Les présocratiques ont tenté de comprendre le monde (ses origines) en l’observant sans renoncer à leurs dieux et à leurs mythes et, par conséquent, à leur morale. Les Lumières ont repris l’idée d’essayer d’expliquer le monde en l’observant, mais en supprimant toute idée de transcendance, comme si les mythes et les religions n’étaient que des superstitions à supprimer, ce qui a déclenché une guerre contre toutes les institutions et idées religieuses, guerre qui perdure encore aujourd’hui.
La suppression de toutes les idées et de tous les sentiments de transcendance laisse l’homme nu dans l’immensité du temps et de l’espace, nous réduisant à un néant dépourvu de sens.
La modernité a fixé un nouvel objectif à l’humanité : le Progrès. Un progrès technique et scientifique illimité pour dominer la nature, un progrès qui, quel que soit son degré d’avancement, ne sera jamais en mesure de dominer la nature. Une idéologie – celle du Progrès – qui confond la raison instrumentale (l’usage de la raison pour atteindre certains objectifs) avec la Raison ontologique (celle qui donne un sens à notre vie). Cette confusion donne naissance à une prétendue supériorité morale de la Modernité dont nous n’avons pas encore pu nous détacher, qui justifie toutes sortes d’actes dès lors qu’ils apparaissent revêtus des termes « progrès et raison ».
Malheureusement, l’idéologie du progrès n’a pas réussi à générer un sens moral dans notre société, à donner un sens à nos vies, ni à supprimer la violence et les guerres.
Toute morale qui ne transcende pas l’individu et ne recherche que l’intérêt personnel n’est pas une vraie morale, c’est un simulacre d’autojustification pour apaiser la conscience.
Pourquoi penser l’évolution de l’humanité en termes de progrès et non d’adaptation ? L’histoire et les événements récents (dont beaucoup sont aléatoires et indépendants de notre volonté) nous montrent l’immense fragilité de l’espèce humaine. Notre capacité scientifique et technologique est une arme à double tranchant. De plus en plus, nos capacités peuvent servir à nous autodétruire ou à nous sauver. Pourquoi ne pas considérer notre capacité à améliorer nos connaissances techniques et scientifiques non pas comme un but en soi, mais comme un moyen d’améliorer notre capacité à survivre et à nous adapter à un monde dangereux et changeant ?
Pourquoi ne pas se fixer des objectifs qui nous dépassent à chacun d’entre nous ? Pourquoi ne pas considérer la survie de l’espèce comme un objectif transcendant, qui donnerait un sens à notre vie ? Même si je meurs, si les gens que j’aime meurent, la vie et l’espèce survivront. Cela peut donner un sens à notre vie.
Javier Diaz, 25 11 2023