Ivan Illich : « L’aliénation de la douleur »

Chapitre VI de Némesis médicale. L’expropriation de la santé, Seuil, 1975. Plus que jamais et d’urgence, relire Illich et sa Némesis !

En colonisant une culture traditionnelle, la civilisation moderne transforme l’expérience de la douleur. Elle retire à la souffrance sa signification intime et personnelle et transforme la douleur en problème technique. La souffrance cesse alors d’être acceptée comme contrepartie de chaque réussite de l’homme dans son adaptation au milieu et chaque douleur devient un signal d’alarme qui appelle une intervention extérieure pour l’étouffer. Cette médicalisation de la douleur réduit la capacité que possède tout homme de s’affirmer face au milieu ou de prendre la responsabilité de sa transformation, capacité en quoi consiste précisément la santé.

La culture préindustrielle élève le seuil de tolérance à la douleur en lui donnant un sens. La civilisation médicale s’engage à réduire la souffrance en augmentant la dépendance. La culture rend la douleur supportable en l’intégrant à un système chargé de sens, l’idéologie de la médecine industrielle détache la douleur de tout contexte subjectif afin de mieux la détruire. Les cultures traditionnelles, dans leur majorité, rendent l’homme responsable de son comportement sous l’impact de la douleur ; ce que l’homme industrialisé perçoit, c’est que la société est responsable envers l’individu affligé qu’elle doit délivrer de sa douleur [214]. Cette inversion du sens de la responsabilité à l’égard de la douleur reflète et renforce une transformation éthique et politique.

Chaque tradition propose un ensemble de vertus dans lesquelles la réponse à la douleur peut s’incarner et par lesquelles la douleur corporelle prend la forme d’une expérience personnelle caractéristique d’une culture. Chaque homme, à travers la structure de sa langue, à travers les gestes qui l’ont formé, est imprégné d’un style qui lui permet d’assumer la douleur en tant qu’il est responsable de sa vie ou envers les autres. Seule la douleur assumée comme responsabilité de sa vie concrète en fait une expérience personnelle, affrontée de manière autonome et non mécanique et contraignante ; expérience quotidienne et ordinaire, ni histrionique ni héroïque ; personnelle et sociale et non artificielle et individualiste. Selon la culture dans laquelle elle survient, la souffrance peut évoquer le devoir, le détachement, la prière, la plainte, la pitié, la rage. En dépit de la consolation religieuse, de la suggestion du rituel magique ou d’un opium quelconque, dans un tel cadre la souffrance reste une œuvre autonome, inéluctable et solitaire. La culture stimule la capacité de chacun de continuer à vivre avec la présence ou la menace de la douleur.

Ce tissu de réponses organiques est en train de se transformer en une demande générale de gestion technique des sensations, des expériences et de l’avenir individuels. La douleur donnait autrefois naissance à une réponse culturelle permettant aux hommes de faire face à la réalité chaque fois que celle-ci se présentait comme une barrière à leur volonté d’action. Désormais, la douleur est transformée en problème d’économie politique [215], ce qui donne naissance à un processus en boule de neige : l’individu a appris à se percevoir comme « consommateur d’anesthésies » et se lance à la recherche de traitements qui lui procurent une insensibilité, une inconscience, une aboulie ou une apathie artificiellement provoquées.

La douleur considérée essentiellement comme expérience de l’inévitable a eu l’efficacité politique de limiter l’exploitation de l’homme par l’homme. Si cruel fût-il, le pouvoir était contraint à une sorte de réalisme, jusque dans l’abus. Mais, dans une société industrielle, une proportion de plus en plus importante du mal qui atteint l’homme est constituée par le choc qu’exerce sur lui un outillage qui ne saurait lui servir de milieu. La dynamique industrielle élimine la capacité de refus de l’homme autonome qui aurait pu servir de borne à son expansion. En expropriant la douleur, le progrès de l’idéologie industrielle la supprime en tant que limite à la croissance ultérieure de l’abus. On ne voit plus dans la douleur une nécessité

« naturelle » à laquelle s’ajoute l’agression de l’autre. Toute douleur se présente dès lors comme le résultat d’une technologie fautive, d’une législation injuste ou d’un manque de médecine analgésique. L’hétéronomie dans la douleur, typique pour le consommateur d’anesthésie, transforme celle-ci en une demande accrue de médicaments, d’hôpitaux, de services de santé mentale et autres soins impersonnels et professionnalisés, ainsi qu’en un soutien politique à la croissance d’une institution médicale, quel que soit son coût humain, social ou économique. Je veux démontrer que cette mainmise technique sur la souffrance aboutit nécessairement à une nouvelle espèce d’expériences culminant à Auschwitz et à Hiroshima.

Pour mieux saisir cette question, il est nécessaire d’inclure dans l’explication de la douleur le contexte social dans lequel celle-ci apparaît [216]. La sensation de la douleur est provoquée par des messages que reçoit le cerveau. L’expérience de la douleur à laquelle je réserve la désignation de « souffrance » dépend, en qualité et en intensité, de quatre facteurs au moins, en dehors de la nature et de l’intensité du stimulus : le langage, l’anxiété, l’attention et l’interprétation. À travers ces quatre facteurs, qui donnent forme à la douleur, agissent des déterminants sociaux : l’idéologie, les structures économiques, les caractéristiques sociales. C’est la culture qui décrète si c’est le père, la mère ou les deux ensemble qui doivent gémir à la naissance de l’enfant [217]. Le caractère individuel, les habitudes acquises et les circonstances déterminent le sens que l’homme donne aux sensations corporelles ainsi que l’intensité de sa souffrance [218]. Il est bien connu que, sur un champ de bataille, des soldats qui considèrent la mutilation comme une fin relativement heureuse de leur carrière militaire personnelle refusent des injections de morphine, qu’ils considéreraient comme absolument nécessaires pour calmer leur angoisse si une mutilation identique à leur blessure leur était infligée dans une salle d’opération [219].

Avec la médicalisation d’une culture, les déterminants sociaux de la souffrance agissent en sens inverse. Là où souffrir, c’est d’abord affronter une épreuve, on respecte la douleur en tant qu’expérience intime et incommunicable. Dès que la douleur devient objet de manipulation, on y voit surtout la réaction d’un organisme ; on peut la vérifier, la mesurer et la gérer. C’est cet affadissement, cette réification de l’expérience subjective qui fait de la douleur la matière d’un diagnostic puis d’un traitement extérieur plutôt qu’une occasion pour celui qui l’endure d’accepter sa culture, son anxiété et ses croyances [220]. La profession médicale décide quelles sont les douleurs authentiques, quelles sont celles qui sont imaginées ou simulées [221]. La société reconnaît ce jugement professionnel et y adhère. La douleur objective ne pourrait devenir souffrance qu’à travers le regard d’autrui, mais c’est le regard professionnel, partagé par la société, qui détermine le rapport du patient à son expérience. En milieu médicalisé, la douleur bouscule et bouleverse la victime sans qu’elle ait d’autres recours que de se livrer au traitement. Elle transforme en vertu obsolète la compassion, source de réconfort, de consolation ou de distraction. Aucune intervention personnelle ne peut plus alléger la souffrance et détourner ainsi la recherche des thérapies [222].

L’histoire de la médicalisation de la douleur reste encore à écrire. Quelques monographies savantes traitent de l’inversion de l’attitude des médecins envers la douleur durant les deux cent cinquante dernières années [223]. A. Souques a contribué à l’histoire de la douleur comme signe diagnostique [224]. Quelques textes traitant des attitudes contemporaines à l’égard de la douleur offrent des aperçus historiques [225]. La médecine anthropologique allemande et hollandaise a réuni des éléments précieux sur le développement de la douleur moderne en décrivant l’évolution des perceptions corporelles dans l’ère technologique [226]. La relation entre l’institution médicale et l’anxiété des patients a été explorée par quelques psychiatres et, à l’occasion, par la médecine générale. Reste un terrain vierge pour la recherche : le changement de l’attitude médicale envers la douleur.

Plusieurs obstacles s’opposent à une telle histoire de la vision médicale de la douleur. Une des premières difficultés que rencontrera un historien de la douleur est la profonde transformation subie par la relation de la douleur aux autres maux dont l’homme peut souffrir. La douleur a changé de position par rapport au chagrin, à la culpabilité, au péché, à l’angoisse, à la peur, à la faim, à l’infirmité. De nouvelles catégories de maux sont apparues telles l’anomalie, l’aliénation, la dépression, l’invalidité. Le sens fort dans lequel le mot « douleur » est employé couramment dans une salle d’opération désigne quelque chose qui n’avait pas de nom spécial pour les générations précédentes. Le mot est médicalisé par son emploi professionnel et se réduit à la désignation de cette partie de la souffrance sur laquelle le médecin peut affirmer sa compétence ou son contrôle.

Une histoire de l’évolution de la douleur médicalisée butera donc d’emblée sur un problème sémantique. L’objet technique que la médecine contemporaine désigne par le mot « douleur », même aujourd’hui, n’a pas d’équivalent simple dans le discours ordinaire. Dans la plupart des langues occidentales, le terme annexé par les médecins recouvre entre autres le chagrin, la tristesse, l’affliction, l’anxiété, la honte et la culpabilité. Si l’anglais pain et l’allemand Schmerz ont un sens corporel précis mais non exclusif, en revanche la plupart des synonymes indo-germaniques couvrent un champ sémantique bien plus vaste [227]. La douleur corporelle est nommée avec des termes qui désignent aussi le « travail pénible », l’« épreuve », l’« amertume », la « torture », l’« endurance », la « punition », l’« agonie » ou, plus généralement, la « tribulation » et l’« affliction », et signifient en plus « maladie », « malaise », « fatigue », « faim », « deuil », « blessure », « détresse », « tristesse », « trouble », « confusion », « oppression ».

Cette litanie est loin d’être complète ; elle montre que le langage peut distinguer plusieurs sortes de « maux » ayant tous un reflet ou une origine corporelle. La proximité de la douleur et du « mal » est particulièrement évidente en français. Elle se révèle dans l’entretien clinique, quand, à la question du médecin sur la « douleur » qui l’amène, le patient montre sa jambe et dit : « J’ai mal là. » D’autre part, le français sait distinguer le mal de la souffrance. On peut souffrir dans toute sa chair sans « avoir mal » nulle part. C’est une distinction qui trouve son équivalent en allemand mais elle n’admet aucune traduction directe en anglais.

L’institutionnalisation industrielle des valeurs se reflète dans le langage. Elle change le poids des mots qui désignent les maux et de ceux qui désignent l’expérience personnelle du mal. Les termes dans lesquels le médecin explique aux infirmières la nature de la douleur gagnent en précision objective et les termes à référence subjective dans lesquels le patient s’efforce de saisir sa douleur se vident et perdent leur pouvoir de communication. Le même mot peut subir une double transformation : il peut prendre un sens plus fort quand il est employé comme terme technique et en même temps s’affaiblir comme expression du langage ordinaire.

Un second obstacle à une histoire de la douleur est son statut exceptionnel, axiologique et épistémologique. La douleur spécifiquement corporelle constitue un cas extrême par rapport à tout autre jugement de valeur et à tout autre objet de la connaissance. La douleur personnelle est sui generis à la fois en tant que valeur négative et en tant qu’expérience. Cette place extrême de la douleur dans la condition humaine est à la racine d’une double impasse du discours sur la douleur. Elle est également à la base de cette lacune des recherches que je déplore. Plus on est saisi par la douleur corporelle, plus sont oblitérées toute distance, toute perspective et toute lumière.

La douleur corporelle constitue une valeur négative propre au sujet qui l’éprouve, et elle se distingue nettement de toute autre valeur négative soit extérieure, soit organique. Robert Hartman [228] donne une illustration de cette distinction. Intuitivement, je perçois une nette différence dans les réponses que je fais : à quelqu’un qui me dit qu’il souffre et ainsi engage ma compassion, aux malades qui l’entourent, dont on me dit qu’ils souffrent et qui ainsi éveillent ma sympathie, enfin devant un cas clinique de migraine, qui provoque ma curiosité scientifique. C’est l’expérience intrinsèque et personnelle désignée dans le premier cas par l’expression

« ma douleur » qui a échappé à toute étude historique. Aussi bien s’agit-il d’un concept qui semble, à première vue, éminemment dépourvu de dimension historique.

La douleur en tant que valeur négative intrinsèque désigne l’expérience qui abolit la discontinuité entre l’organisme et son environnement, l’expérience dans laquelle la réponse éclipse totalement le stimulus, la persistance pénible de la subjectivité sans référence à un but ou à un objet [229]. La douleur dans ce sens désigne une expérience effrayante, précisément parce qu’elle échappe à tout effort pour l’intégrer à une catégorie. Deux personnes qui comparent leurs migraines à l’aide d’une référence verbale qui ne peut que leur rester extrinsèque savent que la « douleur » intrinsèque échappe à la comparaison. Plus encore, elles savent que cette douleur reste inaccessible au terme qui la désigne cliniquement. À propos de cette espèce exceptionnelle de valeur négative qu’est la douleur intrinsèque, il existe une espèce exceptionnelle de certitude. Valeur négative incommunicable, cette valeur est également indéniable. À la différence d’autres maux, elle n’admet pas la distinction entre la cause nocive et l’expérience pénible : l’anéantissement de cet écart la distingue des autres atteintes à l’équilibre physiologique. La certitude de cette douleur laisse l’homme dans la solitude de son expérience.

Paradoxalement, malgré l’impossibilité de communiquer la douleur corporelle propre, la certitude de son existence chez l’autre est également d’un type exceptionnel. Selon Wittgenstein, cette perception de la douleur chez autrui se fonde sur la compassion que je ressens pour lui. Plus ma compassion est profonde, plus est profonde la certitude que j’éprouve de sa douleur et de l’entière solitude de l’autre dans ce qu’il ressent [230]. Toujours suivant Wittgenstein, la certitude que l’autre est capable de cette expérience précède l’assurance qu’il est humain. Même le prisonnier n’arrive pas à se convaincre que son bourreau ne ressent aucune compassion envers lui.

Ces quelques digressions d’ordre sémantique, axiologique et épistémologique m’ont paru nécessaires pour justifier un traitement historique de la douleur corporelle. J’ai cru nécessaire d’indiquer de façon sommaire comment cette expérience d’une extrême intimité peut avoir une histoire. Il me semble que la médicalisation progressive du langage de la douleur, de la réponse à la douleur et du diagnostic de la souffrance est en train de déterminer des conditions sociales qui paralysent la capacité personnelle de « souffrir » la douleur.

Quand j’éprouve une douleur, je suis toujours conscient du fait qu’une question se pose. Dans l’étude de l’histoire de la douleur, le mieux est de se concentrer sur l’évolution de cette question. Que la douleur soit la mienne ou celle d’un autre, une interrogation s’inscrit dans sa perception. La question qu’elle suscite est un aspect aussi essentiel de la douleur que son intimité et sa solitude. La douleur est expérimentée comme signe d’une carence de raison, de perspective, de référence, de présence. Qu’est-ce qui ne va pas ? Combien de temps encore ? Pourquoi faut-il… pourquoi dois-je… pourquoi puis-je être victime de cette douleur ? Tout observateur scientifique qui se fermerait à cet aspect référentiel de la douleur ne verrait plus que réflexes ou réactions instinctives. Il n’étudierait que ce qu’il y a de cobaye en l’homme. Tout médecin sincère sait que, tout en restant sourd à la question inscrite dans la plainte du patient, il peut reconnaître des symptômes spécifiques, mais alors il ne comprend rien à la souffrance du patient. Malheureusement, le développement de la faculté d’objectivation de la douleur est un des résultats de la formation scientifique des médecins. Leurs études les incitent à concentrer leur attention sur les aspects de la douleur qui peuvent être étudiés expérimentalement – de préférence sur l’homme et sur le cobaye – et qui peuvent être pris en main par un agent extérieur, comme la stimulation nerveuse périphérique, la transmission de l’influx, la réaction au stimulus et son conditionnement par le contrôle pharmacologique et clinique du patient. L’acte médical se réduit alors à une intervention mécanique [231].

Communément, on utilise des animaux pour tester les effets antalgiques de produits pharmaceutiques ou d’interventions chirurgicales, et les observations faites sur les souris, et plus rarement sur les singes, sont ensuite vérifiées sur l’homme. Tant que les gens sont examinés dans des conditions expérimentales très semblables à celles dans lesquelles on teste les animaux, les mêmes interventions calmantes donnent des résultats plus ou moins comparables. Mais, le plus souvent, lorsqu’il s’agit d’appliquer les mêmes méthodes à des gens qui « souffrent vraiment », on ne retrouve plus du tout les effets que l’on avait obtenus en situation expérimentale. C’est uniquement lorsque la faculté de souffrir, d’accepter la douleur, a été émoussée qu’une intervention analgésique a l’effet prévu. Dans ce sens, la gérance de la douleur présuppose la médicalisation de la souffrance.

Vivant dans une société qui valorise l’anesthésie, le médecin et son client apprennent tous les deux à étouffer l’interrogation inhérente à toute douleur. Cette interrogation est transmuée en une vague anxiété que l’on peut facilement réduire et dissoudre au moyen d’opiacés. Les patients apprennent à concevoir leur propre douleur comme un fait clinique objectif qu’on peut soumettre à un traitement standardisé. En réponse à certains traitements, le patient devient capable de végéter avec sa douleur sans pouvoir en souffrir : il la regarde comme on regarde un poisson à travers le cristal de l’aquarium. Des patients lobotomisés offrent l’exemple extrême de cette aliénation de la douleur. L’atteinte portée aux capacités supérieures ramène le subi de la douleur à une simple gêne physique à laquelle s’applique une dénomination clinique.

Une douleur vécue ne constitue une souffrance que si elle est intégrée à une culture. C’est précisément parce que la culture fournit un cadre qui permet d’organiser le vécu qu’elle est une condition indispensable au développement de l’art de la souffrance. La culture donne à toute douleur la forme d’une interrogation qui peut être exprimée et partagée ; elle fournit des éléments pour véhiculer la douleur, les sons, les mots et les gestes qui soulagent en permettant la communication. Elle fournit également la syntaxe pour que l’expression de la douleur puisse prendre corps dans un discours qui relie la victime à son milieu. Enfin la culture fournit les mythes qui expliquent l’existence de la douleur : Kismet, karma ou purification du péché ; ou encore vengeance, punition ou envie du voisin doué d’un mauvais œil. Dans une certaine perspective, on pourrait dire que chaque culture représente un art particulier de souffrir.

C’est certainement dans la Grèce ancienne qu’il faut chercher une des sources de l’attitude européenne en face de la douleur. Le bonheur ne pouvait se concevoir séparé de la peine, pas plus qu’une vie intense sans une sanction tragique. L’homme, dans son corps, faisait partie d’un univers en agonie permanente, et l’âme sensible – dont parle Aristote – était complètement coextensive à ce corps. Dans ce contexte, il n’y a pas de place pour la distinction, si chère à notre époque, entre le sens et l’expérience de la douleur. L’âme n’avait pas encore divorcé du corps, ni la douleur de la blessure. Tous les mots grecs qui désignaient une douleur du corps pouvaient s’appliquer également aux peines de l’âme.

Les élèves d’Hippocrate distinguaient de nombreuses catégories de disharmonie, chacune d’elles provoquant un type particulier de douleur. Pour eux, la douleur était un outil au service du diagnostic scientifique. Elle révélait au médecin quelle sorte d’harmonie devait retrouver le patient. Le traitement visait le rétablissement de l’harmonie. En cours de traitement, la douleur pouvait bien disparaître, mais ce n’était pas là l’objectif primordial de l’intervention médicale. L’anesthésie médicale, qu’il faut distinguer du soulagement recherché dans la prière, le vin ou les alcaloïdes accessibles, était, de façon surprenante, absente de la pratique médicale.

La pensée grecque tient que l’homme est une victime du mal et aussi que ce mal se manifeste dans la douleur du corps, mais en dépit du haut développement de la technique médicale le but du médecin n’était jamais le soulagement de la douleur mais plutôt la restitution de l’équilibre. Nous n’avons alors aucun indice d’une médicalisation de la douleur.

Une seconde source des attitudes européennes envers la douleur se trouve dans la Bible. Pour le Juif la douleur est un mal tout court, qu’elle soit ou non l’instrument du châtiment divin [232].

Si l’art grec de souffrir culminait dans la plainte tragique, l’art hébreu choisit le style de la protestation souvent élégiaque qui va jusqu’à la contestation personnelle des desseins de Dieu. L’Ancien Testament parle de la douleur avec une telle richesse de nuances que les traducteurs de la Bible, au IIe siècle avant Jésus-Christ, se virent obligés de rendre treize mots hébreux différents par un seul mot grec signifiant « douleur » [233]. Dans leur majorité, les mots juifs désignant l’expérience du mal étaient enracinés profondément dans le corps, chaque mot impliquant l’affection d’un organe spécifique. Mais ces organes étaient conçus chacun comme le siège d’une émotion particulière et, malgré cette richesse des renvois à l’expérience corporelle, la catégorie médicale moderne de « douleur physique » était totalement étrangère au texte hébreu.

Dans le Nouveau Testament, la douleur reste, dans la ligne de l’Ancien, un mal d’autant plus redoutable qu’il est jumelé d’une façon nouvelle et intime avec le péché et qu’il contraste avec la bonté de Dieu qui se révèle avec un nouvel éclat. Le Grec avait vu la douleur comme l’ombre du bonheur et du plaisir, pour le chrétien elle devient l’ombre de sa rédemption, donc condition d’une nouvelle joie. La douleur du crucifié devient le gage du salut. Si l’homme-Dieu s’est soumis à elle, pour le croyant elle est plus que jamais inéluctable. En même temps l’inévitabilité de la douleur se transforme, dans la doctrine de la politique chrétienne, en devoir de souffrir et en instrument sans précédent de répression. On ne peut pas comprendre le phénomène occidental de lutte institutionnelle médicale contre la douleur sans voir en elle une réaction à l’utilisation politique d’un prétendu devoir de souffrir dans l’Occident chrétien.

Pour les néoplatoniciens, la douleur apparaissait comme le résultat de quelque déficience des hiérarchies célestes. Pour les manichéens, c’était le résultat de la méchanceté d’un démiurge, architecte maléfique de l’univers. Pour les chrétiens, elle est le résultat de la perte de l’intégrité originelle due au péché d’Adam. Mais peu importe la propension des sectes à se jeter mutuellement l’anathème : pour toutes, la douleur avait le goût amer d’un mal cosmique. Qu’elles aient considéré la douleur comme la manifestation d’une faiblesse de la nature, d’une volonté perverse ou d’un châtiment juste, toutes ces idéologies servaient à justifier et à soutenir la souffrance consciente d’un mal inévitable. Cette attitude envers la douleur est une caractéristique distinctive commune aux cultures méditerranéennes postclassiques jusqu’au milieu du XVIIe siècle. Comme un alchimiste l’a dit au XVIe siècle, la douleur est « la teinture amère ajoutée à la pétillante infusion de la semence du monde ». Dès sa naissance, chacun était appelé à apprendre l’art de souffrir dans cette vallée de larmes. Cette vision, commune aux traditions et aux spiritualités opposées, distingue l’Europe de l’Asie, elle est le résultat d’une rencontre complexe de courants, et ce serait une solution de facilité de ne reconnaître en elle que la contribution du message chrétien.

Pour l’homme chrétien, la douleur est une prise de conscience du goût amer de la réalité. Les religions se bornaient à préciser son origine. Pour Plotin, l’amertume de la réalité provenait d’un manque d’harmonie, pour les cathares d’une défiguration, pour les chrétiens d’une blessure dont l’homme est tenu pour responsable. Selon sa religion et ses modèles, l’individu faisait face au mal en le défiant, en accueillant l’occasion de se purifier, en acceptant de faire pénitence, en s’unissant mystiquement au sacrifice du Christ, en tolérant l’inévitable à contrecœur ou en cherchant à lui échapper, à l’éviter ou à l’adoucir : le pèlerinage pour retrouver la santé ainsi que l’usage des stupéfiants et de l’alcool ont toujours existé. Une seule approche de la douleur était cependant impensable : celle qui vise à la faire disparaître.

Il y a trois raisons qui expliquent pourquoi cette approche analgésique est restée étrangère à toutes les civilisations européennes. Premièrement, la douleur n’était rien d’autre que la manifestation chez l’homme d’un univers imparfait : elle n’était jamais conçue comme une simple dysfonction mécanique de l’un de ses sous-systèmes. La signification de la douleur était cosmique et mythique, et non individuelle et technique. Deuxièmement, la douleur était intrinsèque à la nature. Le médecin qui aurait voulu éliminer la douleur aurait dénaturé son patient. Finalement, la douleur était conçue comme une expérience de l’âme, mais d’une âme qui était présente dans le corps tout entier. Il ne pouvait exister un mal, source de la douleur, qui se distinguât du mal qu’était la douleur elle-même. Vouloir l’éliminer aurait équivalu à l’élimination du patient.

La lutte contre la douleur ne commença que lorsque Descartes eut séparé le corps de l’âme. Il bâtit un modèle du corps en termes de géométrie, de mécanique ou d’horlogerie, semblable à une machine qui pourrait être réparée par un ingénieur. Le corps devint un appareil possédé et dirigé par l’âme, mais depuis une distance quasi infinie. La « chair » (que l’allemand peut désigner encore plus précisément par le mot Leib) fut réduite à un corps inerte que l’âme pouvait diriger.

Pour Descartes, la douleur est un signal, transmis à l’âme, d’une autodéfense grâce à laquelle le corps protège son intégrité mécanique. La douleur devient une consigne utile dans le cadre d’un processus d’apprentissage. À travers elle, l’âme apprend comment éviter des dommages plus graves au corps. Leibniz résume la nouvelle perspective didactique en parlant du grand ingénieur de l’univers qui a confectionné l’homme de la façon la plus parfaite possible, et qui n’a pu inventer de meilleur dispositif pour sa conservation que de lui fournir un sens de la douleur [234].

À la fin du XIXe siècle, la douleur s’était émancipée de tout référentiel explicitement métaphysique : elle pouvait être discutée en tant que régulateur des fonctions physiologiques [235]. Charles Richet l’analyse comme un phénomène physiologique souverainement utile, sans se poser de questions sur son traitement ou sa valeur diagnostique. La recherche expérimentale sur la douleur ayant pour but la thérapie analgésique présupposait cette démystification préalable.

Le virage de la médecine vers l’analgésie s’inscrit à l’intérieur d’une réévaluation idéologique de la douleur qui se reflète dans toutes les institutions contemporaines. La douleur et son élimination par sa prise en charge institutionnelle ont acquis une place centrale dans l’angoisse de notre temps. Le progrès de la civilisation devient synonyme de réduction du volume total de la souffrance. La nouvelle sensibilité s’inquiète du monde tel qu’il est, non pas parce qu’il est rempli de péchés, parce qu’il manque de lumière, parce qu’il est menacé par la barbarie – elle s’exaspère parce que le monde est rempli de douleurs. Sous la pression de cette nouvelle sensibilité à la douleur, la politique tend à être conçue comme une entreprise destinée moins à maximiser le bonheur qu’à minimiser la souffrance [236]. Elle devient l’activité directrice d’une série d’entreprises, chacune produisant le remède à un mal : l’ignorance, l’immobilité et, avant tout, la douleur. La douleur en arrive à être vue d’abord comme la condition des hommes que la corporation médicale n’a pas fait profiter de sa boîte à outils. L’idée que l’art de souffrir est une réponse alternative et complémentaire à la consommation analgésique acquiert une tonalité littéralement obscène.

Dans une société dominée par l’analgésie, il semble rationnel de fuir la douleur, littéralement, à tout prix, plutôt que de lui faire front. Il semble raisonnable de supprimer la douleur, même si cela supprime la fantaisie, la liberté ou la conscience. Il semble raisonnable de se libérer des contraintes imposées par la douleur, même si cela coûte la perte de l’indépendance. Au fur et à mesure que l’analgésie domine, le comportement et la consommation font décliner toute capacité de faire face à la douleur, indice de capacité de vivre. En même temps, la faculté de jouir des plaisirs simples et des stimulants faibles décroît. Il faut des stimulants de plus en plus puissants aux gens qui vivent dans une société anesthésiée pour avoir l’impression qu’ils sont vivants. Le bruit, les chocs, les courses, la drogue, la violence et l’horreur restent quelquefois les seuls stimulants encore capables de susciter une expérience de soi. Dans son paroxysme, une société analgésique accroît la demande de stimulations douloureuses.

Aujourd’hui, il est devenu extrêmement difficile de reconnaître que la capacité de souffrir peut constituer un signe de bonne santé, dès lors que sa suppression institutionnelle incarne l’utopie technique directrice d’une société. Le consommateur, voué aux trois idoles de l’anesthésie, de la suppression de l’angoisse et de la gérance de ses sensations, rejette l’idée que, dans la plupart des cas, il affronterait sa peine avec beaucoup plus de profit s’il la contrôlait lui-même. Le souvenir des autres, des pauvres, des « sous-développés » et des gens d’autrefois, dont la douleur n’est pas gérée systématiquement, crispe l’« antalgomane » en lui rappelant sa propre impuissance à nouer des relations intimes avec son milieu. Par là s’explique le rejet entêté de toute valorisation positive de la douleur et l’acharnement à interpréter une telle valorisation comme le résultat, soit d’une tendance sadomasochiste, soit d’une idéologie façonnée par un dolorisme pseudo- chrétien. Dans une société où le ministère de la Santé se charge de toute gestion administrative légitime des peines, on considère comme subversif celui qui suggère le droit des gens aux conditions culturelles et politiques dans lesquelles ils peuvent contrôler leurs douleurs inévitables et en même temps accéder aux sédatifs, narcotiques, anesthésiants et même au poison, sous leur propre responsabilité.

À la limite, on pourrait illustrer l’incompréhension de nos contemporains pour la distinction entre souffrance autonome et souffrance hétéronome par la mentalité qui se manifeste dans la controverse médico-juridique sur le « droit » à l’euthanasie. La presque totalité des intervenants supposent que le raccourcissement ou la fin de la vie humaine implique inévitablement un acte médical. Dès lors, ils doivent affronter la question de savoir dans quelle mesure le médecin peut assumer les fonctions de bourreau. L’idée qu’un homme sain est capable de disposer de sa vie, et en particulier de l’achever sans avoir recours à l’Église ou à l’hôpital, semble une idée scandaleuse à la plupart des avocats de l’euthanasie. Bien souvent, ces gens-là revendiquent le monopole professionnel de l’exécution du patient, lequel est obligé, de plus en plus, de vivre dans une société qui pousse ses membres au suicide et le leur rend inaccessible.

Poussées à leurs limites, la manipulation de la douleur et l’expropriation professionnelle de la souffrance pourraient substituer un nouveau type d’horreur au mal au sein duquel a toujours évolué l’être humain : le cauchemar éveillé en face d’un réel aussi pénible que hors d’atteinte. Peut- être le terme « schizo-algie » conviendrait-il pour dénommer ce symptôme de la surmédicalisation, particulièrement lorsque celle-ci devient une condition de survie dans un milieu industriel qui s’est grotesquement distordu et qui échappe à l’échelle humaine. Le cri de désespoir et le geste de révolte sont étranglés à leur source.

Robert Lifton a étudié le comportement des rescapés qui se trouvèrent près du « point zéro » de la bombe d’Hiroshima [237], entourés d’une foule d’agonisants. Il a découvert chez les survivants un état de fermeture émotionnelle, une paralysie du sentiment et une rupture de tout contact avec leur propre douleur. Vingt ans plus tard, quand Lifton a fait son enquête, le souvenir de cette anesthésie traumatisait encore les rescapés. Selon Lifton, il se manifeste par une profonde culpabilité ou honte d’avoir survécu sans avoir fait l’expérience d’une douleur quelconque au moment de l’explosion. La blessure qu’ils n’ont pas pu assumer dans la souffrance s’est installée chez eux comme un état pathologique chronique. Ils ont été possédés par une peine monstrueuse, précisément parce qu’elle a dépassé leur capacité de déceler en elle la moindre interrogation.

Il me semble que la schizo-algie produite par l’atrocité écologique de la bombe atomique ou, à un autre niveau, par le milieu industriel peut être engendrée également par la destruction iatrogène du pouvoir de souffrir. La gestion technique de la douleur, qui l’émousse et finalement l’exproprie, peut engendrer une horreur résiduelle qui échappe à toute emprise de la part d’un individu stupéfait, ainsi qu’aux traitements ultérieurs. Ce cauchemar éveillé du spectateur figé, impassible en face de sa propre déchéance, n’a plus rien de commun avec le cri d’angoisse, le blasphème ou la folie traditionnels de l’individu au moment où la trame de sa souffrance est déchirée par l’intolérable [238]. Aider cet homme en crise à retrouver sa façon de poursuivre sa vie ou de se préparer à la mort est d’ailleurs une tâche pour laquelle les techniques analgésiques, psycholeptiques et neurologiques auront à offrir des interventions dont l’application optimale dépendra de la disponibilité d’un technicien.

Le progrès de la technique physiologique et biomédicale ne favorise la santé que dans la mesure où il étend la responsabilité des souffrants. L’homme moderne a droit à un savoir moderne sur les bienfaits et les dangers des drogues et autres procédés qui altèrent les sensations ; il a droit à l’usage autonome des moyens techniques modernes qui lui permettent de donner une nouvelle dimension technique à son acte de souffrance dans un milieu culturellement appauvri ; ce n’est que dans de rares circonstances qu’il aura recours à l’acte médical, et alors le droit aux services du neurochirurgien comme à l’opium ou à l’acupuncteur doit être égal pour tous et l’initiative de leur usage doit rester au malade.

Notes

[214] Voir Alfred Schutz, « Some equivocations in the notion of responsability », in Collected Papers. II : Studies in Social Theory, La Haye, Nijhoff, 1964, p. 174-276 : pour la distinction d’une responsabilité de et d’une responsabilité envers.

[215] Michel Foucault et les membres du GIS (Groupe information santé), « Médecine et lutte de classes », La Nef, « Vers une antimédecine ?», Paris, Taillandier, cahier n° 49, 29e année, octobre-décembre 1972, p. 67-73.

[216] Thomas S. Szasz, Pain and Pleasure, New York, Basic Books (Londres, Tavistock), 1957.

[217] Grantly Dick-Read, Childbirth Without Fear, Dell Paperback, 1962 (orig. 1944).

[218] Leonhard M. Weber, « Grenzfragen der Medizin und Moral », in Gott in Welt. Festgabe für Karl Rahner, t. II, 1964, p. 693-723 ; Steven Brena, Pain and Religion : A Psychophysiological Study, C.C. Thomas, 1972 ; Convegni del Centro di Studi Sulla Spiritualita Medievale, Il dolore e la morte nella spiritualita, secoli XII-XIII, OH 7-10 1962, Todi, Acad. Tudealina, 1967.

[219] Henry Beecher, Measurement of Subjective Responses : Quantitative Effects of Drugs, New York, Oxford Univ. Press, 1959. Harris Hill et al., « Studies on anxiety associated with anticipation of pain. I : Effects of morphine ». Archives of Neurology and Psychiatry, 1952, 67, p. 612-619.

[220] Thomas S. Szasz, « The psychology of persistent pain. A portrait of l’“homme douloureux”», in Soulairac, Cahn et Charpentier, Pain, 1968, p. 93-113.

[221] Harold G. Wolff et Stewart Wolff, Pain, 2e éd., American Lecture Physiology series, C.C. Thomas, 1958 ; Benjamin L. Crue, Jr., Pain and Suffering. Selected Aspects, C.C. Thomas, 1970.

[222] Pour la bibliographie sur la « mesure » médicale de la douleur, voir H.K. Beecher, « The measurement of pain », Pharmacological Reviews, 9, 1957, p. 59 ; W. Noordenbos, Pain : Problems Pertaining to the Transmission of Nerve Impulses which Give Rise to Pain, New York, Elsevier Publishing Co., 1959 ; H. Merksey et F.G. Spear, Pain : Psychological and Psychiatric Aspects, Londres, Bailliere, Tindall and Cassel, 1967.

[223] Richard Toellner, « Die Umbewertung des Schmerzes im 17. Jahrhundert in ihren Vorraussetzungen und Folgen », Med. Historisches Journal, 6, 1971. – Ferdinand Sauerbruch et Hans Wenke, Wesen und Bedeutung des Schmerzes, Berlin, Junker und Dünnhaupt, 1936. – Thomas Keys, History of Surgical Anesthesia, éd. rev., New York, Dover, 1963.

[224] A. Souques, « La douleur dans les livres hippocratiques. Diagnostics rétrospectifs », Bull. Soc. Franc. Hist. Med., 1937, 31, p. 209-244 et 279-309 ; 1938, 32, p. 178-186 ; 1939, 33, p. 37-48 et 131-144 ; 1940, 34, p. 53-59 et 78-93.

[225] Kenneth D. Keele, Anatomies of Pain, C.C. Thomas, 1957. – H. Buddensieg, Leid und Schmerz als Schöpfermacht, Heidelberg, 1956.

[226] Frederick Jacobus Johannes Buytendijk, De la douleur, Paris, PUF, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1951. – Victor E. von Gebsattel, Imago hominis. Beiträge zu einer personalen Anthropologie, 2, Aufl. Otto Müller, Salzburg.

[227] Carl Darling Buck, A Dictionary of Selected Synonyms in the Principal Indo-European Languages. A Contribution to the History of Ideas, Chicago/Londres, Univ. of Chicago Press, 1949 ; pain-suffering 16.31 ; grief-sorrow 16.32 ; emotion-feeling 16.12 ; passion 16.13.

[228] Robert S. Hartman, The Structure of Value : Foundations of Scientific Axiology, Carbondale, Southern Illinois Univ. Press, 1967.

[229] David Bakan, Disease, Pain and Sacrifice. Toward a Psychology of Suffering, Chicago, Beacon Press, 1968.

[230] Ludwig Wittgenstein, Philosophical Investigations, Oxford, 1953, p. 88 sq.

[231] A. Soulairac, J. Cahn et J. Charpentier, éd., Pain, Proceedings of the International Symposium organized by the Laboratory of Psychophysiology, Faculty of Sciences, Paris, 11-13 avril 1967, p. 119-230. Voir aussi l’article de Soulairac dans Le Monde du 18 décembre 1974, p. 19.

[232] Immanuel Jakobovitz, « Attitude to pain », in Jewish Medical Ethics, New York, Bloch Publ. Go., 1967, p. 103.

[233] Pour une étude du traitement de la douleur corporelle et de la souffrance : Gerhard Kittel, Theologisches Wörterbuch zum Neuen Testament, Stuttgart, 1933. Voir les articles suivants : Bultmann, « Lype » ; Stahlin, « Asthenés » ; Michaelis, « Pascho » ; Oepke, « Nosos ».

[234] Gottfried Wilhelm Leibniz, Essais de théodicée sur la bonté de Dieu, la liberté de l’homme et l’origine du mal, Paris, Garnier-Flammarion, 1969.

[235] Charles Richet, « Douleur », in Dictionnaire de physiologie, vol. V, Paris, Félix Alcan, 1902, p. 173-193.

[236] Kenneth Minogue, The Liberal Mind, Londres, Methuen, 1963.

[237] Robert Lifton, Death in Life-Survivors of Hiroshima, New York. Random House, 1969.

[238] Terence E. Des Prés, « Survivors and the will to bear witness », extrait d’un livre à paraître : The Survivor, Oxford Univ. Press, Social Research, vol. XL, n° 4, hiver 1973, p. 668-690.

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Une réponse à Ivan Illich : « L’aliénation de la douleur »

  1. Hamm dit :

    Passionnant !Merci à vous de partager, une fois de plus, ces réflexions.

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