabitent entre elles sans toutefois communiquer de manière adéquate, ce qui a des répercussions pour le moins négatives sur l’homme et son environnement. On observe d’une part le cortex cérébral, partie toute plissée et très développée au fil de l’évolution de l’espèce depuis homo sapiens (deux cent mille ans) qui nous a donné la capacité d’abstraction, de concevoir des outils, de planifier des actions. Il nous a donné le langage, l’intelligence, la faculté de comprendre et de créer.

Si on revient aux étapes plus antérieures de la vie, vers l’homo erectus (2 millions d’années), on s’aperçoit qu’il existe au centre du cerveau un organe beaucoup plus ancien qui a probablement trois cent millions d’années – on peut l’observer notamment chez des animaux fossiles comme la lamproie – nommé le striatum. Outre d’autres fonctions telles que la motricité involontaire ou automatique, la nociception ou la cicatrisation, il est impliqué dans les comportements appétitifs ou aversifs, en particulier dans la motivation alimentaire ou sexuelle (striatum ventral). Instrument de survie au service de l’homme, il est en quelque sorte le siège des instincts qui le poussent à agir pour satisfaire ses besoins et ses désirs primordiaux. A chaque fois qu’il parvient à assouvir ses appétits, une molécule, la dopamine, se déclenche aussitôt et provoque la sensation de plaisir activant ainsi un système de récompense indispensable à la survie de l’individu.  Plus généralement, elle joue un rôle dans la motivation et la prise de risque chez tous les mammifères et donc l’humain. Il faut néanmoins souligner que cette molécule est également impliquée dans certains plaisirs abstraits comme la musique, et d’autres plaisirs du même type.

 Le striatum, comme l’explique Bohler, a donc permis à l’homme de survivre durant toute la période précédant l’évolution du cortex et de subvenir à ses besoins essentiels dont il énumère la liste[viii] :

  • Manger pour survivre à court terme.
  • Se reproduire pour assurer la survie de l’espèce
  • Acquérir du pouvoir et du statut social dans un groupe afin d’accroître les chances d’accès à la nourriture et à des partenaires sexuels
  • Limiter ses efforts, règle de tous les organismes vivants depuis les origines de la vie
  • Trouver de l’information pour survivre dans un milieu naturel.

 Ces cinq grands comportements sont récompensés par la dopamine depuis la nuit des temps, conclut-il.

D’un côté le striatum, notre cerveau primitif, qui n’a pas été programmé pour se limiter, et de l’autre le cortex qui nous a permis, grâce aux progrès de la technologie, d’assurer notre survie au point que nous pouvons satisfaire nos besoins sans effort et autant que nous le désirons. Face à ce monde pléthorique alimentaire nous avons le réflexe de continuer à manger même lorsque nous n’avons plus faim afin de ressentir les effets agréables de la dopamine qui nous récompense à chaque fois que nous satisfaisons l’un des cinq besoins essentiels. Et il ajoute que l’homme moderne doit donc résister à cette impulsion qui n’a plus de raison d’être bien qu’elle n’ait pas changé depuis des millions d’années.

Selon lui, le cortex et le striatum constituent deux éléments opposés du cerveau qui ne communiquent pas entre eux et engendrent la contradiction dans les comportements humains. Il cite notamment les dangers du réchauffement climatiques qui pèsent de plus en plus sur l’humanité et risquent à plus ou moins brève échéance de détruire la planète si nous continuons à nous soumettre à l’appétit sans fin de notre striatum. Bohler souligne à cet effet que notre cortex a été en mesure de bâtir une technologie nous garantissant confort et loisirs à tout point de vue comme notre striatum l’exige, mais nous en sommes devenus tellement dépendants que, malgré la menace qui nous guette, nous continuons à faire comme si de rien n’était. Selon le chercheur en neurosciences le striatum serait donc plus fort que le cortex. Signalons encore une fois que ce rapport de force a également été observé avec les outils de la psychanalyse quand elle a décrit l’antagonisme qui existe entre les pulsions instinctuelles (le Ça en termes freudien) que l’on peut relier au striatum, et la conscience, auquel le Surmoi est inclus, équivalent du cortex. Or, il apparaît que ce rapport de force est très variable selon les individus. Si d’aucuns sont en mesure de réprimer certaines pulsions jugées indésirables au regard de la morale ou de la conscience (équivalent du Surmoi et du moi en termes freudiens), d’autres laissent plus facilement libre cours à leurs pulsions ou ne bénéficient pas d’un Surmoi suffisamment fort pour les endiguer ou, tout du moins, les détourner vers une voie plus constructive.

Bohler semble considérer que l’homme n’a pratiquement pas évolué depuis l’époque de l’homo erectus dont le cerveau, dit-il, n’était pas encore doté du cortex cérébral si bien que seul le striatum gouvernait ses actes. Cependant, certains comportements décrits pour survivre dans un milieu hostile demandent très certainement d’avoir une intelligence, une capacité de réflexion qui n’est pas du ressort du striatum tel qu’il le dépeint mais du cortex cérébral dont l’homme était déjà sûrement doté au moins à l’état embryonnaire, et qui s’est développé au fil de l’évolution humaine. Qu’il n’existe pas de communication entre ces deux parties du cerveau semble difficilement concevable. En effet, si certains individus sont essentiellement gouvernés par leur striatum, d’autres sont suffisamment évolués pour faire intervenir leur cortex qui leur dicte des choix plus responsables. Il faut insister sur le fait que les individus ne sont pas égaux, y compris dans ce domaine, et que si certains sont en mesure de refréner ou de sublimer leurs instincts, d’autres – ils sont certainement plus nombreux – en sont moins capables et n’en voient pas la nécessité. Si, de surcroît, on ajoute à ce facteur les conceptions reichiennes selon lesquelles l’impuissance orgastique engendre le phénomène des pulsions secondaires, on comprend dès lors que bien des hommes trouvent dans la consommation matérielle et dans la recherche de plaisirs toujours plus effrénés des dérivatifs à leur impuissance biologique. Si, dans certains cas, la sublimation telle qu’elle a été définie par la psychanalyse, est un moyen de pallier le déferlement des instincts, elle ne s’applique néanmoins qu’à certains d’individus. Tout le monde n’a pas le pouvoir de se forger un idéal du moi capable de résister aux puissances du ça !

Si cette instance, telle qu’elle a été décrite par Freud – elle ressemble à s’y méprendre au striatum des biologistes – existe en chaque individu, sa force est toutefois relative et l’on peut en inférer qu’il en est de même pour le cortex, qu’il a plus de poids et donc plus d’emprise sur certains cerveaux que sur d’autres. Les quatre instances psychiques découvertes par Freud sont en réalité le pendant de certaines régions du cerveau mises en lumière depuis quelques temps par les neurosciences. On peut donc en inférer qu’il existe une interpénétration de la matière et de l’esprit ou, tout du moins, que l’esprit figure le prolongement, la face inversée de la matière comme le souligne Piazza alors qu’on croyait l’une entièrement dissociée de l’autre ! Il n’empêche que les mécanismes biologiques ont de sérieux points communs avec les mécanismes psychiques instaurés par la psychanalyse. Si bien qu’il ne faudrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain mais considérer plutôt ces deux disciplines comme complémentaires. La biologie pourrait donc s’appuyer sur les découvertes de la psychanalyse pour comprendre les différentes structures du cerveau et comment elles s’organisent, cohabitent et se répartissent en son sein, et vice et versa.

Une autre analogie apparaît également dans la relation que Bohler établit entre le cortex et le striatum. D’après les études qui ont été réalisées sur le cerveau, il semble que le cortex ne soit pas relié au striatum et que chacune des deux parties travaille sans se concerter, qu’ils sont comme les deux faces opposées d’une pièce, Cette contradiction rappelle à bien des égards la notion de clivage établie par Freud qui consiste en la coexistence au sein de la psyché, au sein du moi, de deux attitudes à l’égard de la réalité extérieure.

Selon la définition de Laplanche et Pontalis, le propre du clivage est de séparer un objet unitaire en deux moitiés qui auront alors des destins relativement indépendants et resteront côte à côte sans s’influencer réciproquement,

… une manière de faire coexister deux procédés de défense : l’un, le déni, est tourné vers la réalité pendant que l’autre est tourné vers la pulsion.

 Cette dissociation s’exerce précisément entre le pulsionnel et la conscience comme entre le striatum et le cortex, selon les théories neuroscientifiques.

Cette mise en perspective peut sans doute mieux expliquer pourquoi l’homme est en contradiction avec ses aspirations profondes et pourquoi il continue à polluer la planète alors qu’il sait qu’en faisant cela il court à plus ou moins brève échéance à sa perte.  Il existe par conséquent chez lui un déni de réalité comme si, à l’image du striatum et du cortex décrit par Bohler, ses désirs et sa conscience ne pouvaient communiquer entre eux et que les pulsions finissaient par triompher de tout. La psychanalyse avait donc déjà donc posé à sa manière ce problème sinon qu’elle l’avait localisé dans la sphère psychique et non dans la sphère biologique.

De même que Piazza a évoqué dans son ouvrage tous les plaisirs artificiels que l’homme a inventé pour satisfaire ses désirs les plus futiles, de même Bohler a décrit notre société actuelle fondée sur l’hyperconsommation et une fin de non-retour si l’homme ne prend pas la mesure de la catastrophe qu’il prépare et continue d’être mené par les effets pernicieux de son striatum. Aussi bien les analyses de Piazza que de Bohler sont pleines de bon sens sinon qu’elles ignorent la cause de l’incapacité que l’homme a de transformer ce modèle délétère en un modèle plus sain, et en adéquation avec son environnement.

La réponse a été donnée par la psychanalyse qui a depuis longtemps considéré que les êtres humains, dans leur grande majorité, étaient atteints de névrose. Reich a très bien su donner un nom à ce fléau qui a envahi une grande partie de l’humanité : la répression sexuelle et son corollaire l’impuissance orgastique et émotionnelle, l’une des causes majeures qui a fait de la société ce qu’elle est.

Lorsque le psychanalyste a écrit sa théorie sur la fonction de l’orgasme, il est vrai que la sexualité restait terriblement taboue et il a contribué à libérer notre société de la répression sexuelle. Mais il a relativement peu parlé de l’amour qui est indissociable de la sexualité, tout du moins lorsque l’individu recherche une relation épanouissante et non seulement la simple décharge de sa libido. Il a néanmoins signalé le fait – loin d’être négligeable – qu’au cours des rapports sexuels les partenaires atteignent d’autant mieux l’orgasme qu’ils éprouvent des sentiments intenses l’un pour l’autre. Je crois que ce paramètre mérite d’être pointé et peut expliquer, dans une certaine mesure, l’état actuel du monde.

Reich a mis l’accent sur la sexualité à l’époque où il a rédigé sa Fonction de l’orgasme et ses écrits ont largement favorisé la libération sexuelle des années 1960-70, ce qui fut certainement un grand pas en avant pour la société. Cependant, si auparavant l’amour était glorifié au détriment du sexe, en revanche les générations suivantes ont glorifié le sexe au détriment de l’amour. On se souvient des slogans de mai 1968 qui prônaient de « jouir sans entrave », etc. Si bien que ces deux expressions qui doivent être soudées pour qu’une relation harmonieuse se développe au sein d’un couple, se retrouvent fréquemment dissociées dans la réalité. Un renversement s’est alors produit favorisant l’une de ces fonctions au détriment de l’autre.  Le sexe ne suffit pas à garantir l’équilibre des couples qui se forment désormais aussi rapidement qu’ils se défont. Pour reprendre la terminologie des neurosciences, notre striatum s’est libéré des contraintes du passé et peut désormais laisser libre court à ses désirs sans toujours tenir compte de ses aspirations émotionnelles. Si, dans les premiers temps, les sentiments ne sont pas au rendez-vous mais les sens satisfaits, une relation peut néanmoins s’établir ne serait-ce que parce qu’elle apporte ce que le striatum recherche. Elle peut même devenir sérieuse mais finir néanmoins par s’étioler au bout d’un certain temps lorsque l’amour est défaillant et, du coup, celui ou celle qui était si désirable dans les premiers instants, perd peu à peu de son attrait. S’ensuit alors une baisse progressive de la libido qui plonge le couple dans un marasme affectif plus ou moins grave. Comme l’a si bien montré Bohler, notre striatum, avide de plaisir, l’emporte largement, la plupart du temps sur notre cortex qui ne dispose pas de toutes les informations permettant de juger du bien-fondé de ce lien, et il suffit bien souvent que le striatum soit satisfait pour que le lien se prolonge.

Ce type de relation est assez fréquent et finit par poser à plus ou moins brève échéance une forme d’impuissance orgastique, non pas celle quasi permanente généralement attribuée au sujet névrosé mais celle qui survient occasionnellement après une dispute, une déception susceptible de perturber la libido et mettre à mal l’union. Le striatum n’étant plus récompensé par la dopamine, le risque est grand de voir alors le couple se disloquer. Il s’ensuit que toute union fondée sur un déficit de sentiments, en dépit d’affinités sexuelles, peut, à la longue, connaître des troubles chroniques de l’orgasme ce qui mettra tôt ou tard en évidence des aspects qui n’avaient pas été pris en compte au début de la relation.

Dans l’un de ses ouvrages[ix], Eva Illouz évoque le casual sex, devenu sur certains sites, un mode de rencontre très recherché au sein des générations actuelles. Parmi de nombreux témoignages, elle cite le cas d’un homme qui lui a rapporté ses ébats sexuels sous ecstasy avec deux autres femmes lors d’une rencontre en discothèque. Ce cas illustre bien cette fois les plaisirs artificiels tels qu’ils sont décrits par Piazza.

Les troubles de l’affectivité et de la sexualité constituent donc, à mon sens, une des causes de la fuite de l’humanité vers des plaisirs matérialistes superficiels tels qu’ils sont décrits par Piazza et Bohler. Aussi bien le striatum que le système limbique de l’homme aspirent avant tout à des plaisirs biologiques, naturels et spirituels à l’image de ce qu’il est. La sexualité et l’amour comblent ces aspirations qui unissent deux êtres si tant est, bien sûr, qu’aucune barrière ne fasse obstacle à cette quête. Il se trouve que de nombreux freins empêchent bien souvent ce rêve de se réaliser pleinement si bien qu’il croit pouvoir trouver dans les plaisirs artificiels ce qu’il n’a pas véritablement obtenu par les voies naturelles.

[i]Pier-Vincenzo Piazza. Comment la biologie explique la nature humaine, Albin Michel 2019

[ii] La fonction de l’orgasme, Wilhelm Reich, L’arche 1986.

[iii] Wilhelm Reich, Ecoute, petit homme ! Payot 1974.

[iv] Wilhelm Reich, La fonction de l’orgasme, L’Arche 1986.

[v] Ibidem.

[vi] Ibidem.

[vii] Homo biologicus, Pier Vincenzo Piazza, Albin Michel 2019.

[viii] Sébastien Bohler, Le bug humain, Robert Laffont 2019.

[ix] La fin de l’amour, Seuil 2019.

 

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