Joël Bernat : « Du jeu aux en-jeux »

« Regarde ce spectacle : moi, l’ami de Zeus,

moi qui l’aidai à asseoir sa puissance, vois

sous quelles douleurs il me ploie aujourd’hui…

spectacle funeste au renom de Zeus… »

Eschyle, Prométhée enchaîné.

 

Introduction

Dans un premier temps, afin de cadrer mon propos, je souhaite poser trois éléments :

 1er point – Si l’on se livre à une spéculation, l’on pourrait aisément soutenir que la vie psychique est toute entière, et dès le départ, mise en tension par l’altérité. La psyché y serait aux prises sur deux versants :

            interne : en effet, des excitations physiologiques (besoins, affects, désirs, etc.) viennent sans cesse perturber un équilibre interne, une certaine homéostasie psychique[i] ;

            externe : du monde extérieur ne cessent de venir des stimulations (événements, relations aux autres, etc.) qui, eux aussi, perturbent cette homéostasie.

Ceci est un modèle neurologique de base, que Freud a toujours conservé au point de plusieurs fois rappeler que la fonction première de la psyché est de lutter contre tout ce qui vient l’exciter[ii] (stimuli externes et internes), c’est-à-dire contre ce qui est source de tension, donc de déplaisir. L’excitation implique un travail psychique d’élaboration afin d’intégrer ces éléments – ou bien de les repousser. Mais pour ce qui en est de l’altérité, ce travail sera permanent, non seulement parce que celle-ci se présente sous diverses formes et sans cesse, mais aussi parce que, apparemment, il semble difficile pour un sujet de co-exister avec tout ce qui fait : différence.[iii] Et, finalement, aucune élaboration ne réduit l’altérité.

Une scène psychique particulière va apparaître peu à peu dans l’espace de la psyché, où, si l’on y prête attention, vont être mis au travail des fragments d’altérité afin de s’en accommoder en les intégrant, voire de construire des théories personnelles visant un « savoir y faire » avec eux. Cette scène particulière est celle du jeu, où l’action psychique de nomination donne sens, en une tentative de réduire ce que l’altérité vient exciter.

2ème point – Un des mécanismes principaux de la vie psychique, mécanisme inconscient, est celui de la projection, mécanisme par lequel la psyché expulse à l’extérieur quelque chose qu’elle ne peut ni reconnaître ni élaborer en elle. Or, l’ensemble des éléments projetés finissent par créer une vision-du-monde (Weltanschauung) propre à l’individu et à lui seul, une forme de mythologie personnelle et dynamique dans la mesure où elle va conditionner ses pensées et ses modes de perceptions.[iv] Cela fait, le plus souvent, du monde et des relations à l’autre une sorte de miroir dans lequel on ne rencontre que sa « réalité psychique »[v]. Alors, la saisie d’une différence vient rompre ce phénomène, ce qui parfois suscite angoisses et autres phénomènes d’inquiétant (Unheimliche). Car on n’est pas maître chez soi, d’où les projections afin de maîtriser ce monde mais qui du coup n’est plus interne ni vraiment « externe » ; et de là l’illusion qu’en maîtrisant l’autre – ou le monde – on maîtriserait son intérieur et son altérité interne.

 

3ème point – Une autre observation nous montre que les relations humaines sont majoritairement organisées selon un système « dominant-dominé ». Ce mode de relation n’est d’ailleurs pas spécifiquement humain, puisqu’il s’observe tout autant dans le règne animal. À cela s’opposerait un idéal relationnel, selon un système d’échanges égalitaires et réciproques entre alter-egos. Mais ce mode de fonctionnement reste un idéal, rarement rencontré, parfois décrit dans quelques utopies imaginant une civilisation « parfaite ».

Devons-nous pour autant en rester à une opposition du genre « nature-culture », la nature restant visiblement la plus forte par rapport à une exigence d’égalité le plus souvent morale ? Si tel est le cas, alors la question est réglée, et nous ne pouvons nous en remettre qu’à une hypothétique évolution de la civilisation, selon un lent processus, en accord avec les lois de Lamarck ou de Darwin.[vi]

Ou bien ne pourrions-nous pas envisager les choses sous un autre angle, en se dégageant de l’argument « nature » qui, il faut bien le reconnaître, est si pratique et peut être convoqué à tout moment pour toute chose afin, en fait, de ne plus penser une question ?

Un autre angle d’approche serait permis par la psychanalyse en ce qu’elle a montré, du moins à nos yeux, l’importance prédéterminante des années de l’enfance et du destin psychique qui en découle pour la vie de l’adulte. Nous allons tenter de faire rapidement une sorte d’historique de ce rapport de force entre les êtres.

En effet, ce type de rapport est connu très tôt dans la vie de l’humain dans la mesure où un bébé est inachevé à la naissance et donc réellement dépendant des adultes pour ses soins et sa subsistance. C’est une dépendance physique première qui a un destin psychique important. Ainsi, assez tôt dans la vie, l’enfant va tenter de s’accommoder aux rapports de force.

I : Le jeu

Pour ce faire, un des outils psychiques essentiels à sa disposition est celui de l’espace psychique du jeu.

Il nous faut rapidement définir ce que nous entendons par « jeu » afin de nous démarquer du regard adulte sur cette activité, regard qui la dévalorise et donc en refoule certains éléments. L’adulte a oublié son propre jeu d’enfant, et ne cesse d’oublier combien il continue à jouer ne serait-ce qu’à des jeux adultes.

Le jeu est un processus qui se développe dans un espace et un lieu très particulier dans la mesure où :

– il n’est pas vraiment dans une stricte intériorité psychique, puisque il produit une action externe : c’est un acte psychique et un acte moteur ;

– et il n’est pas non plus dans une pure extériorité, un dehors en tant que non-moi qui échapperait  au contrôle.

Il se déroule dans un espace intermédiaire, entre espaces internes et externes, entre réalités psychiques et externes, c’est-à-dire un espace tiers, où vont être mis en scènes pensées, affects, désirs, perceptions, mais aussi de véritables actions. Car c’est aussi un espace de manipulation d’objets externes réels, avec des effets internes, manipulation qui réclame répétitions à des fins d’assimilation mentale[vii]. En ce sens, jouer c’est faire – et se faire.

Mais à ce faire est lié l’expression de l’omnipotence, c’est-à-dire l’illusion de la toute-puissance magique de la pensée et de l’action, ce qui permet de transformer un bâton en épée ou en avion, mais « pour de vrai » ; le comme si est la formule-clef de cet espace spécifique que, pour ces raisons, l’on nomme « transitionnel ».

Ainsi, ce qui est mis en jeu, en scène – car l’on peut tout à fait comparer l’espace du jeu à l’espace théâtral – sont :

– des éléments de la réalité extérieure, réelle, aussi bien connus qu’incompris ou intrigants ;

– des éléments de la réalité interne, psychique, tels que les pulsions, fantasmes ou désirs[viii] ;

– et ces deux « ingrédients » vont être mêlés dans une forme d’état onirique : l’espace du jeu est une aire psychique d’illusion qui permet la libre transformation des objets et des phénomènes de la réalité externe selon les désirs et la réalité interne. Quant au processus du jeu, il se déroule comme un discours, par associations de pensées.

C’est une préoccupation interne qui impulse ce processus du jeu, préoccupation qui met l’enfant dans un état de concentration (la même que celle de l’adulte), d’où la difficulté pour lui à supporter intrusions et interruptions.

C’est en ce sens que Winnicott a pu dire que le jeu était un facteur de santé psychique car il est une forme d’auto-thérapie, outre le fait qu’il introduit progressivement aux relations de groupe et à la communication avec les autres. Car, en effet, si le jeu est une activité solitaire, il devient peu à peu une activité en relation à d’autres. En jouant avec un autre, ou plus, cela permet d’intégrer l’existence indépendante de l’autre, c’est-à-dire l’altérité, car le jeu est aussi un cadre qui permet l’inscription en soi des relations émotionnelles et donc des contacts sociaux.

Le jeu est donc une première activité de pensée, qui crée peu à peu le sentiment d’exister et cela selon deux extrêmes :

            soit le jeu réussit une scénarisation du monde interne et une représentation du monde externe, et devient une source de plaisir (grâce à la projection et la décharge des tensions internes et son résultat en représentations). Par exemple, le jeu permet l’expression de la colère, sa figuration, ce qui permet de l’élaborer ainsi que le rapport moi / non-moi. En effet, quand le processus du jeu réussit, les éléments mis en jeu vont recevoir une signification, c’est-à-dire qu’ils seront interprétés, ce qui par voie de conséquence produit une satisfaction et donc le sentiment d’être. Jouer nous rend vivant ;

            soit le jeu échoue du fait d’un déni de ce monde interne ou d’une impossibilité d’élaboration, ce qui produit un jeu compulsif, excité, qui est source d’angoisse voire de détresse.

C’est ce premier outil qui permet l’élaboration du rapport moi-monde et donc de l’altérité et du sentiment d’être. Mais aussi de ne plus être soumis à l’événement grâce à l’élaboration et ses représentations. Pour exemple[ix] :

un enfant de 18 mois avait l’habitude de jeter des objets en prononçant « o-o-o-o », ce qui, d’après la mère, signifiait « Fort » (loin). Je me suis finalement aperçu que c’était là un jeu et que l’enfant n’utilisait ses jouets que pour « les jeter au loin ». Un jour je fis une observation qui confirma ma manière de voir. L’enfant avait une bobine de bois, entourée d’une ficelle. Pas une seule fois l’idée ne lui était venue de traîner cette bobine derrière lui, c’est-à-dire de jouer avec elle à la voiture ; mais tout en maintenant le fil, il lançait la bobine avec beaucoup d’adresse par-dessus le bord de son lit entouré d’un rideau, où elle disparaissait. Il prononçait alors son invariable o-o-o-o, retirait la bobine du lit et la saluait cette fois par un joyeux « Da ! » (« Voilà ! »). Tel était le jeu complet, comportant une disparition et une réapparition, mais dont on ne voyait généralement que le premier acte, lequel était répété inlassablement, bien qu’il fût évident que c’est le deuxième acte qui procurait à l’enfant le plus de plaisir[x]. (…)

L’interprétation du jeu fut alors facile. Le grand effort que l’enfant s’imposait avait la signification d’un renoncement à un penchant (à la satisfaction d’un penchant) et lui permettait de supporter sans protestation le départ et l’absence de la mère. L’enfant se dédommageait pour ainsi dire de ce départ et de cette absence, en reproduisant, avec les objets qu’il avait sous la main, la scène de la disparition et de la réapparition.

 Le jeu est aussi une source d’enrichissement car au fur et à mesure que le jeu élabore, cela permet d’intégrer des choses nouvelles, ce qui augmente en retour la capacité de percevoir et d’accueillir la richesse du monde externe, qui, par voie de conséquence, développe et enrichi la créativité. Et les destins psychiques du jeu sont nombreux, entre autres : fantaisie et rêverie, éléments composants de la créativité[xi], mais aussi la capacité de penser et grâce au jeu interne avec les représentations, etc.

C’est seulement en étant créatif que l’individu se découvre et se pose sur la base d’une équation : je joue, je crée, donc je suis (du fait de la mise en actes) … Winnicott définit ainsi la créativité : elle « donne à l’individu le sentiment que la vie vaut la peine d’être vécue ». Ce qui s’y oppose « c’est une relation de complaisance soumise envers la réalité externe : le monde et tous ses éléments sont alors reconnus mais seulement comme étant ce à quoi il faut s’ajuster et s’adapter. La soumission entraîne chez l’individu un sentiment de futilité, associé à l’idée que rien n’a d’importance. »[xii] Sans cet espace tiers et transitionnel du jeu, nous sommes sans défenses face au monde et pris dans des rapports duels. Duel, ici, aussi bien dans le sens de deux (moi ou l’autre, moi ou le monde, etc.) qu’en celui de la confrontation.

Play et Game

Une précision : le jeu dont nous parlons ici est celui que les Anglais nomment play, jeu qui est ouvert, car tout peut y surgir (par exemple le pulsionnel) par opposition au game qui est fermé, donc plus rassurant (ce que préfèrent les adultes). Si le play répond à l’angoisse suscitée par la rencontre de l’autre, le non familier (Unheimliche), le game quant à lui répond à des règles (culturelles, morales, etc.) : il est cadré et orienté et surtout en lien à l’autre. L’on peut dire que les relations sociales sont en partie un game dans la mesure où elles sont cadrées par des codes. Notons que le play est premier et qu’il reçoit ensuite ce cadre du game (jeu partagé) qui ouvre à l’autre et à l’expérience culturelle.

L’artiste offre en fait un game où le play est possible pour le spectateur ou le lecteur, car c’est de cela qu’ils tirent leur plaisir. Tout l’art de l’artiste serait de ne faire sentir que le play et de ne rien faire sentir de l’échafaudage du game (les règles techniques de l’écriture, comme celle des trois unités de la tragédie par exemple). Mais comme on le voit, ce sont les règles du game qui permettent au play d’être adressé, partagé, transmis à d’autres.

II : Les enjeux relationnels

Lorsque le jeu a échoué dans son processus d’élaboration d’une question ou d’une problématique, il se produit une fixation et une sorte de compulsion de répétition. Mais dès lors, le jeu tourne « à vide », n’étant plus que répétition. Ces éléments fixés font retour (toujours dans le but de recevoir une élaboration) dans les fantasmes par exemple, et sont transférés sur d’autres personnages et d’autres éléments. Le fantasme est une sorte de théâtre interne qui est souvent reprojeté dans le monde externe qui est du coup transformé en réalité psychique, venant organiser la relation à l’autre, où cet autre est pensé et vécu comme protagoniste de la scène interne et non comme autre. Par exemple, le loup peut être projeté sur l’instituteur, ce qui lui attribuera par projection et transfert un pouvoir terrifiant. Puis au gendarme, au professeur, au psy, etc.

Les fantasmes vont conditionner les relations et les transformer en un espace où l’élaboration ratée va faire répétition. Ces fixations deviennent peu à peu identitaires, des théories de soi ou de l’être. Ainsi, là où l’on croit gérer la situation, nous sommes le plus souvent gérés par les fantasmes !

Cela fait qu’il y aura des enjeux dans les « jeux » relationnels. Nous allons essayer d’en aborder quelques conséquences dans le champ de l’interpsychique.

Toute relation est une sorte de creuset entre deux individus, c’est-à-dire deux psychés, où se projettent et se mêlent :

1.      le transfert de l’histoire de chaque protagoniste ;

2.      le transfert de leurs visions-du-monde ;

3.      et le transfert de pulsions, d’affects et de fantasmes.

Les problématiques non réglées sont alors répétées et remises en jeu dans les relations comme modes même de relation, selon un théâtre personnel tenu comme conception du monde. Je prendrais trois exemples :

– la « scène du pot » ;

– le système de la « logique phallique » (rapports de force et de domination, compétition, etc.) ;

– « 2 contre 1 » (ou la compétition œdipienne).

Le rapport de force, étant si observable chez les animaux, cela donnerait à penser qu’il s’agit d’un fait de nature congénital. Cela est certes possible chez la plupart des animaux, mais pour ce qui est de l’humain, soutenir une telle thèse et s’en contenter serait une façon de refouler quelque chose d’important. En effet, le rapport de force est acquis, ou du moins, son mode de réponse, son fonctionnement – ce qui ne remet pas en cause l’aspect darwinien de la question. C’est tout d’abord une expérience vécue (Erlbnis).

L’enfant, à sa naissance, est équipé de modes de réponses instinctuelles relatives à son autoconservation et ses besoins physiologiques. L’expression de ces éléments, du fait de son inachèvement biologique à la naissance, le met au contact du monde extérieur et des personnes qui prennent soin de lui et dont il dépend pour vivre. C’est dire aussi qu’il est d’emblée en confrontation avec l’altérité, même si, bien évidemment, il n’en a ni conscience, ni représentation.

La dimension du rapport de force va donc être une découverte progressive et ceci du fait qu’il y aura toujours un écart, un temps de latence, entre sa demande, fut-elle physiologique, et la satisfaction permise et apportée par l’autre. Cet écart est inévitable, mais nécessaire dans la mesure où il est la source d’une découverte essentielle : il y a une différence radicale entre moi et non-moi, et il existe une réalité externe, source et lieu de frustrations.

Dès que le sentiment de « moi » s’instaure, le petit enfant va donc sans cesse tenter de réduire l’écart entre lui et l’autre, afin de réduire celui entre ses besoins et leurs satisfactions.

Bien sûr, cet autre qui apporte les soins va passer bien du temps à négocier avec l’enfant pour réduire son exigence afin que les besoins de l’enfant s’alignent sur les envies du soignant.

Ainsi se mettent en actes les premiers rapports de force, au fil des tétées ou des couchers, des câlins et des premiers jeux, etc. Si tout cela est inévitable mais nécessaire par rapport au travail de différenciation, ce qui va faire destin psychique est la façon, le mode dont tout cela a pu se dérouler, selon toute une palette de possibilités qui vont d’un échange paisible où l’enfant ne doute pas de la satisfaction, à des états de détresse ou de rage car la satisfaction semble hasardeuse ou incertaine (« suis-je entendu ? »). Cela fait destin dans la mesure où ces vécus et ces modes de réponses se répètent à l’âge adulte (de l’effondrement à la soumission, en passant par la rage).

Nous avons en nous une sorte de vestige infantile du rapport au pouvoir et à la puissance : en effet, fut un temps où les adultes nous paraissaient tout-puissants et omniscients, voire magiciens. C’étaient aussi des géants, d’authentiques dieux dont je dépendais. Par la suite, il m’a fallu les destituer pour me sentir grandir et me sentir fort et différencié. En fait, je n’ai fait que déplacer les anciens dieux sur de nouvelles incarnations, telles que instituteurs, gendarmes, maîtres, Freud, science, astres, etc., mais par ce déplacement, je revis dépendance et soumission, tout en étant en partie rassuré qu’il y ait toujours une omnipotence ou une omniscience quelque part, une instance géante protectrice. Mais en une autre partie de moi, cela me fait revivre le sentiment d’une petitesse du moi, ce qui m’amène à répéter sans cesse l’acte de destitution des nouveaux dieux afin de me sentir entier et autonome. Nous irions ainsi de dieux en dieux pour être rassuré, et de destitutions en destitutions pour nous sentir réellement exister. Salvador Dali eut un bon mot pour résumer cela : « Plus je grandis, plus Dieu rapetisse ».

1 – Mais il y a une scène très importante – du moins dans la vision-du-monde psychanalytique – où tout cela reçoit une organisation fondamentale dans la mesure où l’enfant accède à une conscience de ce rapport de force entre lui et ses parents et à une conscience de sa personne entière. C’est la scène du pot qui marque une véritable révolution dans la vie psychique de l’enfant.[xiii]

Imaginons un peu la situation : le bébé vivait jusqu’ici tel un prince (« Sa Majesté le Bébé » : au moindre cri ou appel, l’adulte arrivait pour le satisfaire. Nous sommes là dans un véritable Eden. Et puis, un jour apparaît un objet – le pot – et une exigence qui renverse tout son monde connu : jusqu’ici, c’est lui qui demandait, exigeait, et l’autre donnait satisfaction, et tout à coup, tout s’inverse car c’est cet autre qui demande et exige d’être satisfait par l’enfant qui doit donner quelque chose de sa personne. Il n’est plus nourrit, c’est à lui de nourrir, et l’enjeu est de continuer à être aimé, soigné, etc. Ce qui est ici à noter est l’importance capitale du « non ! », que ce soit celui de l’adulte ou celui de l’enfant. En effet, le non n’est pas seulement un mot d’opposition, il est aussi le mot de la prise de position et surtout le mot qui inscrit l’altérité : en disant non, je me pose en m’opposant face à un autre reconnu comme tel.

Nous savons comment cela se passe, entre refus obstiné, pleurs, attentes, etc. Puis l’enfant peu à peu se soumet à cette demande – pour préserver l’amour – mais en déplaçant sa résistance ailleurs, sur d’autres scènes.

Mais la façon dont cette exigence de propreté a pu se vivre dépose en lui un modèle de vécu du rapport de force dont les éléments les plus marquants peuvent être l’entêtement opiniâtre pour un « non » systématique, ou le refus de donner, de lâcher le morceau, se soumettre, etc. Ainsi le vécu de l’adulte est en partie déterminé par cette période et la façon dont les parents ont pu gérer ce moment en imposant leurs exigences et envies. Cela produira une sorte de scenario relationnel. (Par exemple, un étudiant qui donne l’impression de ne pas comprendre qu’il a à produire quelque chose de lui, à donner, par exemple, une dissertation ou sa pensée, car à ses yeux il n’est pas question d’échanger son plaisir contre celui du professeur, et ne comprenant donc pas qu’en fait cela est pour lui bien plus que pour l’autre).

Notons que cette scène, un peu mythologisée, est aussi à la source de la compétition, c’est-à-dire la confrontation de deux désirs et de deux satisfactions, dont le gain supplémentaire est celui d’une réassurance narcissique, soit le sentiment d’exister entier, sans être entamé par la présence de l’autre, réassurance imaginée comme ayant le pouvoir de panser d’anciennes blessures. La compétition sportive en est une forme disons « sublimée » car elle est cadrée et codée : c’est un game par opposition à la sauvagerie du play fantasmatique.[xiv]

Tout cela va de pair avec ce que nous nommons Idéal du moi (Ichideal) quelle qu’en soit la forme mais qui a tout à voir avec un sentiment de puissance et donc d’intégrité de soi. En effet, l’enfant sur son pot qui oppose son refus au désir exigeant des adultes éprouve plusieurs satisfactions dont l’une est celle de sa puissance, de son pouvoir : il oppose son désir et protège son plaisir et ainsi se pose comme personne globale, entière, face à l’autre. Ainsi éprouve-t-il un sentiment de puissance en exerçant sa capacité à dire « non » à l’intrusion des autres et découvre son pouvoir dans la relation (ce dont il peut finement jouer, par exemple en criant « pipi » pour qu’on s’intéresse à lui alors qu’il n’a pas un tel besoin, mais cela est parfois plus efficace que d’appeler ses parents qui font la sourde oreille).

Il y a donc dans tout cela les ingrédients des notions de pouvoir et de puissance qui se retrouvent dans les relations adultes organisées en rapport de force dont deux gains parmi d’autres seraient :

            se rassurer quant à soi-même : en m’opposant, je me pose et me réassure comme étant entier et puissant ;

            et je repousse l’intrusion perturbatrice (ou son vécu) de l’autre en moi.

Le pouvoir et la puissance s’éprouvent quand on a le sentiment que l’autre n’existe plus, qu’il n’a plus les moyens d’influencer et qu’il s’est soumis à mon désir et ma satisfaction. Pour jouir du pouvoir, il est donc requis d’avoir le sentiment que l’autre n’existe pas comme personne et qu’il n’est qu’un objet.

Cette première scène consciente du rapport de force va recevoir par la suite une seconde élaboration encore plus radicale et dont la destinée est encore plus observable.

2 – La seconde élaboration importante a lieu lors de la « phase phallique » : c’est là que compétition et rivalité  s’organisent.

Je ne vais pas entrer dans les détails de cette période quant à l’élaboration de la différence des sexes mais pointer un destin psychique de cette période en ce qu’elle crée et dépose en nous un mode de pensée spécifique très répandu chez l’adulte. Car ce qui émerge à ce moment-là est une forme de logique binaire[xv] qui se résume à une opposition entre « plus » et « moins ». Ce système binaire découpe le monde en deux catégories qui sont mises en rapport d’exclusion, donc de rivalité et de compétition : il y a ce qui est fort, puissant, et ce qui est faible, impuissant, etc.

Cette logique phallique code et interprète immédiatement les situations et événements, et le plus souvent les relations à l’autre, parfois à l’insu des protagonistes. En effet, dès que deux individus se rencontrent, est mise en tension la question, et l’éprouvé phallique : qui de nous deux est le plus ? Et si je suis le moins, que faire pour reprendre la place du plus ? (Ou encore, qui se sent le plus ou le moins ?).

Sous ces signes, ce qui est en jeu est le vécu de soi :

            si je me sens « plus » face à l’autre, au mieux dans son regard, alors je me sens pleinement exister grâce à une satisfaction portée par les sentiments de domination ou de supériorité, d’omnipotence et d’omniscience, ce qui produit une réassurance narcissique (« je suis le plus beau, le plus fort », etc.) et qui donne le sentiment de réaliser mon idéal du moi (mais pour en être là il me faut oublier combien, au fond de moi, je doute de l’être et ne trouvant pas en moi cette réassurance il me faut donc la mettre en actes face et avec l’autre) ;

            si je me sens « moins », les éprouvés dépressifs émergent ou risquent de m’envahir car je me sens nul, bête, moche et soumis, et je n’éprouve plus ce sentiment d’être entier mais fragmenté (perte du sentiment d’identité) et risque les éprouvés de déréliction, d’anéantissement, etc. L’issue est alors de terrasser l’autre.

Cette logique phallique crée un mode à deux places, uniquement, monde qui se représenterait verticalement selon le modèle de l’échelle : tout en haut, le chevalier héroïque à l’armure étincelante, et tout en bas, l’esclave ou le vermiceau insipide croupissant dans les marécages de la vie et de l’esprit… Alors, face à ce sentiment de manque à exister, je vais me donner l’illusion que, avec des avoir, je compenserais ce manque d’être.

Ce système logique organise le plus souvent les relations adultes de compétition et de rivalité.[xvi]

L’univers phallique est ainsi fait : ce n’est pas le contenu qui compte, mais l’emballage, l’étiquette.

L’enjeu est en-deçà : il s’agit de masquer à soi-même sa tragédie interne toute nourrie du doute d’être individu, entier, aux prises avec des sentiments d’incertitude, d’inachèvement ; dès lors, je tente de me réassurer en me prouvant ma supériorité devant l’autre.[xvii]

Mais tout n’est pas si négatif, car dans certains cas cette compétition n’est pas stérile. Elle peut être motrice si elle n’est pas une répétition fixée, et me faire parcourir bien des univers qui m’enrichissent.[xviii]

3 – Pour finir, je souhaiterais évoquer un dernier exemple, d’origine plus tardive que les précédents car lié à la fameuse phase œdipienne. Là aussi, je vais vous épargner les détails pour n’en garder qu’un élément qui a, lui aussi, la particularité d’être la source d’une logique inconsciente et fantasmatique qui, dans certains cas, vient organiser les systèmes relationnels. L’on pourrait la nommer : logique du 2 contre 1.[xix]

L’observation du quotidien nous montre combien il est difficile d’établir une relation à trois. Souvent cela tourne  à un système où deux sont contre le troisième – on pourrait ici parler de logique du tiers exclu – système où les places peuvent être tournantes : tantôt moi, tantôt un des autres, se retrouvent à la place du mort, de l’exclu, ou bien ai-je l’impression que les deux autres s’entendent dans mon dos, s’aiment plus qu’ils ne m’aiment, etc. Dans la forme problématique, il y en a toujours un de trop, à éliminer. Par exemple : un homme dont le seul plaisir est de conquérir une femme mariée, afin de mettre « à mort » le troisième, le mari, etc.

Il est aisé d’y voir un héritage de la situation œdipienne et de la façon dont on a pu s’en débrouiller et l’élaborer. Cette problématique est importante dans la mesure où elle nous fait passer d’un monde relationnel à deux (moi et maman ou moi et papa) à un monde à trois et donc une question nouvelle : où est ma place face aux deux autres : au milieu, en dehors, à égalité, etc. ? Là aussi, si je n’ai pu l’élaborer, cela se répétera sans cesse.

Conclusion

Ainsi que j’espère vous l’avoir montré, vous voyez que des problématiques telles que : compétition, rivalité, pouvoir, ont leur source principale dans la vie infantile et dans certains cas répètent, au présent, selon une destinée psychique, c’est-à-dire de prédétermination, les modes de réponses ou leur absence, les élaborations reçues lors de cette époque infantile. Cette répétition est liée à l’échec d’élaboration par le jeu (play) et se répète dans le game relationnel où, souvent, les codes peuvent atténuer la « sauvagerie » fantasmatique.

Mais je ne systématise pas cela, car cela est valable pour les cas où, je le répète, par défaut d’élaborations ultérieures, quelque chose est fixé et ainsi se répète fantasmatiquement dans les relations et qui crée du compliqué, du conflictuel, de l’échec, etc. Ce sont ces dimensions qui indiquent que se répète et se rejoue quelque chose d’inactuel.

Mais toutes les relations humaines ne sont pas ainsi faites ! Il  y a aussi des formes de compétition « sublimées » et codées, cadrées. Je citais l’exemple du sport, mais c’est aussi le cas dans toute institution ou groupe humain : là, le play fantasmatique est cadré en game mais persiste en-dessous, et parfois prend le dessus.

Et tout n’est pas répétition dès lors qu’il y a progrès personnel de nos élaborations.

Mais une grande part des relations humaines relève de ces enjeux internes mis en jeu dans l’interpsychique. C’est ce qu’avait observé Shakespeare, et qui le fait dire au personnage de Jacques : « Le monde entier est un théâtre, et les hommes et les femmes ne sont que des acteurs; ils ont leurs entrées et leurs sorties. »[xx]

Il y a beaucoup de jeux et d’enjeux dans les relations à l’autre et au monde, mais il y a aussi des relations authentiques, au présent, où l’autre est pleinement reconnu comme autre à part entière, différent de moi et non pas comme un figurant de mon théâtre fantasmatique, et avec qui un échange est possible.



[i] Cette homéostasie relève pour Freud de deux principes hérités de la psychologie dynamique du XIXè siècle, principes construits sur la base du mythe de Psyché endormie qu’Eros vient éveiller :

– Konstanzprinzip : principe selon lequel l’appareil psychique tend à maintenir à un niveau aussi bas ou, tout au moins, aussi constant que possible, la quantité d’excitation qu’il contient. La constance est obtenue d’une part par la décharge de l’énergie déjà présente, d’autre part par l’évitement de ce qui pourrait accroître la quantité d’excitation et la défense contre cette augmentation ;

– Nirwanaprinzip : terme de Barbara Low repris par Freud pour désigner la tendance de l’appareil psychique à ramener à zéro ou du moins à réduire le plus possible en lui toute quantité d’excitation d’origine externe ou interne.

[ii] « Le système nerveux est un appareil auquel est impartie la fonction d’éliminer les stimulus qui lui parviennent, de les ramener à un niveau aussi bas que possible, ou qui voudrait, si seulement cela était possible, se maintenir absolument sans stimulus » : « Pulsions et destins des pulsions » (1915), in OCF-P XIII, P.U.F., 1988, p. 166 ; affirmation de Freud que l’on trouve aussi bien dans l’Esquisse que dans l’Abrégé. De plus, « Le réflexe reste le modèle de toute production psychique » (Linterprétation des rêves, op. cit.,  p. 456).

[iii] Un élément d’opposition à la différence est représenté par la notion de Narcissisme.

[iv] Freud S., lettre à Fließ du 12.XII.1897, in La naissance de la psychanalyse, P.U.F 1969, pp. 210-211. « (…) Imagines-tu ce que peuvent être les mythes endopsychiques ? (…) L’obscure perception interne par le sujet de son propre appareil psychique suscite des illusions qui, naturellement, se trouvent projetées au dehors et, de façon caractéristique, dans l’avenir, dans l’au-delà. L’immortalité, la récompense, tout l’au-delà, telles sont les conceptions de notre psyché interne… C’est une psycho-mythologie. »

Peu après, en 1901, Freud ajoute ceci « L’obscure connaissance (la perception pour ainsi dire endopsychique – qui ne présente en rien le caractère d’une connaissance vraie) de l’existence de facteurs et de faits psychiques propres à l’inconscient se reflète (…) dans la construction d’une réalité suprasensible, que la science a pour but de retransformer en psychologie de l’inconscient (…) à transformer la métaphysique en métapsychologie ». In Freud S., Psychopathologie de la vie quotidienne, pp. 411-412.

[v] Voir la notion de Begierde chez Hegel.

[vi] Ce qui est assez dangereux quant aux conséquences, l’histoire en donnant bien des exemples, tel que civiliser de force les sauvages, etc. Mais ce qui est observable au niveau d’individus l’est tout autant à celui de sociétés. Platon, déjà, en faisait la peinture suivante (République, VIII, 445 et 544 sq.) en faisant le lien entre cinq formes de gouvernement correspondant à cinq formes d’âme :

     – la monarchie ou aristocratie correspond à un idéal de roi parfaitement juste et bon, dont le XVIIIe siècle fera le roi-philosophe incarné par le « despote éclairé » ;

     – la timocratie correspond à un stade où la quête des honneurs commence à se mêler à la recherche de la justice ;

     – loligarchie substitue l’argent à l’honneur ;

     – la démocratie prend le risque de donner libre cours à l’expression égale de tous les désirs. Les désirs ou intérêts particuliers finissent-ils miraculeusement par s’annuler et se fondre tant bien que mal dans l’intérêt général ?

     – enfin la tyrannie est la catastrophe de la démocratie comme concentration en un seul homme de la démesure et de l’absence de limites, c’est-à-dire du désir sans loi.

[vii] Voir le mécanisme définit par Jean Piaget d’assimilation-accomodation.

[viii] Cette dimension du jeu en tant que lieu de construction de significations, d’élaborations, répète son origine dans le sens où ce fut le plus souvent la mère qui a donné le jeu au bébé et par-là même les premières significations, les premiers liens pour l’enfant.

[ix] Sigmund Freud, 1920 : « Au-delà du principe de plaisir » in Essais de psychanalyse. Paris : Éditions Payot, 1968.

[x] L’observation ultérieure confirma pleinement cette interprétation. Un jour, la mère rentrant à la maison après une absence de plusieurs heures, fut saluée par l’exclamation : « Bébé o-o-o-o » qui tout d’abord parut inintelligible. Mais on ne tarda pas à s’apercevoir que pendant cette longue absence de la mère l’enfant avait trouvé le moyen de se faire disparaître lui-même. Ayant aperçu son image dans une grande glace qui touchait presque le parquet, il s’était accroupi, ce qui avait fait disparaître l’image.

[xi] Par exemple, ce qu’écrit Freud au sujet des créateurs littéraires (« Le créateur littéraire et la fantaisie », in Inquiétante étrangeté, Gallimard,1985) : « L’occupation préférée et la plus intensive de l’enfant est le jeu. Peut-être sommes-nous en droit de dire que tout enfant qui joue se comporte en poète, en tant qu’il se crée un monde à lui, ou, plus exactement, qu’il transpose les choses du monde où il vit dans un ordre nouveau tout à sa convenance. Il serait alors injuste de dire qu’il ne prend pas ce monde au sérieux; tout au contraire, il prend très au sérieux son jeu, il y emploie de grandes quantités d’affect. Le contraire du jeu n’est pas le sérieux, mais la réalité. En dépit de tout investissement d’affect, l’enfant distingue fort bien de la réalité le monde de ses jeux, il cherche volontiers un point d’appui aux objets et aux situations qu’il imagine dans les choses palpables et visibles du monde réel. Rien d’autre que cet appui ne différencie le jeu de l’enfant du « rêve éveillé ».

« Et la langue allemande, en particulier, a maintenu cette parenté du jeu enfantin et de la création poétique en appelant Spiele (jeux) celles des créations littéraires qui ont besoin de trouver cet appui à des objets palpables et qui sont susceptibles de représentations : on dit Lustspiel (comédie), Trauerspiel (tragédie), et on appelle Schauspieler (acteur) la personne qui les « Joue »

[xii] Voir les travaux de Donald Woods Winnicott, en particulier Jeu et réalité. Lespace potentiel, Gallimard, 1975, p. 76 & p. 91, ou bien « Appétit et désordre émotionnel » p. 42. Voir aussi l’enfant nietzschéen qui, par son jeu, accède à un « je crée » et donc un « j’existe » : « Les trois métamorphoses », in Ainsi parlait Zarathoustra.. Notons en passant que cette soumission à l’adaptation est celle qui fonde les neurosciences, le cognitisme et les thérapies cognitivo-comportementale.

[xiii] Si la contrainte éducative à la propreté à perdu de son intensité par rapport au début du XXè siècle, où il s’agissait de civiliser un petit sauvage (selon les principes rousseauistes), et si de nos jors l’enfant est plus reconnu comme une personne, cela ne change pas grand-chose quant à l’impact de cette scène dans la vie psychique.

[xiv] Dit autrement, le code du game maintient l’existence de l’autre alors que dans la fantasmatique cet autre n’existe pas comme être indépendant mais seulement comme objet, voire objet à détruire.

[xv] Les phases infantiles d’élaboration de la libido déposent chacune une telle logique binaire. De façon bien simplifiée, l’on peut dire que la phase orale crée une logique du « bon / mauvais », la phase anale celle d’un « garder / donner ».

[xvi] Exemples : le jeu de l’étiquette par rapport aux publications : on ne s’intéresse pas au contenu du texte mais à l’éditeur (« Ah, vous publiez chez x… », donc « ce doit être intéressant ! » ; ou : quand je serais chef, c’est-à-dire « plus », je serais heureux, mais pour cela je dois supprimer les autres « plus » qui me précèdent, etc.)

Ou bien ce qu’exploitent parfaitement les penseurs de la consomation : vous n’êtes rien si vous n’avez pas le dernier modèle de ceci ou cela, et si vous l’avez, il faudra l’exhiber pour en jouir et se sentir exister devant les autres, grâce à une prime de plaisir.

Ou encore, ainsi que l’énonce Leonard de Vinci, l’usage de la citation afin de donner à son propos plus de pouvoir. Mais « Qui, dans une discussion, invoque les auteurs fait usage non de son intellect mais plutôt de sa mémoire », in Codex Atlanticus, folio 76.

[xvii] Voir la maxime taoïste : « il n’y a que le faible qui cherche à montrer sa force ».

[xviii] Par exemple, face à la bêtise éprouvée à la lecture d’un article, ma colère peut m’amener à penser des choses vraiment brillantes.

[xix] Voir l’étude sociologique de Theodor Caplow, Deux contre Un. Les coalitions dans les triades, Armand Colin, 1971.

[xx] William Shakespeare, in Comme il vous plaira (II, 7).

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