Psychanalyse (Joël Bernat)

La psychanalyse est une méthode et une technique de traitement des névroses, inventée en 1896 par Sigmund Freud, neurologue viennois (Autriche).

Cette invention est née de la pratique clinique selon une double influence : d’une part, les échecs thérapeutiques de l’hypnose puis de la méthode cathartique de Joseph Breuer, et, d’autre part, l’expérience acquise avec les cures de patientes hystériques (jusqu’alors incurables et internées). Suite à plusieurs élaborations et mutations de cette technique, c’est à partir de 1920 que Freud définira désormais la psychanalyse selon le trépied suivant :

1 : en premier lieu, la psychanalyse est un procédé d’investigation des processus psychiques inconscients, inaccessibles par d’autres techniques. C’est l’expérience clinique qui fut la seule source de cette découverte (et non le recours à la notion d’inconscient qui existait depuis longtemps en philosophie) ; en effet, c’est en découvrant que les symptômes névrotiques résultent de problématiques sexuelles infantiles refoulées, c’est-à-dire devenues qualitativement inconscientes, que Freud est amené à penser l’existence d’un lieu psychique particulier, qu’il baptise en un premier temps : l’inconscient. Dès lors, le traitement vise à ramener à la conscience les éléments déterminants les troubles névrotiques, et ainsi, en la délier les symptômes ;

2 : la psychanalyse est donc une méthode de traitement, par l’accès à l’origine sexuelle refoulée de ces troubles et l’exploration des éléments inconscients. La méthode privilégie certaines formations psychiques facilitant cet accès, telles que le rêve (première « voie royale » d’accès à l’inconscient), les lapsus, actes manqués, etc., puis le transfert, découvert par la suite, le tout cadré par une règle, celle dite « de la libre association » qui, par le relâchement de la censure interne, favorise l’émergence d’éléments refoulés ;

3 : enfin, la psychanalyse produit une série de conceptions théoriques, acquises exclusivement par ces procédé et méthode, c’est-à-dire tirées de la seule expérience clinique. Dans la mesure où les acquis se retrouvent dans d’autres analyses, et sont confirmés par d’autres analystes, des éléments peuvent donc être progressivement affirmés, et fusionnés progressivement en une théorisation.

Ainsi la psychanalyse, au sens de Freud, est cet ensemble indissociable de trois éléments dans cet ordre précis : procédé / méthode / théorie. Car cet ordre répond à une exigence essentielle de Freud : « la psychanalyse n’est pas fille de la spéculation mais résultat de l’expérience ». Mais cela impose qu’elle est aussi, et n’est que, une science du fragment, position mainte fois rappelée par Freud, ceci afin d’écarter toute tentation de faire système, c’est-à-dire une pensée qui ne naîtrait pas de la pratique et qui viendrait gouverner et expliquer le Tout du monde.

Une autre conséquence de ce trépied : la psychanalyse ne peut pas être tronçonnée :

1 : en une seule technique, ce qui effacerait ses fondements scientifiques et culturels ; et elle deviendrait ainsi un sous-ensemble de la psychiatrie ou de la médecine, une psychothérapie de plus, ce à quoi Freud était fortement opposé ;

2 : en une seule théorie applicable à tout, ayant opinion sur tout puisqu’elle est une science du fragmentaire : elle ne peut produire de système ni de primats, ce que son nom indique : analyser, au sens allemand ou grec, c’est défaire, détisser (par exemple, les symptômes) ;

3 : elle ne peut devenir la propriété des médecins ou des prêtres, de leurs visions du monde, ainsi que Freud le redoutait, et elle ne peut admettre aucune forme de croyance.

Enfin, une dernière remarque : une des résistances principales à la psychanalyse est liée à une des blessures narcissiques qu’elle produit en montrant que nous sommes gouvernés par des mécanismes et processus psychiques inconscients, et c’est en ce sens que la psychanalyse est en lien avec les sciences naturelles (et non pas celles de l’esprit) : pour exemple, l’affirmation freudienne qui pose que la fonction première de la psyché est de lutter contre toute stimulation. Cette liaison avec les sciences naturelles est aujourd’hui très contesté, et de même que l’on observe une tendance totalisante dans certaines conceptions psychanalytiques appliquées au monde.

Il est ainsi devenu délicat de dire « la » psychanalyse, là où, d’évidence, il y aurait bien « des » théories psychanalytiques…

Indications bibliographiques :

S. Freud, 1991, Sur l’histoire du mouvement psychanalytique (1914), Paris, Gallimard.

S. Freud, 1984, S. Freud présenté par lui-même (1924), Paris, Gallimard.

S. Freud, 1994, L‘avenir d’une illusion (1927), Œuvres complètes, tome XVIII, Paris, P.U.F.

S. Freud, 1994, Malaise dans la civilisation (1930), Œuvres complètes, tome XVIII, Paris, P.U.F.

S. Freud, 1984, Nouvelles conférences sur la psychanalyse (1932), Paris, Gallimard.

S. Freud, 1967, Abrégé de psychanalyse (1938), Paris, P.U.F.

 

Joël Bernat

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