Pascal Blanchard : « Identité, identification, la fonction victimaire »

Délicates questions sur la place – et la fonction – de victime : point de vue philosophique.

Il y a des identités qu’on peut adopter. « Victime » est l’une d’elle. C’est un mot à la mode « identité ». Mais il a cessé de dire ce qu’on est essentiellement, la nature indissoluble d’un être, ce qu’il reste quand on a ôté tous les accidents, il en est venu plutôt à dire ce en quoi on désire se reconnaître, pour revêtir une ressemblance socialement bien caractéristique : cette identité propose une image à adopter, où se glisser pour prendre enfin des contours définissables, pour recevoir un rôle repérable à jouer. « Identité » a donc perdu sa substance sémantique puisque ce mot semble désormais ne pouvoir désigner que le résultat d’une « identification » : l’identité n’existe que par un processus d’identification. On devient soi-même par cet autre adoptable, cet autre qui est une identité disponible et proposée, sans doute parce qu’il est si peu de nature innée dans notre nature humaine qu’il faut compenser ce défaut par l’adoption de ce qui aménage un manque consternant, une nudité définitionnelle voire une « néantisation » qui ronge toute solidité d’être. En ce sens la révolution existentialiste a bien symptomatisé cette défaillance de l’identité essentielle : en l’absence de déterminations substantielles, il reste à « se faire être », selon une formule récurrente de l’Être et le Néant et comme il est très difficile de s’inventer ex nihilo, on prend le rôle disponible, on joue la « comédie réalisante », on entre ainsi dans une identité : il en est de plus ou moins crédibles sur le marché, de plus ou moins solides par cohérence interne et autorité dans les fantasmes collectifs du moment. Le structuralisme, de son côté, avec ses analyses de la parenté a ajouté à cet aveu d’absence d’essence à compenser, l’idée que le social est une distribution de rôles qui s’entre différencient. Il est alors question de place relative : peu importe qui on est, si tant est qu’on soit quelque chose abstraction faite de relations, on entre dans un jeu, dans un système aux éléments en tension réciproque, où l’on est l’actif de ce passif, le passif de cet actif : moins soi-même par ce qu’on est que par tout ce qu’on n’est pas et que sont dans le même temps ces autres qui nous renvoient notre rôle en contre-valeur du leur. Il reste que si existentialisme et structuralisme ont essayé de révéler la vérité de ces processus d’identification, il est bien évident qu’ils ne sont pas vécus en vérité par ceux qu’ils enrôlent. Aussi y a-t-il une « mauvaise foi » de l’identifié qui prend son rôle pour sa nature et s’entête à voir une définition adéquate de son être dans un emprunt contingent. Aussi y a-t-il également une illusion structurale à se croire soi-même intrinsèquement défini alors qu’on est pris dans le réseau d’une répartition où l’on n’a d’être que par ce que les autres ne sont pas. Tout ce préalable pour dire qu’il est une identité marquante, coefficientée d’un grand pouvoir, « victime ». Accéder à cette identité c’est faire un grand pas : la confusion d’un trouble, le malaise mal définissable d’une situation prennent les traits d’un rôle rôdé, on sait enfin qui on est avec le cahier des charges attenant à ce personnage. On devient une victime.

On osera prétendre que dans l’analyse qu’il est proposé ici de cette identité, il n’est pas question de fait ni même de droit : une chose n’est pas victime ; elle subit l’action d’une autre ; seule une personne a une intégrité et une volonté propre : elle peut alors être dite victime si une autre personne attente à cette intégrité ou si cette volonté est arbitrairement empêchée par une autre. Dans ces cas, on ne parle pas de l’action d’une chose sur une autre, mais d’une violence, dont il y a une victime et un auteur. Même si au niveau du droit, l’interprétation se réintroduit (dans la définition de ce qu’il faut entendre par fait violent en particulier : une injure en est-elle au même titre qu’un coup ?), il reste des faits qui motivent l’action du droit : un coup a été porté à quelqu’un par quelqu’un. Il y a toujours un certain support physique selon lequel une distribution des rôles intervient : quelqu’un a subi quand quelqu’un a agi. Mais dans ce qui est entendu ici de l’identité comme victime, il ne sera plus question de cette lisibilité factuelle dont les élaborations du droit ne peuvent se désolidariser si on entend le droit comme ce qui qualifie les faits. L’identité de victime est une catégorie qui a divorcé de cet ancrage physico-juridique. Non qu’elle soit imaginaire, même si elle doit sans doute beaucoup à ce que nous appellerons avec Pascal un « tour d’imagination ». Mais comme elle propose un rôle, une fonction, qu’elle vaut surtout par une capacité de retisser des rapports et d’imposer des interactions définies, elle n’a pas besoin de se certifier de faits constatés et de procès-verbaux enregistrant les états du réel humain. La preuve ? Il lui suffit de la potentialité. Être victime c’est moins l’être dans ce tissu des faits descriptibles, c’est bien plutôt pouvoir l’être, encourir la possibilité de l’être, comme si la puissance d’être était ici plus réelle que l’actualité d’être : réciproquement deviennent suspects d’être violents ceux qui pourraient infliger à la victime potentielle la violence. Étant en possibilité, en état de le faire, ne sont-ils pas déjà agents ? La relation des agents et des patients n’est-elle pas déjà en place, gagnant une évidence mentale avant même qu’aucun fait ne vienne la vérifier ? Ne prend-elle pas les devants par rapport à ces faits éventuels nouant l’interprétation de ce qu’ils pourront être en fonction de la grille d’une passivité innocente et martyre et d’une activité méchante et odieuse ? Qu’on se convainque donc de cela : par contamination, la seule possibilité fait réalité, ce qui confirme qu’une telle identité n’est pas d’abord juridique puisque le droit ne peut de lui-même créer du fait. A savoir pouvoir être victime fait précisément l’identité de la victime comme telle avec cette distribution massive et polaire de ceux qui seront victimes par rapport à ceux qui, auteurs putatifs de violences, feront des victimes.

Bedänklich

Tour d’imagination » (Pascal) et de la prépondérance victimaire :

« De cette confusion arrive que l’un dit que l’essence de la justice est l’autorité du législateur, l’autre la commodité du souverain, l’autre la coutume présente ; et c’est le plus sûr : rien suivant la seule raison, n’est juste de soi ; tout branle avec le temps. La coutume fait toute l’équité, par cette seule raison qu’elle est reçue ; c’est le fondement mystique de son autorité. Qui la ramène à son principe l’anéantit. » Pascal, Pensées, Br. 294 s.

L’expression « tour d’imagination » est de Pascal, qui l’emploie dans ses pensées sur la justice[i] : elle ne vient pas dénoncer seulement l’arbitraire de la norme dont l’autorité devrait être justifiée par son universalité alors qu’elle n’est que bornée, locale et diversifiée comme à fantaisie (« Plaisante justice qu’une rivière borne… »). Son originalité, qu’on ne trouve pas chez Montaigne, consiste à dire une sorte de pente mentale partagée de sorte que, à une époque donnée, pour une communauté donnée, une évidence s’impose, indiscutable, insurmontable, en des matières où pourtant il n’y a nulle contrainte logique, nul état de fait constatable, en des matières qu’on dirait morales puisqu’elles touchent à des questions de légitimité. Notamment : à qui doit revenir le pouvoir politique, qui doit hériter en premier, qui a droit de recevoir les ressources communes pour les redistribuer ? Or en ces matières, la diversité est telle qu’il semble que ce doivent être le hasard ou le caprice qui en décident. La loi dépendrait ainsi d’un principe en soi déréglé, l’aléa, paradoxale loi alogique des lois. Mais Pascal n’est pas Montaigne et plutôt que de céder au constat qu’il n’y a que du fait au fond, il propose une théorie de l’imagination : l’imagination pallie ce défaut de raison de la loi en masquant qu’elle soit sans raison. À la place de cette fondation rationnelle qui, si on la cherchait, ferait voir une absence criante ou un usage de fait, pas moins arbitraire pour s’être rendu vénérable en se perpétuant, opère le kaléidoscope mental de l’imagination qui se fixe et en se fixant fait apparaître un pli mental lequel fait tout à fait se dissiper le caractère arbitraire ou irrationnel d’un principe retenu. Le Suisse se ferait un déshonneur de devoir son rang à son sang là où, à l’inverse, les roturiers seraient ailleurs disqualifiés pour exercer un quelconque pouvoir politique. La primogéniture mâle est ici une condition pour prétendre à la couronne royale alors qu’ailleurs c’est de mères en filles que se transmet le mal nommé patrimoine. C’est comme si un kaléidoscope mental (bien que cette image ne soit pas pascalienne) s’arrêtait et en s’arrêtant, avait fixé, pour un temps donné, l’autorité d’un état de fait suprême, source de toute légitimité, arbitre suprême et en étant suprême, cachant son propre arbitraire : puisque ce pourrait être un tout autre arrêt avec de tout autres conséquences pour la justice, le droit, la morale. Un tel arbitraire est pourtant bien détectable : moins en parcourant le monde et en voyant la contradiction des normes régissant des lieux divers qu’en voyant en un même lieu des usages tombés en désuétude et dont la normativité étonne, étant devenue incompréhensible après avoir été évidente : qui peut aujourd’hui en Europe du Nord comprendre que l’union libre ait été moralement répréhensible vers 1850 au point qu’une femme éclairée comme Jenny von Westphalen, la femme de Karl Marx, n’ait jamais voulu accueillir sous son toit la compagne du fidèle Friedrich Engels ? Qui comprend aujourd’hui (ce qui ne signife pas : expliquer par des causes historiques) l’hystérie collective de soupçon, orchestrée par le sénateur McCarthy, au début des années 50, qui sous couvert de lutter contre les menées des ennemis de l’État infiltré par l’Urss, a permis de mettre au ban de la société américaine des éléments anticonformistes ou en révolte contre l’establishment ? Mais si les mœurs actuelles dénoncent celles qui les ont précédées, elles sont aveugles à leur propre parti-pris, à peu près comme une mode qui en déclasse une autre ne se sait pas démodable alors qu’elle paraîtra sans aucun doute aussi ridicule à d’autres temps que lui paraissent des modes qui ont eu elles aussi, autrefois, leur souveraine actualité. Ce que le « tour d’imagination » permet de penser, mieux que la coutume de Montaigne, c’est précisément ce règne présent, cette fixité acquise du monde moral comme par un coup d’arrêt, et ce qui en résulte, la cécité à l’arbitraire d’une préférence morale, la foi en un bien-fondé de ce qui paraît s’imposer en écartant tout doute. Cette fixité obtenue a le mérite incontestable d’arrêter la contestation, et plus métaphysiquement, de neutraliser la contingence du monde moral : car s’il ne peut s’empêcher d’être normatif, aucune de ses normes n’est plus justifiable qu’une autre. Il faut qu’il y ait de la norme mais peu importe ce qu’elle est. La succession des modes historiques nous montre que la morale sexuelle a comme à loisir parcouru la combinatoire des unions légitimes possibles, sans qu’on puisse assigner un sens à cette variation, comme celui d’une marche à la liberté de choix ou à l’émancipation de l’individu qui échapperait au carcan des mœurs. Le mariage pour tous s’accompagne là d’une horreur pour la relation entre majeurs et mineurs. Ici, la pornographie libre et surabondante d’une vigilance inquiète à la relation qui pourrait n’être pas consentie. Il y a bien une interprétation dominante dans le monde moral (le tour d’imagination permet de comprendre cette unanimité, c’est une torsion d’ensemble qui précipite toute une époque d’un bloc) mais rien ne permet de justifier que ce doit être celle-là et non pas plutôt une autre dont l’autorité serait pourtant tout aussi prévalente. Or nous paraît relever d’un pareil tour d’imagination la place prépondérante prise dans notre monde moral par la « victime ».

Nous en proposerons deux indices révélateurs. L’une concernera la justice et le sens de la sanction pénale : aujourd’hui la peine ne semble plus avoir le sens que lui prêtait le code napoléonien qui insistait sur la responsabilité de l’agent. A ce titre, la peine, si lourde soit-elle, et dût-elle être la mort, honorait dans le justiciable sa souveraineté comme sujet responsable, comme agent libre. Il n’était pas traité en nuisible, en animal malfaisant. La loi parlait à sa puissance d’agent capable de répondre de soi. Le sens de la condamnation a changé lorsque la condamnation a été écrite non depuis l’infracteur mais depuis le patient : la peine est devenue une manière pour la victime de mesurer à travers ce qui est infligé à l’auteur des faits ce qu’elle a elle-même subi. L’important est de permettre cette mesure, de rendre enfin appréciable pour la victime ce qu’elle a enduré et sur quoi il se peut qu’elle n’ait pu mettre elle-même, dans l’assaut de la violence, aucune qualification qui la lui rendrait objectivable. La peine serait l’indispensable mesure permettant la réappropriation du mal subi de la part de la victime. De la même façon que le deuil n’est plus apprécié du point de vue de l’être qui a été perdu, mais du point de vue du travail psychologique que doit faire le survivant pour que son moi survive à cette amputation de ses investissement libidinaux, la sanction pénale semble avoir perdu ce sens d’être le chiffrage de la gravité d’une désobéissance pour devenir la mesure enfin tangible d’une douleur que par rebond la victime peut s’assimiler pour savoir ce qu’elle a subi. La plainte de la victime est devenue la parole audible et peut-être la seule qui soit légitimée à se faire entendre. L’interprétation générale bascule du côté de cette appréciation qui tourne autour d’un personnage devenu essentiel à qui on a donné la voix. Un autre relevé répéterait une analyse nietzschéenne concernant l’appréciation morale, la distribution du bien et du mal, la répartition des bons et des méchants : dans une société des victimes est bon celui qui s’empêche. La bonté consiste avant tout à ne pas faire du mal à qui peut en subir, étant donné qu’il est défini essentiellement par sa vulnérabilité. À ceux qui se définissent ou qui sont définis par l’interprétation dominante comme ceux à qui l’on peut faire du mal, le premier mot de la vertu est la retenue, l’abstention, un non à soi-même, le scrupule devant les tentatives de sa liberté qui pourraient nuire à autrui. Au fond est bon le contraire de ce que ferait le méchant, est bon qui ne veut pas être méchant. Il faut en passer par une négation pour donner des titres positifs à la bonté. Nietzsche a montré qu’une telle évaluation n’a aucune évidence, à preuve que, selon une autre évaluation, la bonté a bien pu consister dans cette pure jouissance de soi que procure une force qui va jusqu’au bout de ce qu’elle peut. Nietzsche a même soupçonné un faux-monnayage dans cette vertu d’abstention : qui s’abstient en a tout le mérite et le méchant est précisément celui qui fait un mauvais usage de sa liberté ; autrement dit, qui s’abstient prétend qu’il pourrait faire ce que le méchant ne s’empêche pas de faire et le terme de « faculté » lui rend le service sémantique de faire passer son scrupule et sa retenue pour des actes positifs alors qu’ils ne sont peut-être que de l’impuissance ou de crainte. La victime est devenue le pivot de ce tour d’imagination qui entraîne des évaluations globales. Qui y verrait un progrès moral serait bien avisé de ne jamais perdre de vue que le fait, installé ou « établi » comme dit Pascal, n’a jamais en soi rien de fondé, n’est justement rien d’autre qu’un « état de fait ». L’invention pascalienne du « tour d’imagination » pour penser l’émergence d’un principe fondateur non fondé dans le monde moral se continuerait sans doute dans ses considérations sur la force : si un fait établi fait autorité c’est en vertu d’une sorte d’intensification de son propre établissement, un renforcement à partir de soi qui contredit à toute logique philosophique de la fondation, laquelle prétend toujours dériver le fait d’une raison justificatrice avec laquelle il ne se confond pas. Justifier c’est faire deux, c’est établir la dualité du justifiant et du justifié et admettre que le fait dépend de ce qui est étranger au champ de la factualité. Le droit naturel moderne pariera sur cette structure. Pascal, continuant la leçon de Montaigne sur la tradition de l’usage et la perpétuation du fait établi, radicalisera, lui, l’assomption du fait comme se doublant lui-même « mystiquement ». Le fondement mystique de l’autorité c’est la fusion du fait et de la raison d’être, la raison d’être découlant du fait ou ne faisant qu’un avec lui. Le fait se renforce d’être ainsi, c’est-à-dire qu’il efface sa contingence en étant installé. Il a le mérite incomparable d’être. Le fait devient force. Et la force, c’est le fait qui s’impose. C’est ainsi qu’on pourrait comprendre cette étonnante pensée de Pascal : que la justice ne peut avoir aucune antériorité par rapport à la force et que ne pouvant faire que la justice soit forte, on a fait que la force paraisse juste.

Les analyses pascaliennes sont très loin d’entrer dans notre propre tour d’imagination, c’est peu de le dire. Le ressort victimaire ne veut pas s’apparaître comme un fait dominant mais comme une juste revendication. Il ne veut pas voir son crédit comme un fait installé mais comme un aboutissement dans le progrès pour la justice. Il ne peut imaginer que son règne passera et qu’il y aura un avenir des faits d’interprétation depuis lequel il paraîtra têtu, insipide et incompréhensible.

[i] « Ainsi tout le titre par lequel vous possédez votre bien n’est pas un titre de nature, mais d’un établissement humain. Un autre tour d’imagination dans ceux qui ont fait les lois vous aurait rendu pauvre ; et ce n’est que cette rencontre du hasard qui vous a fait naître avec la fantaisie des lois favorables à votre égard, qui vous met en possession de tous ces biens. » Pascal, Trois discours sur la condition des grands.

 

© Les textes édités sur ce site sont la propriété de leur auteur. Le code de la propriété intellectuelle n’autorise, aux termes de l’article L122-5, que les reproductions strictement destinées à l’usage privé. Tout autre usage impose d’obtenir l’autorisation de l’auteur.

Ce contenu a été publié dans Divers, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

2 réponses à Pascal Blanchard : « Identité, identification, la fonction victimaire »

  1. Roseline Bonnellier dit :

    à Pascal Blanchard,merci pour votre texte qui \\ »donne à penser\\ »… A ce propos, quelques remarques et questions:1) \\ »Lapsus calami ou \\ »simple\\ » (?) faute d\\’orthographe en allemand sur votre emploi de \\ »bedänklich\\ » (sic), qui ne se trouve pas dans le dictionnaire, ce qui s\\’y trouve tout au plus, c\\’est le verbe \\ »bedanken\\ » = remercier. Je crois que vous vouliez dire \\ »bedenklich\\ » (tout à fait dans le dictionnaire)du verbe \\ »(be)denken\\ » = penser dont l\\’un des emplois, par ex. dans \\ »das macht\\ » ou \\ »stimmt\\ » \\ »bedenklich\\ » se traduit par: \\ »cela donne à réfléchir\\ ». Si je m\\’amusais à interpréter (sujet qui vous intéresse dans un autre article paru sur le site \\ »D\\’un divan l\\’autre\\ ») cette éventuelle faute d\\’orthographe sans le savoir comme un Monsieur Jourdain qui serait beaucoup plus français que germaniste, je me dirais que peut-être il y aurait une pensée latente ou \\ »d\\’arrière-plan\\ » (Freud Traumdeutung) dans votre propos concernant Pascal janséniste autour de \\ »danken\\ » sur la question de la grâce (suffisante ou/et efficace) quant à votre réflexion sur la \\ »fonction victimaire\\ », victime ayant étymologiquement ou à l\\’origine une signification religieuse précise qui a trait au sacrifice : la première victime étant \\ »l\\’agneau\\ » de Dieu, Jésus-Christ.2) Or, il n\\’y a aucune occurrence des mots \\ »Dieu\\ » ou \\ »Jésus-Christ\\ », dans votre texte qui parle beaucoup de Pascal: ?3) sur l\\’idée de nature chez Pascal, qui est un écrivain et penseur du XVIIe siècle, l\\’ \\ »époque classique\\ » en France, laquelle est un \\ »royaume\\ » (Frankreich= le royaume de France en allemand, quand \\ »Deutschland\\ » signifie seulement et littéralement \\ »pays parlant allemand\\ », concept linguistique), je vous livre cette citation de l\\’historien Robert Muchembled dans un ouvrage sur le XVIIIe s : \\ »Nature: la notion est fondamentale pour l\\’époque moderne. Au XVIe s., sans se confondre avec Dieu, elle est sa \\ »chambrière\\ » \\ ». Avec les Lumières, les lois de la nature devront être \\ »conformes à la raison humaine\\ » (je résume). Est-ce qu\\’au XVIIe s. Pascal se trouve entre les deux?4) l\\’imagination, \\ »tour d\\’imagination\\ » chez Pascal qui emploie par ailleurs le mot \\ »fantaisie\\ » (Phantasie, étymologie traduction en latin du grec) qui, lui, donne à penser en psychanalyse dans les nouvelles traductions des OCF.P oeuvres complètes de Freud en français par rapport au concept de \\ »fantasme\\ ». Je pense à part moi que, chez Pascal, le mot \\ »fantaisie\\ », reste plus proche de son vieux sens français que son adaptation anachronique un peu forcée à une traduction de \\ »Phantasie\\ » chez Freud, qui selon moi, l\\’a surtout emprunté à la \\ »Sorcière\\ », l\\’imagination même, de Goethe dans Faust pour sa \\ »métapsychologie\\ ».Donc voilà, encore merci de m\\’avoir \\ »donné à penser\\ »Roseline Bonnellier

    • Pascal Blanchard dit :

      Pascal Blanchard : « Merci pour votre lecture, votre attention et vos remarques. En effet, j’ai laissé dans mon texte par erreur ce mot dont vous avez eu raison de corriger l’orthographe car c’est bien à « bedenklich » que je pensais. C’est un adjectif qui donne à penser, je suis d’accord avec vous ! Au point que je voulais consacrer un 3ème § à ce terme qu’on trouve cité par Heidegger dans son Introduction à la Métaphysique et par Thomas Mann dans son Dr Faustus. Ce qui m’intéresse dans cet adjectif qui n’a pas à ma connaissance son équivalent en français, c’est ce mélange sémantique de : gros de sous-entendus , d’obscène qui se révèle seulement si « on y pense », de « soupçonnable » avec cette particulière gravité (« c’est du lourd ») que ce n’est pas à première vue que ça se révèle mais seulement dans un après-coup (de la pensée). Le lien avec le sexuel est évident. Cet adjectif me semble bien décrire l’atmosphère qui accompagne les phénomènes de mœurs où la sexualité de l’autre est objet d’une suspicion prête à se scandaliser, ne s’arrêtant jamais aux premiers aspects mais « n’en pensant pas moins ».
      C’est vrai que Pascal ne m’a intéressé que dans l’analyse qu’il fait de la « folle du logis ». Ce n’est pas la fécondité dans la genèse des images individuelles comme dans la « Phantasie » mais le pouvoir quasi législatif d’une instance qui commande aux mœurs comme il commande à la mode du moment, sans qu’il soit lui-même assujetti à un ordre quelconque qui en « rendrait raison », d’où l’aspect de caprice, de contingence débridée.
      Merci encore. Pascal Blanchard »

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Merci de taper les caractères de l'image Captcha dans le champ

Please type the characters of this captcha image in the input box

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.