Notre recherche consiste à retrouver, sous la partie visible des sciences cognitives, la partie invisible toujours active qui les fonde c’est-à-dire les nœuds liant à propos du cerveau-corps-esprit la médecine, la psychologie, la philosophie et la psychiatrie. Une certaine histoire philosophique de la psychologie voudrait imposer la thèse d’une indépendance de l’esprit par rapport au corps comme de la psychologie par rapport à la physiologie, la biologie, la neurologie ou encore la génétique. Pourtant l’étude des troubles neurologiques, des neuropathies du développement des cerveaux de l’enfant prématuré, des psychopathologies des affects et des lésions, dont le XIXe siècle avait constitué ces modèles, se poursuivent aujourd’hui pour maintenir l’interrogation sur la relation esprit-cerveau-corps.
« Pas de corps, jamais d’esprit »
A.R. Damasio, 1999,149.
« Nous avons deux corps,
le corps physique et le corps mental »
A.Berthoz, 2003,169.
La naturalisation du corps par la philosophie de l’esprit
L’expansion de la théorie de l’esprit dans la philosophie cognitive[1] a produit une domination du cognitivisme sans que le corps[2], sa nature, sa qualité et son activité, ne soit un principe de la connaissance. La philosophie de l’esprit[3] aura été le moyen de poursuivre l’étude de la conscience[4]. Si la philosophie de l’esprit est bien « une réflexion sur la possibilité d’une ontologie des phénomènes mentaux »[5], l’existence et la nature de ces phénomènes a pu définir une philosophie de la psychologie et une psychologie cognitive[6]. La philosophie de la psychologie ne se contente plus d’étudier l’intentionnalité du mental indépendamment du développement d’une théorie naturaliste : « les sciences cognitives visent à se constituer en tant que sciences naturelles de l’esprit »[7]. Le corps disparaît en tant que principe de la connaissance car sa réduction physicaliste et sa dividuation neurocognitive le décomposent en éléments naturels dont l’assemblage fera l’objet des différentes théories de l’esprit. La critique de The Concept of Mind par G. Ryle en 1949 au nom du béhaviorisme aura produit une philosophie de l’esprit[8]. L’interrogation ne porte plus sur l’examen du travail de l’entendement mais sur la description du fonctionnement de l’esprit dans ses traitements des données : contenus sensibles, objets matériels, universaux, propositions…Le corps ne devient au mieux qu’un pourvoyeur de données, sinon un obstacle dont il faut modéliser l’utilité.
L’étude des processus cognitifs s’effectue dans une science de l’esprit[9] qui utilisent une méthodologie psychologique rénovée, les résultats des sciences biologiques du système nerveux, les travaux de la linguistique et de la logique. L’hypothèse computo-représentationnelle suppose que les entités mentales transportent des informations soit grâce à la dynamique complexe des états du système nerveux central, soit grâce aux processus logiques au sens d’un calcul établi par A. Turing. Le cognitivisme satisfait à la naturalisation du corps[10] en affirmant : 1. Le mental a une nature matérielle au sein d’une conception moniste du monde ; 2. Mais le mental a une autonomie conceptuelle suffisante pour décrire la nature fonctionnelle de ses entités. Cette distinction habile, elle évite le dualisme, suffit à attribuer 1. aux neurosciences et 2. à une logique fonctionnaliste.
Le corps n’apparaît qu’à travers la question des qualia[11]. Exclusivement connu par une expérience strictement privée, le quale est l’effet d’une organisation matérielle du corps et du cerveau[12]. Bertrand Russell nous rappelle la différence entre les données physiques et les données psychologiques en distinguant le caractère privé du caractère public de la sensation[13]. B. Russell accorde à la psychologie le statut de science de l’esprit au nom d’une loi causale purement mentale. L’échec du manuscrit de 1913, selon l’opinion de L. Wittgenstein, ne doit pas occulter la tentative du monisme neutre comme la possibilité pour le corps d’être réintroduit par B. Russell dans la philosophie de l’esprit. Le monisme neutre est la théorie selon laquelle le mental et le physique « ne diffèrent par aucune propriété intrinsèque … mais seulement par leur disposition et leur contexte »[14]. Il poursuivra dans Analyse de l’esprit en 1921 une conciliation entre la tendance matérialiste de la psychologie et la tendance anti-matérialiste de la physique : en admettant l’interpénétration du physique et du psychique, B. Russell définit la sensation, à la différence de l’image, comme ce qui est commun aux mondes mental et physique[15]. The Analysis of Matter conserve, au sein d’un monisme neutre, aux propriétés physiques le principe d’inférence de l’état d’esprit à partir d’un état cérébral[16]. Le monisme neutre aura maintenu le corps dans une unité physique et mentale sans parvenir à décrire les modes de constitution matérielle des états mentaux.
Matière corporelle et philosophie de la pensée[17]
Pour éviter que cette naturalisation du corps ne conduise à une élimination ou à une analycité de ses qualia, D.M. Armstrong a repris le thème de la perception pour défendre un réalisme direct selon lequel « nos impressions sensorielles sont acquises à titre de croyances, et qu’elles correspondent ou non à la réalité physique »[18]. Le réalisme direct s’inscrit dans une théorie matérialiste de l’esprit dans laquelle la perception est une croyance vraie ou fausse acquise à partir de l’état du corps et de son environnement. Pourtant D.M. Armstrong admet une variété dans le type de sensation : il distingue les « bodily perception », les « bodily sensation » et les « bodily feelings », refusant à ces derniers une localisation particulière dans le corps[19]. Si le monde est bien « scanned » dans la perception, le passage de la vision à la perception, puis de la perception à l’introspection pose le problème des qualités secondaires par rapport aux qualités physiques[20].
De la matière à pensée[21] à la neurocognition du développement, la matière corporelle change de statut épistémologique : d’unité déterminée par le jeu machinal de l’homme neurona[22]l, la matière corporelle est source d’individuation épigénétique accordant ainsi à la pensée une activité adaptative du corps ; « ce sont les corps qui pensent » et « il n’y a pas de corps sans pensée »[23]. Ce remplacement de l’esprit par la pensée est le résultat du fonctionnalisme représentationnel[24] de J. Fodor le moyen de décrire un langage de la pensée qui évite les deux sortes de réductionnisme que sont le béhaviorisme logique et le matérialisme physiologique. L’affirmation d’un langage de la pensée sur le modèle de la computation[25] assurerait un modèle commun à tous les organismes, corps vivant ou machinal. En décrivant l’architecture de l’esprit comme une hiérarchie de fonctions et de système, « le degré du matérialisme dépend du degré d’identification des propriétés fonctionnelles aux propriétés physiques »[26]. Le corps, décrit à partir du modèle de la machine et de l’organisme, s’inscrit dans une Functional state identity theory : celle-ci ne serait pas réductionniste car l’identité des types garantirait une correspondance entre les états psychologique de l’organisme et les états réglés de la machine computationnelle[27]. En établissant sa classification fonctionnelle, J. Fodor place le corps au rang de systèmes périphériques fournissant l’information aux systèmes centraux par le moyen des transducteurs : les modalités[28] sensorielle et perceptuelle ne relèvent pas des propriétés des processus cognitifs centraux, car le corps ne pense pas ; s’ « il doit forcément exister des tâches que l’esprit ne peut pas accomplir »[29], l’existence de limitations innées de nos capacités mentales interdit d’attribuer au corps un statut autre que périphérique. Ni déterminisme inné, ni empirisme, la psychologie computationnelle limite, elle a pu être décrite comme celle de l’ esprit mécanique[30], l’insertion des propriétés sensationnelles à son « cloisonnement informationnel »[31] dans les mécanismes cognitifs des processus centraux.
Dans sa critique de la théorie empirique de l’esprit, Daniel Dennett voudrait évaluer la définition ontologique de l’esprit sans céder aux sirènes connectionnistes. Contre le spiritualisme et le dualisme des substances, D. Dennett défend d’abord la thèse de la corrélation entre les énoncés du langage mental et les énoncés des sciences physiques[32] : en soulignant les normes de rationalité, D. Dennett traite tout objet comme un système intentionnel ; cette posture intentionnelle[33] est une stratégie qui attribue des croyances à des humains et des êtres artificiels ; ainsi toutes les opérations perceptives de la pensée et de l’action peuvent être décrites selon un modèle de versions multiples[34]. Sans discriminateur central, ni récit définitif, le vécu corporel du temps, de la conscience et de la perception est un flux parallèle de contenus mobiles. Le processus d’interprétation, d’inférence et de construction est incorporé au traitements même des informations, si bien que toute localisation cristallise après coup la mobilité cognitive[35].
L’esprit-cerveau[36]
Comme l’heuristique intentionnelle de D. Dennett, la grammaire du cerveau[37] est une méthodologie linguistique qui analyse les énoncés afin d’éviter leur confusion. Pour L. Wittgenstein, la première cause d’erreur du principe de localisation de la pensée est l’utilisation d’un raisonnement analogique qui nous fait croire en la réalité matérielle de la description métaphorique. Cette prise à la lettre de la métaphore est un effet de structure de la grammaire des mots de la langue : « La raison principale qui nous incline à localiser la pensée dans le cerveau est sans doute que nous utilisons, concurremment avec les termes “pensée” ou “penser”, les termes “parler”, « écrire” qui décrivent une activité corporelle, ce qui nous amène à considérer la pensée comme une activité analogue… Quand nous disons : « Le cerveau est le lieu où se situe la pensée », qu’est-ce donc que cela signifie ? Simplement que des processus physiologiques sont en corrélation avec la pensée, et que nous supposons que leur observation pourra nous permettre de découvrir des pensées… Cependant, si nous utilisons l’expression « le cerveau est le siège de la pensée », sachons bien qu’il s’agit là d’une hypothèse que seule l’observation de la pensée dans le cerveau serait à même de vérifier »[38]. A partir de l’analogie de penser avec, par exemple, parler dans leur fonction grammaticale, nous attribuons une même logique corporelle: comme « la bouche exprime la pensée », le cerveau exprime la pensée. Le recours à cette analogie corporelle procède à partir d’un schéma causal selon lequel le cerveau est l’agent opératoire de la pensée, son mécanisme intermédiaire. En affirmant que c’est l’esprit qui pense, en attribuant le “qui” au cerveau, la métaphore est remplacée par un argument localisateur fort, une sorte de réductionnisme voilé. Pour L. Wittgenstein la pensée est « une activité qui utilise des signes ». Et à cet égard il limite son projet à la compréhension de la structure et de la grammaire d’expression comme « le cerveau exprime la pensée ». Par l’analogie corporelle, le cerveau est considéré comme un organe matériel ; dans l’expression « siège de la pensée », le cerveau contient et matérialise l’état mental qui n’est qu’un autre nom de la réalité physiologique de l’état neuronal. Le risque de l’analogie corporelle est d’entériner l’hypothèse de la localisation sous le poids de réalisation de la métaphore. Car si le cerveau est le siège de la pensée, il n’y a plus à supposer l’existence d’états mentaux indépendants puisque l’explication neurophysiologique se présente comme la description causale de la réalité[39]. Le mot « siège » spatialise la pensée.
L’esprit-cerveau[40] voudrait éviter la critique grammaticale en introduisant des différences de degré entre les deux dimensions de l’activité cognitive. Même s’il reconnaît que le problème esprit-corps n’existe pas plus que le problème estomac-digestion, la thèse du réalisme intentionnel de J.R. Searle défend un double rapport selon lequel « les états mentaux sont à la fois causés par les opérations du cerveau et réalisés dans la structure du cerveau »[41] J. Searle précise : « Ma thèse est que les phénomènes mentaux sont biologiquement fondés : ils sont à la fois causés par les mécanismes cérébraux et réalisés dans la structure du cerveau. Dans cette perspective, la conscience et l’intentionalité relèvent de la biologie humaine au même titre que la digestion ou que la circulation sanguine. C’est un fait objectif du monde qu’il contient certains systèmes, à savoir les cerveaux, qui sont munis d’états mentaux subjectifs, et c’est un fait physique que pareils systèmes possèdent de traits mentaux. La solution correcte du « problème esprit-corps » ne consiste pas à nier la réalité des phénomènes mentaux mais à en apprécier correctement la nature biologique »[42]. Il ne faut pas se tromper sur la signification de ce rapprochement de l’intentionalité et du cerveau. J. Searle estime lui-même que son approche des phénomènes et des événements mentaux est réaliste, au sens où les phénomènes mentaux existent réellement. J. Searle accorde un degré de réalité aux états mentaux sans pour autant céder à la tentation de la matérialisation organique. Cette démarche nous importe car elle veut situer chaque niveau en lui assignant une place épistémologique précise.
Ce nouveau dualisme de description repose sur la distinction entre l’ordre physiologique et l’ordre mental. J. Searle établit des relations entre l’action intentionnelle et les mécanismes neurologiques :
« intention en action cause mouvements du corpscausent et réalisent causent et réalisentexcitations neuronales causent changements physiologiquesindividuelles…. Notons que, sur ce modèle comme sur le précédent, nous pourrions tirer des flèches diagonales qui montreraient ici que l’intention en action cause les changements physiologiques et que les excitations neuronales causent les mouvements du corps »[43].
L’intentionalité du cerveau serait causée par les excitations neuronales individuelles, mais la perception, l’action et tout état intentionnel posséderaient en contrepartie un contenu intentionnel sous un mode psychologique. La liaison cerveau-intentionalité fait partie des conditions de satisfaction de l’état intentionnel. J. Searle veut résoudre la fausse opposition du dualisme de réalité pour le concevoir à partir d’un naturalisme biologique. Ce type de dualisme, que nous appelons le dualisme de propriétés, n’indique pas pour autant une naturalisation de l’intentionalité.
Ainsi J. Searle reconnaît que certaines régions du cerveau servent spécifiquement à certains types d’expériences. Ce sont les réseaux et les cartes de l’activité cérébrale qui correspondent à cet argument. Toutes les entrées sensorielles se convertissent en un intermédiaire unique, l’influx nerveux, dont l’intensité peut varier selon la modalité de l’information reçue. Pourtant J. Searle maintient une différence entre le cerveau et l’esprit lorsqu’il définit ce dernier comme « des séquences de pensées, de sensations et d’expériences conscientes ou inconscientes qui ensemble, constituent notre vie mentale »[44]. Il dénonce le béhaviorisme, le fonctionnalisme et le physicalisme : ces systèmes philosophiques nient la possession intrinsèque des états mentaux conscients et subjectifs. Or la conscience est l’élément central de toute existence humaine parce qu’elle en fournit la signification. Sans elle l’univers n’aurait pas de sens, si bien que la question de l’action de l’esprit sur le corps reste pleine et entière : comment peut-on expliquer le passage d’une intention de lever le bras à la réalisation physique d’une action de levée de bras ? Comment un objet mental peut-il produire une action physique ?
Pour résoudre cette question, J. Searle affirme sa première thèse selon laquelle la pensée est à l’intérieur du cerveau : « Tous les phénomènes mentaux conscients ou inconscients, visuels ou auditifs – douleurs, excitations, démangeaisons, pensées, bref, toute notre vie mentale-, sont causés par des processus qui se produisent à l’intérieur du cerveau »[45]. La description neurophysiologique de la douleur, à partir des terminaisons des nerfs sensitifs jusqu’au cortex somato-sensitif, sert d’exemple à J. Searle pour expliquer la production des sensations. Mais pour éviter le réductionnisme, J. Searle doit ajouter à sa première thèse que les phénomènes mentaux sont des traits caractéristiques du cerveau : c’est-à-dire des déclinaisons matérielles du cerveau sont à l’œuvre pour donner une structure matérielle à l’esprit. Mais la compréhension des processus qui engendrent la conscience et les phénomènes mentaux ne sont compris que dans leur caractère général. J. Searle s’en tient là : ce serait confondre la microstructure et la macrostructure que de prendre le caractère général pour le détail fonctionnel. Ainsi les phénomènes qui sont causés par des processus biologiques sont en même temps matérialisés dans des processus biologiques. C’est le sens des phénomènes mentaux qui sont à l’intérieur du cerveau, pour autant qu’ils nécessitent des supports biologiques pour se réaliser. Ce qui n’est pas pour J. Searle le cas de l’intentionalité.
J. Searle en vient à proposer une différence de niveaux : « L’existence de deux niveaux réels au niveau de la causalité pour décrire le cerveau, un niveau des macro-propriétés des processus mentaux, un autre des micro-propriétés des processus neuronaux… La conscience, par exemple, est une propriété réelle du cerveau, qui peut causer des événements physiques… »[46]. L’esprit et le corps par le moyen du cerveau agissent l’un sur l’autre :
Niveau des macro-propriétés des processus mentaux Esprit Sémantique
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Niveau des micro-propriétés des processus neuronaux Corps Syntaxe
Mais si le cerveau est la cause de l’esprit, la syntaxe qu’il produit pour le fonctionnement ne suffit pas pour produire la sémantique. C’est le sens qui coupe les deux niveaux et y introduit une barre de séparation qui donne à la position de J. Searle la qualité de dualisme. Il ne s’agit pas d’une dualisme de substance dans la mesure où il décrit les phénomènes mentaux et du cerveau selon des différences de taille de propriétés. Mais l’esprit a un contenu mental dont l’aspect sémantique est séparé du niveau syntaxique des processus neuronaux qui, pourtant, le produit physiquement. L’explication neurophysiologique n’est donc pas incompatible avec l’interprétation psychologique qui permet au cognitivisme de développer une théorie interne sur les contenus mentaux à travers les représentations, les croyances et les jugements. La distinction s’effectue par les contenus qui ne sont pas le côté pile et le côté face d’une même pièce de monnaie. L’intentionalité constitue pour J. Searle cette causalité de certains types d’états mentaux. L’intention est une composante mentale qui « doit à la fois représenter et causer la composante physique »[47]. J. Searle maintient séparé les deux niveaux de propriétés.
Dans ces conditions la redécouverte de l’esprit critique la raison cognitive ne conduit jamais J.R. Searle à implanter dans le corps des phénomènes intrinsèquement intentionnels car les processus neurophysiologiques sont bruts et aveugles[48] ; l’anthropomorphisme nous fait attribuer au cerveau des qualités qu’il n’a pas. L’absence de contenu mental dans le cerveau interdit l’attribution au corps physique de tout processus mental, seul l’esprit est pensant, même si cette pensée est permise par l’activité neurophysiologique. Le cerveau est bien l’organe du mental dans sa capacité mnésique de l’information sensorielle. Vouloir résoudre le mystère de la conscience comme celui d’un problème biologique revalorise la question du corps : s’inspirant des travaux d’Israel Rosenfield[49], J.R. Searle reconnaît, sans adhérer à la thèse biophénoménologique, que le corps est central pour notre conscience : « Toute conscience n’est pas conscience du corps. Mais toute conscience commence avec l’expérience du corps par le biais de l’image du corps »[50].
De l’empirisme au physicalisme, la philosophie du corps
La philosophie du corps aura d’abord été un rejet du dualisme cartésien[51], et l’examen des théories physiques se nourrit toujours d’une prudente distinction méthodologique avec la philosophie de l’esprit[52]. C.D. Broad, analysant le problème traditionnel du corps et de l’esprit, indique combien sa résolution devrait placer par une théorie-centre[53] qui prenne en compte à la fois l’unité de l’esprit et la relation asymétrique de ses états mentaux avec les états corporels. Cette centralité du body-mind problem reconnaît un seul cerveau et deux réalités tout en se posant la question, sans réponse, esprit où es-tu ?[54]
Le premier Ruldolf Carnap, celui de La construction logique du monde (1928), avait su distinguer la tache de la physiologie, la question de la correspondance de chaque processus psychique avec un processus dans le système nerveux central, la tache de la psychophysique. Le passage du langage réaliste au langage constitutionnel décrit les énoncés du parcours parallèles des constituants entre la série psychique et la série physique ; la fiction du miroir cérébral maintient le parallélisme des énoncés[55].Dénonçant en 1969 les deux dogmes de l’empirisme, la division entre l’analytique et le synthétique, W.V.O.Quine assigne à l’épistémologie l’étude du sujet humain physique, comme phénomène naturel. Avec l’espoir de réaliser une épistémologie psychologiste non mentaliste[56] W.V.O. Quine retrouve son maître dans leurs analyses des énoncés : l’épistémologie naturalisée se fonde sur une ontologie physiologique plutôt que neurophysiologique[57].
En défendant la thèse du double aspect, le philosophe américain Thomas Nagel souligne le rôle de la nature du corps sur la description de l’esprit. En étudiant « Quel effet cela fait d’être une chauve-souris ? »[58], l’extrapolation sémantique de la constitution neurophysiologique d’une chauve-souris doit rester incomplète. Cette dissonance cognitive avec l’autre corps rappelle combien le caractère subjectif d’une expérience, refusé par Saul Kripke[59], est un critère de contingence dans la relation esprit-cerveau. Car, si une phénoménologie objective constituerait un idéal épistémologique, « votre corps, ou votre cerveau tout au moins, est … un objet qui possède des aspects physiques et des aspects mentaux »[60] ; le corps ne relève plus du physicalisme strict, car il produit un effet mental, effet dont la qualité est subjectivement différence de la production objective de sa cause physique ; une théorie unifiée du corps et de l’esprit pourrait, si elle était possible, décrire la conscience de manière purement physique. La subjectivité du corps humain est donc comprise par T. Nagel car le corps, comme le monde, n’est pas que physique en raison de ses aspects internes comme le prouve le sentiment de la douleur.
Wilfrid Sellars radicalise l’empirisme pour débarrasser la philosophie de l’esprit de l’idée afin de revaloriser le donné sensoriel sur le fondement d’une connaissance non inférentielle[61]. La perception sensorielle des contenus sensibles ouvre la possibilité épistémologique d’ une description directe des propriétés du corps.
Le remplacement du corps par le cerveau
Or le corps n’apparaît dans la philosophie de l’esprit[62] que pour dénoncer, avec raison, le matérialisme réductionniste de D. Armstrong et de Paul M. Churchland[63]. Le corps, sa complexité sensorielle, est remplacé par ce qui serait son organe principal, le cerveau : ce centralisme neurologique a pu conduire à l’élimination du corps sensible mais aussi à la recherche de nouveaux modèles pour inclure le corps dans le cerveau.
Ainsi « les spécialistes du cerveau, de la pensée et de l’intelligence artificielle sont, à l’aube du IIIe millénaire, engagés dans une rencontre historique, de celles qui peuvent être à l’origine d’une véritable rupture épistémologique »[64]. La relation entre le cerveau et la psychologie prendrait aujourd’hui une dimension nouvelle par le développement de l’imagerie cérébrale anatomique et fonctionnelle. La neuropsychologie cognitive espère décrire les réseaux neuronaux dans leur mobilité en sollicitant par des tâches la cognition des sujets. La neuropsychologie cognitive est réaliste et décrit le cerveau comme une réalité ontologique : sans nécessaire être réductionniste, la neuropsychologie cognitive défend une thèse naturaliste : le réalisme intentionnel, s’il reconnaît le contenu sémantique des représentations, selon Marc Jeannerod « peut être naturalisé en termes de propriétés physiques du réseau nerveux »[65]. Les états cérébraux sont la propriété physique des états mentaux, même si le contenu sémantique de ces derniers peut être étudié en eux-mêmes. Les états cérébraux, décrits en termes fonctionnels, auraient naturellement une relation intentionnelle avec les objets réels du monde. La naturalisation de l’intentionnalité étudierait objectivement les états mentaux par le moyen d’une science naturelle : la psychologie[66], la biologie, les neurosciences.
En 1982 la possibilité[67] s’ouvrait « de construire une physiologie de la cognition humaine »[68]. Les neurosciences cognitives[69] postulent une biologie de l’esprit moins réductionniste que la neurophilosophie que ne l’indique J.M. Roy. Selon lui la neuroscience cognitive, qui irait de la neurophilosophie à la biologie de l’esprit, reposerait sur « l’hypothèse de l’essentialité de la dépendance heuristique »[70] :
· Une explication de l’activité du système nerveux faisant explicitement mention de propriétés neurobiologiques, neuro-anatomiques et neurophysiologiques.
· Ces propriétés neurobiologiques doivent être reliées à des facultés cognitives, de manière effective ou potentielle.
· Recherche des corrélats cérébraux d’une capacité cognitive.
· Rejet de l’éliminativisme neurobiologique
· Relation de dépendance ontologique entre les propriétés psychologiques et propriétés neurobiologiques
· Naturalisme cognitif, qui réunirait le non réductionnisme chez Sejnowski et les Churchland, le non réductionnisme de type émergentiste de Kosslyn et Kœnig, et les thèses de M. Gazzaniga.
· Dépendance heuristique de l’hypothèse psychologique par rapport à l’hypothèse neurobiologique.
Cette écriture de l’histoire des neurosciences cognitives est symptomatique de l’effacement des différences : l’éliminativisme neurobiologique, revendiqué par la neurophilosophie, défend un réductionnisme va au-delà d’une dépendance heuristique et d’une dépendance ontologique : la psychologie ordinaire doit être éliminée car les états mentaux sont des états neurobiologiques et non de simples corrélats ou propriétés.
L’illusion virtuelle du corps neurocomputationnel
Si l’on s’en tenait aux textes fondateurs[71] des sciences cognitives, la modélisation computationelle du corps a été réalisée par l’informatisation de l’esprit[72]. Ainsi le connexionisme aura réintroduit le corps dans la théorie de l’esprit[73],mais un corps virtuel et computationnel[74]. Les réseaux neuronaux sont appelés au début des années 1980 comme des réseaux neuro-mimétiques c’est-à-dire des collections d’unités de calcul[75]. On distingue neurones d’entrées les unités du réseau dont l’activité est directement influencée par l’environnement et neurones de sortie ceux où sont observés les résultats des calculs qu’il exécute. Dans ces cas, tous les neurones directement affectés par l’environnement sont appelés neurones visibles. Mais pour augmenter la puissance de calcul au réseau, car sans cela il posséderait un nombre de capacités de calcul limité, on y ajoute des neurones qui n’ont pas de lien direct avec l’environnement, les neurones cachés.
La difficulté, ce qui explique l’évolution des différentes sortes de réseaux, est de modéliser les facteurs fondamentaux du traitement biologique de l’information par le moyen d’une représentation mathématique du neurone. Jean François Jodouin, dans son article “Présentation des modèles connexionnistes »[76], distingue trois sortes de modèles de réseau à travers la récente histoire du connexionnisme :
– Les réseaux à deux couches : il y a la couche d’entrée où l’activité des neurones est représentée en un exemple et la couche de sortie où celle-ci est représentée par le résultat du calcul. Le problème d’apprentissage du poids des liens du réseau n’est pas abordé dans la mesure où aucun lien n’existe entre les deux couches. Le Perceptron de Rosenblatt (en 1958) et le système Adaline de Widrow et Hoff (en 1960) : le Perceptron est un réseau composé de trois couches, une rétine qui numérise une image donnée en une matrice de point, une couche d’unités de prétraitement, une aire de réponse. Les systèmes simples à deux couches présentent donc des limites. Marvin Minsky et Seymour Papert démontrent en 1969 que les réseaux à deux couches ne peuvent apprendre à différencier que des exemples représentés par des vecteurs linéairement indépendants.
– Les réseaux récurrents apparaissent vers la fin des années 1970. Ils présentent une connectivité plus complexe que les modèles à deux couches. Les couches de neurones indépendants sont remplacées par des liaisons entre neurones par un système de boucles, de réseaux bouclés ou récurrents. Deux voies se dégagent : l’une s’intéresse à ces modèles comme mémoire associative en leur attribuant des capacités d’apprentissage ; l’autre développe des réseaux dits compétitifs où une quantité constante de poids est répartie entre les différentes connexions d’un neurone ou plusieurs neurones. Ces réseaux interactifs sont mis en œuvre par John Hopfield (en 1982) à travers une analogie entre ce type de réseau et un système physique à partir du calcul de l’énergie du système d’ensemble. Il s’agit de définir un état d’équilibre du réseau mathématiquement équivalent à un état d’énergie minimale dans un système thermodynamique. Dans les réseaux compétitifs, chaque neurone du réseau se spécialisera dans la détection d’un trait particulier si bien que les liens entre les neurones a pour but de favoriser la victoire de celui qui aura été activé par le réseau.
– Le travail de T. J. Sejnowski s’inscrit dans le développement dans les années 80 des réseaux à couches cachées : ils sont caractérisés par la possibilité d’apprendre malgré la présence de neurones cachés dans le réseau. Les capacités de calcul sont donc plus importantes. Méconnu jusque dans les années 1980, l’algorithme de rétropropagation, inventé par Paul Werbos de l’Université d’ Harvard, n’est possible que dans des réseaux multicouches. Il s’agit d’insérer entre les unités d’entrée et les unités de sortie des unités cachées dont la fonction est de pré-traiter l’information. La démonstration de ces modèles a été mise en œuvre an 1986 par d’un coté David Rumelhart, Ronald Williams, et d’un autre coté G. Hinton et T. Sejnowski.
Le cerveau semble ainsi utiliser des codages par population par lesquels l’information est représentée par un ensemble de neurones actifs. Même en cas de lésions partielles comme l’anesthésie de certaines cellules, l’œil se déplace dans une direction codée par la moyenne des cellules qui restent actives. Les réseaux de neurones artificiels sont donc le moyen d’opérer des simulations de l’apprentissage en soulignant la diffusion de l’information et sa rétention structurelle à l’ensemble du réseau.
Le modèle de la vision va servir dès 1981 d’objectif pour le travail de description des processus d’apprentissage par T. Sejnowski. Elie Bienenstock[77] nous rappelle combien la perception visuelle joue un rôle essentiel dans les processus de différenciation entre la plasticité informationnelle et la comparaison avec les données déjà encodées dans les réseaux d’apprentissage. L’invariance des représentations dépend de la double capacité à conserver ce qui est encodé et de l’analyse des informations extérieures au système.
Pour limiter les effets du matérialisme, une différence de niveaux paraît fournir un fondement suffisant contre l’accusation de réductionnisme :
-a) niveaux d’analyse (levels of analysis)
-b) niveaux d’organisation (levels of organisation)
-c) niveaux de traitement (levels of processing)
Les niveaux d’analyse concernent la division conceptuelle d’un phénomène selon les différentes sortes de questions que l’on peut lui poser. Pour eux les niveaux d’analyse doivent correspondre aux niveaux d’organisation du cerveau et aux niveaux de traitement de l’information. Si bien qu’entre a) b) et c) il y aurait une identité de point de vue. Les trois niveaux distingués sont :
1) Le niveau computationnel de l’analyse du problème abstrait.
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2) Le niveau de l’algorithme, spécifiant la procédure formelle pour accomplir une tâche en fournissant la sortie correcte pour une entrée donnée.
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3) Le niveau de l’implémentation physique.
Le défaut consisterait dans cette présentation verticale trop en faveur le niveau computationnel comme celui d’un calcul abstrait sans prise en compte du niveau 3. Pourtant du point de vue des neurosciences, le computationnisme abstrait ne doit pas fournir une modélisation sans prendre en compte l’organisation même de la communication cérébrale des informations. Ce computationnisme sert en réalité les intérêts d’un cognitivisme qui reconnaît l’existence des états mentaux, même si le traitement computationnel du niveau 2 assure par l’algorithme la transformation formelle de l’information.
Cette critique de D. Marr et T. Poggio va porter sur la vision. D. Marr[78] propose un modèle des processus complexes de l’image perçue. On le sait l’image oculaire passerait à travers un ensemble de filtres superposés travaillant en parallèle et dotés de résolutions spatiales différentes. Il s’agit de détecter les points de variation d’intensité qui vont déterminer les “bords” des objets : « une des fonctions essentielles du cortex visuel primaire serait ainsi de représenter topographiquement les changements d’intensité de l’image, cela par l’intermédiaire d’interactions entre neurones voisins. Un modèle de ces processus complexes a été développé dans les années soixante dix par D. Marr et perfectionné par T. Poggio (MIT). Ce modèle formel s’appuie entièrement sur les données physiologiques et rend compte de ce travail de “localisation des bords” d’images par les cellules ganglionnaires et notamment les neurones du cortex V1 »[79]. L’idée d’une circulation unidirectionnelle de l’information dans le cortex visuel fut battue en brèche dès les années 1970 et les travaux de D. Marr contribuèrent à développer le schéma d’un câblage entre les aires du cortex visuel.
Le reproche adressé à David Marr, son “rêve”, consisterait dans l’indépendance du niveau 1 par rapport aux deux autres niveaux. Dans une perspective où les états mentaux ne sont plus décrits que comme des états neurobiologiques, la modélisation informatique ne doit pas conduire à une perspective cognitiviste. Les modèles de réseaux sont un moyen pour les partisans du neurocomputationnisme[80] de reconsidérer les problèmes computationnels non plus en les isolant pour un traitement abstrait mais en les reliant à la structure même de l’organisation cérébrale. Dès 1981 la notion de code permet à T.J. Sejnowski de préciser comment l’activité simultanée des aires visuelles corticales est ordonnée. Quel est donc ce code permettant d’associer les neurones répondant au même stimulus ? « Au début des années 1980 les théoriciens allemand C.von der Malsburg et israélien M. Abeles avaient proposé que ce “code commun” puisse résider dans la synchronisation temporelle entre les impulsions électriques émises par les neurones… Aujourd’hui, une conception d’ensemble de la représentation des objets visuels dans le cortex commence donc à émerger. Chaque stimulus est représenté par l’activité simultanée et synchrone d’une population de neurones dispersés dans les différentes aires visuelles. Cette nouvelle vue bouleverse la conception classique d’un traitement successif de l’information par les aires visuelles »[81].T.J. Sejnowski fait partie de ceux qui, en 1981, font l’hypothèse d’un second code ordonnateur : en effet les codes de premier ordre permettent aux informations visuelles de s’inscrire dans les neurones en un temps donné. Mais se pose le problème de la corrélation temporelle entre deux neurones qui serait le résultat d’un second code particulier.
Dans leur article « Color Vision : a case study in the foundations of cognitive science”, Francisco Varela et Evan Thompson[82] ont montré que le statut de la perception des couleurs constitue un des centres des débats des sciences cognitives. En effet, les théories de la couleur séparent trois points de vue : il faut distinguer la manière dont les couleurs se manifestent à nous, ce qu’on pourrait appeler la structure de la manifestation de la couleur ; puis la couleur en tant qu’attribut perçu des choses du monde ; et enfin la couleur comme catégorie de l’expérience. Or la théorie computationnelle de D. Marr et T. Poggio n’envisage la couleur qu’à partir des modèles informatiques de la vision de la couleur : c’est-à-dire que la couleur comme attribut perçu devient, par exemple, le résultat du coefficient de réflexion de la surface d’un objet. Ainsi D. Marr espère reconstituer au niveau de l’algorithme les conditions d’impression des objets dans les bases neurobiologiques de la vision.
La convergence des études physiologiques et psychologiques a été rendue possible, à l’inverse d’une approche seulement physiologique au XIXe siècle, grâce à la prise en considération de l’activation synchronisée des aires corticales. En effet quand on regarde une image des parties distinctes du cerveau l’analyse en traitant séparément les différentes informations visuelles, telles que la couleur, la forme et le mouvement. Pourtant le vécu psychologique de l’image la présente de manière unifiée. C’est dans les années 1970 que l’étude du singe-hibou par John Allman et Jon Kaas, de l’université de Wisconsin et du macaque par Semir Zeki qui a montré que le cortex visuel d’association, le cortex préstrié, est constitué de plusieurs aires corticales, séparées de l’aire V1 par l’aire V2. Une fois amené le concept de spécialisation fonctionnelle du cortex visuel, Semir Zeki a mis en évidence le traitement séparé du mouvement et de la couleur ; ainsi les capacités de distribution des aires V1 et V2 résultent de leur organisation structurelle et fonctionnelle : « Quatre systèmes traitent ainsi en parallèle les diverses caractéristiques des objets : l’un d’entre eux détecte le mouvement, un autre la couleur, et deux la forme. Les deux systèmes les plus différents sont celui du mouvement et celui de la couleur. L’aire V5 est la région principale du système préstrié d’analyse du mouvement. Elle reçoit ses signaux de la rétine, via les couches magnocellulaires du ganglion genouillé latéral et la couche 4B de l’aire V1. De cette dernière, les signaux sont projetés vers l’aire V5, à la fois directement et par les bandes larges de l’aire V2. L’aire V4 est le cœur du système qui traite la couleur ; ses signaux proviennent des couches parvocellulaires du ganglion genouillé latéral et traversent les colonnes de l’aire V1, avant de se diriger vers l’aire V4, directement ou par les bandes minces de l’aire V2 »[83].
La référence aux travaux de J.Allman ou à ceux de S.Zeki est le moyen pour P.S. Churchland et T.J. Sejnowski[84] d’étendre le modèle de la perception des couleurs à d’autres domaines cognitifs dans la mesure où la localisation dans le cerveau doit désormais prendre en compte la profondeur du système visuel. Le développement des nouvelles techniques, comme l’émission de positrons par tomographie (PET) ou les images à résonance magnétique (MRI), nous ont appris que la partie de l’écorce cérébrale qui est active au cours de la vision est subdivisée en de nombreuses régions fonctionnelles. Toutes sont situées à l’arrière du cortex, dans les lobes occipital et temporal. Cela signifie qu’un stimulus présenté dans une petite région du champ visuel active des neurones restreints à une petite zone de chaque aire visuelle, et que deux stimuli adjacents activent deux zones voisines de chaque aire. Les réseaux neuronaux sont donc nécessaires pour rendre compte de la complexité mais surtout de la spécificité fonctionnelle associée à la réalisation de chaque tâche[85].
Le cerveau psychologique, modèle de la médecine philosophique
Face à ce programme naturaliste dominant d’une neuropsychologie cognitive, le cerveau psychologique[86] définit une méthode non réaliste et instrumentaliste. Le cerveau psychologique n’est pas le cerveau décrit par la neurophysiologie et la neurologie. Le Docteur Josefa Ioteyko le définissait ainsi dans son chapitre sur l’émergentisme intellectuel de son ouvrage de 1920 consacré à La Fatigue : « Mais la constatation de ce genre ne signifient pas qu’il existe un rapport de cause à effet entre les conditions chimiques de l’activité psychique et cette activité même, car entre les deux s’intercale le phénomène physiologique cérébral, et le problème consiste précisément à résoudre le point de vue, la liaison entre l’activité cérébrale inconsciente et l’activité cérébrale consciente. C’est pour avoir confondu l’activité du cerveau physiologique avec celle du cerveau psychologique que tant d’auteurs ont commis de si graves erreurs dans l’interprétation du métabolisme cérébral »[87]. Cette confusion entre le cerveau physiologique et « le cerveau psychique »[88] définit le cerveau psychologique comme une fonction émergente au sens du psycho-monisme du physiologue allemand de Verworm, selon lequel le monde physique serait contenu dans le monde psychique.
Rien du psycho-monisme dans notre définition du cerveau psychologique car sa fonction est épistémologique pour relier les concepts neurologiques et psychologiques entre eux. Ce relais et ce lien conceptuels opèrent des traductions d’une signification neuroscientifique à une signification psychologique. Le cerveau psychologique pourrait être compris seulement comme un opérateur logique entre des énoncés d’origine disciplinaire différente. Mais le cerveau psychologique ne relève pas entièrement du monisme anomal défendu par Davidson[89]. Selon Pascal Engel trois principes constituent la position de Davidson : P1 : Principe d’interaction causale selon lequel certains événements mentaux ont une interaction avec des événements physiques ; P2 Principe du caractère nomologique de la causalité ; P3 Principe de l’anomisme mental, selon lequel il n’y a pas de loi déterministe stricte sur la base desquelles on puisse expliquer et prédire les événements mentaux. Comme nous l’exposons dans notre troisième partie le cerveau psychologique, P1 doit admettre aussi que certains événements physiques ont une interaction causale avec certains événements mentaux, en raison de la qualification progressive ou régressive des structures cérébrales dans le développement ; P.2 reconnaît aussi au cerveau psychologique une causalité déterminant des lois pour les événements physiques, mais la constitution de cette nomologie par la délimitation expérimentale de ce qui relève de l’interaction du cerveau psychologique, du développement cérébral et de la perception psychologique. Le cerveau psychologique admet la validité de P3 au nom d’un antiréductionnisme et un antiprédictionnisme, mais le constat de corrélations au sein des études longitudinales est au centre de l’évaluation neurologique et psychologique du cerveau.
Le cerveau psychologique refuse de toute modélisation par analogie du cerveau comme le computationnisme a pu l’espérer au nom de l’absence d’isomorphisme entre la structure des niveaux les plus élevés d’un système avec sa structure des niveaux les plus élémentaires[90]. Faut-il se méfier pour autant de toute modélisation cérébrale pour traiter des problèmes de la cognition ? Le cerveau psychologique refuse d’entériner la scission entre, selon l’expression de Francis Eustache et Mareike Wolf, « une approche essentiellement “neurologique” des affections organiques cérébrales et un abord psychodynamique des troubles psychiques »[91]. L’intégration, au sein d’un matérialisme dynamique, prend en compte les relations du cerveau, du corps et de l’esprit : non pas dans une science unifiée et cristallisée mais dans une interscience méthodologique et descriptive entre les neurosciences et la psychologie. Si l’on ne peut plus décrire l’esprit sans le cerveau ou, au contraire, réduire l’esprit au cerveau, nous supposons que la question de la communication entre le cerveau et l’esprit reste le postulat de ce conflit des descriptions plutôt que sa conséquence. L’étude du cerveau n’a pas toujours été, comme pourrait faire croire la naissance et le développement des neurosciences, une spécialisation naturaliste des sciences de l’esprit. La localisation des aires du langage et de la mémoire par Paul Broca et Karl Wernicke, aura pu établir un lien de cause à effet à partir de 1860 entre les facultés de l’esprit et le fonctionnement du cerveau. Mais le lien entre le cerveau et l’esprit a toujours été abordé à travers des objets comme l’hystérie, la mélancolie ou la folie. Ces objets ne sont pas seulement des intermédiaires entre deux disciplines constituées comme la neurologie et la philosophie. Ils sont problématiques par essence car ils manifestent des phénomènes inexpliqués comme l’influence des humeurs, la communication des esprits animaux, ou encore la circulation des fluides.
La chair du cerveau, une phénoménologie biologique
Nous défendrons la thèse que le cerveau[92] n’est pas un organe objectif qui serait séparé de la vie du corps, c’est-à-dire de sa constitution, de son métabolisme et de son adaptation au milieu. Vivant, le cerveau se modifie sans cesse tant dans son organisation que dans sa spécialisation. Plutôt qu’un récepteur simple, le cerveau est soumis à ses possibilités de plasticité et de réadaptation[93] : cette mobilité des réseaux neuronaux dynamise le cerveau tant dans la qualité de ses états mentaux que dans la communication des neurotransmetteurs. Déterminé par des facteurs génétiques, au cours de son développement et dans ses régulations, le cerveau n’est pas libre[94] : le cerveau doit trouver une homéostasie neurofonctionnelle en synthétisant la contradiction entre la part des gènes[95] et la part de l’histoire. Cette synthèse, nous proposons de la désigner sous le terme de la chair du cerveau. En phénoménologie[96] aucun concept n’a pas de signification biologique car ils décrivent la constitution subjective.
En alliant, plutôt qu’en séparant[97], biologie et phénoménologie, la notion de chair du cerveau ou celle de cerveau incarné rejoint le travail fondateur de Francisco Varela : en proposant de partir du corps vécu pour rendre compte de la cognition, la notion d’incarnation n’a plus ce sens dualiste de la tradition chrétienne. L’esprit est désormais présent par le corps qui le produit. Selon F. Varela, une voie moyenne doit être maintenant proposée qui étudie la cognition non comme une reconstitution d’un monde extérieur prédonné (réalisme) ou une projection d’un monde intérieur prédonné (idéalisme). La cognition est pour lui une action incarnée : « Par le mot incarnée, nous voulons souligner deux points : tout d’abord, la cognition dépend des types d’expériences qui découlent du fait d’avoir un corps doté de diverses capacités sensori-motrices ; en second lieu, ces capacités individuelles sensori-motrices s’inscrivent elles-mêmes dans un contexte biologique, psychologique et culturel plus large »[98]. Trouvant le lien, si recherché par Maurice Merleau Ponty entre biologie et phénoménologie, l’enaction démontre comment les structures cognitives émergent des schèmes sensori-moteurs récurrents qui guident l’action par la perception. La séparation entre motricité et perception conduit à une description des mécanismes cérébraux et à une interprétation, nous l’avons vu, neurocomportementale. Ainsi le point de référence de la perception n’est plus un monde prédonné mais « la structure sensori-motrice du sujet (la manière dont le système nerveux relie les surfaces sensorielles et motrices). C’est cette structure – la façon dont le sujet percevant est inscrit dans un corps -, plutôt qu’un monde préétabli, qui détermine comment le sujet peut agir et être modulé par les événements de l’environnement »[99].
L’inscription corporelle de l’esprit[100] doit non seulement prendre en compte l’enaction, mais aussi l’individuation de la chair. La différence entre l’enaction (action incarnée) et l’individuation de la chair est de point de vue : comment les structures cognitives permettent ou non au sujet de percevoir ses incorporations constitutives. Comme le rappelle Muriel Combes « l’individuation psychique est une individuation vitale perpétuée »[101]. André Pichot, reprenant les thèses de G. Simondon, « il faut comprendre l’individu à partir de l’individuation, et non pas l’individuation à partir de l’individu. Cette individuation ressortirait alors à une dynamique morphogénétique »[102]. Si l’individu était conçu comme une substance, il ne pourrait plus s’autodéfinir à travers les interactions de sa structure neurogénétique avec l’environnement. Cette autodéfinition exige une adaptation dynamique des réseaux du cerveau à partir du travail d’actualisation et d’action nécessaire. Ce morphodynamisme interne transforme le corps humain. Ainsi l’environnement, comme le défendent les externalistes, ne définit jamais entièrement et à lui seul, le corps vivant. Ce serait limiter l’identité à une réception perméable des qualités externes, rendant ainsi vaine toute activité subjective. L’individu ne cesserait alors de se qualifier tout en se disqualifiant… Le corps ne retiendrait rien de sa matière sous l’influence toujours disqualifiante de l’environnement.
Or en utilisant le terme de chair, M. Merleau-Ponty n’en restait pas la métaphore : il cherchait un modèle dynamique où la matière vivante pouvait elle-même s’auto-organiser[103]. Pour la phénoménologie de la chair, le sentiment d’incarnation n’est pas une illusion subjective dont la cause véritable se trouverait dans une détermination neurobiologique. Car en voulant réduire la conscience du sujet agissant aux résultats de l’interaction sensation vécue-messages nerveux, l’argument neurobiologique veut expliquer la subjectivité par l’objectivité. Au contraire à travers une version phéno-biologique de la théorie de l’émergence, une continuité de niveaux de la sensation vécue jusqu’au neurone est établie tant dans l’objectivité des circuits cognitifs que dans la subjectivité des vécus de conscience.
Il reste à démontrer que le cerveau de chaque sujet est singulier en raison de ses incorporations formant sa chair au cours de son épigenèse et des modes neurosubjectifs de l’enaction. Comment peut-on décrire chaque cerveau dans sa singularité subjective ?
Le corps pensant de la biocognition
L’opposition entre l’inné et l’acquis a été renouvelée par l’embryologie cellulaire et moléculaire en précisant les conditions du développement programmé et les possibilités imitées de plasticité. La matière, qui fait corps humain, le devient au fur et à mesure des incorporations successives. Cette dimension historique de tout corps humain est un étayage psychobiosocial : tout apprentissage sollicite un support matériel pour être sélectionné par la matière vivante et servir ainsi de bases informatives pour l’activité mentale. Le corps devient un somaphore [104]par lequel le sujet s’incarne.
Cette activité mentale est autonome car elle est autorisée par chaque corps humain selon l’élaboration de son histoire : la pensée traverse les plis et les couches de l’ésthésiologie subjective et de la mémoire biopsychologisque. L’esthésiologie subjective repose sur la perception du monde, elle-même introduite par les sens dans le corps. La connaissance objective n’existe pas puisque que chaque corps humain doit se construire des “prototypes » de manière empirique.Ce retour de soi en soi, qu’est toute pensée, résulte de la traversée du corps par le système nerveux central ; pour autant, s’il est vrai que toute pensée est l’effet de l’activité du corps pensant, ses contenus ne sont pas la reproduction exacte des réseaux neuronaux mais leurs productions subjectives. Par production biosubjective, nous désignons l’effet des réseaux neuronaux à l’intérieur du corps humain historiquement construit et dont l’organisation matérielle lui procure une activité mentale spécifique. L’incorporation ne peut être que subjective. Rien de matérialisable ne peut être localisé dans le cerveau. L’activité cognitive repose sur des cartes, des réseaux, des aires neurofonctionnelles …plutôt que sur des éléments singuliers. Cette nécessité grégaire des collections neuronales assure la communication indispensable pour l’activité autonome de la pensée. Lorsque nous pensons, nous n’avons pas conscience des réseaux neuronaux pourtant mis en œuvre. Cette inconscience de notre propre cerveau assure à la pensée une indépendance imaginaire tant qu’aucun état du corps ne soit suffisamment dégradant pour la limiter ou l’influencer.
Cette activité utilise les produits du corps pensant en les unifiant lors des états mentaux. Par état mental, il faut comprendre ces formes cristallisées à un moment voulu ou non par le corps pensant ; l’image mentale peut tout aussi bien provenir de la recombinaison mnésique que de la composition imaginaire ; elle fournit à la pensée sa matière par des représentations de mot ou de chose. Aucune matérialité pourtant ne pourrait être saisie puisque l’image mentale est une forme immatérielle produite par la matière. Ce qui apparaît paradoxal au sein d’une position matérialiste. Comment de la matière pourrait-elle produire de l’immatériel ? Le tout devrait-il être différent et supérieur à la somme des parties ?
S’en tenir à une position matérialiste non réductionniste suppose aussi la reconnaissance de la création des formes par la matière. Ce que nous définissons comme un matérialisme dynamique. La morphogenèse trouve bien dans la matière des gènes du développement sa raison et son dynamisme. Ne pourrait-on décrire l’état mental comme une endogenèse de la matière du corps pensant : le cerveau produit par ses réseaux la forme de la pensée dont le contenu est trouvée dans la connexion et la conjonction des matériaux constituant le corps pensant. L’endogenèse des états mentaux est dans une certaine mesure (tout le problème vient de cette proportion) semblable à la morphogenèse décrite par l’embryologie. La construction des réseaux neuronaux est soumise à des contraintes biologiques égales et l’étayage structure les états mentaux comme le prouve les maladies de la dégénérescence nerveuse. Pour éviter de réduire la pensée au corps, il faut reconnaître au corps pensant la capacité matérielle à produire, non seulement des formes organiques (états du corps) et des formes programmatiques (enfants) mais aussi des formes idéelles.
Cette endogenèse des formes idéelles, dégagée par G. Simondon, suppose une cristallisation en un état mental pour que le corps pensant puisse s’apercevoir. Cette cristallisation est le produit, que nous appelons la réflexion, de la dynamique réelle de la matière. Il convient de distinguer la représentation subjective de la description objective de la matière du corps pensant. Non que la représentation subjective soit erronée ou ne puisse rien connaître de la réalité formelle qui l’a produite. Non que la réalité objective de l’idée du corps pensant soit qualitativement imparfaite à la réalité formelle de sa cause, le corps pensant lui-même. Mais l’état mental est une forme synthétique de la dynamique matérielle du corps pensant. Sans cette causalité, elle ne pourrait exister mais à l’inverse sans l’état mental le corps ne pourrait être pensé. Cette complémentarité fonctionnelle n’introduit pas un saut qualitatif du corps à sa pensée. L’état mental rend le corps pensant tandis que la matière vivante fournit par le moyen du corps la matière à pensée.
L’action du corps émotionnel
La valorisation de l’émotion place le corps dans une constitution dynamique de la sensation. Contre la domination de l’esprit rationnel, les racines de la singularité du Soi se trouvent dans un esprit « si étroitement façonné par le corps »[105] : les cartographies du corps-objet révèlent combien le corps est redoublée dans l’organisation cérébrale, comme en témoignent les travaux de V.S. Ramachandran sur la base de l’homoncule de Wilder Penfield[106]. En renversant l’ordre de la raison et de l’émotion, l’action utilise un corps agissant par délibération et décision avant que la conscience n’en entérine le résultat : selon Alain Berthoz « nous avons deux corps, le corps physique et le corps mental. Le corps mental est constitué de tous les modèles internes qui constituent les éléments du schéma corporel et permettent au cerveau de simuler, d’émuler la réalité »[107].
Pour A. R. Damasio, il convient aussi de faire une neurobiologie de la faculté de raisonnement à partir de l’étude du système nerveux impliquant plusieurs régions du cerveau. Aussi voudrait-il dénoncer l’erreur de Descartes[108] qui serait celle du dualisme. Il reproche au philosophe du cogito d’avoir conduit la philosophie hors du domaine de la science du cerveau en affirmant la distinction réelle des substances pensante et étendue.
L’intérêt de l’ouvrage d’A.R. Damasio se trouve moins dans la critique interne de Descartes, qui ne résisterait pas à une analyse de l’œuvre du philosophe français, que dans la tentative de réhabilitation de l’unité interne du corps avec le cerveau. Aussi le corps définira moins le système nerveux parce que « le cerveau et le corps forment une unité indissociablement intégré… l’unité organique constituée par le partenariat corps-cerveau interagit en tant que tout avec l’environnement »[109]. Le lien entre le cerveau et la pensée ne peut conduire à une distinction réelle de l’état neuronal et de l’état mental ; car « des changements microscopiques… dans les circuits neuroniques déterminent des représentations neurales, lesquelles déterminent à leur tour des images que nous ressentons comme appartenant à notre moi propre »[110].
L’interaction de l’organisme avec l’environnement, paradigme retenu par A.R. Damasio, instaure un système dynamique de régulation biologique. L’organisation cognitive intègre des activités séparées dans des régions cérébrales ; si bien que l’idée d’un site intégratif unique ne correspond plus à la diversité neurobiologique. Ce qui paraît uni dans le monde mental ne se cristallise pas en un seul lieu : car aucune région, à elle seule, dans le cerveau humain ne peut traiter simultanément les représentations fournies par toutes les modalités sensorielles. Reprochant à F. J. Gall de n’avoir pas, et pour cause à son époque[111], décentré l’activité du cerveau en réseaux, A.R. Damasio s’appuie sur la neuro-anatomie comme la discipline fondamentale des neurosciences. A travers le cas princeps de Phinéas Cage, dont le crâne devait être traversé par une barre de fer, le neurobiologiste trouve dans la topologie des lésions la preuve d’une ramification neurobiologique.
La description topographique des représentations neurales constitue donc bien un argument antiréductionniste. Plutôt, comme dans la thèse réductionniste, que de matérialiser l’activité mentale, l’introduction de la notion de « représentations potentielles » voudrait rendre compte du réseau : ainsi « les représentations potentielles conservent dans le réseau de leurs connexions synaptiques non pas des images proprement dites, mais les moyens de reconstituer des images »[112]. Les représentations potentielles sont moins en réserve, à la manière de configurations préformées et fixées, qu’enregistrées en des circuits activés. Cette potentialité est « un programme d’activation à l’état latent, qui passe en application effective en déterminant la forme de l’activité des neurones »[113]. Même si cette modélisation n’établit pas encore d’équivalence pure entre qualité et quantité, l’état mental est le résultat d’une configuration de décharges nerveuses. Son activation trouve dans les apprentissages une mémoire structurelle suffisante pour fournir, à l’occasion de l’état mental, une reconstruction. Pourtant, si cette modélisation s’appuie sur les théories récentes de l’apprentissage, elle devient discutable lors du lien établi entre ontogenèse et phylogenèse. Les représentations potentielles contiendraient ainsi des informations à la fois innées et acquises. Sous-tendant la survie, les circuits innés du cerveau mettraient en œuvre les mécanismes régulateurs fondamentaux. Cette régulation instinctive n’interdit pas des modifications de l’espace neural lors des interactions du corps et du cerveau. Le refus du précablage mécanique conduit A.R. Damasio à aller au-delà d’une description instinctuelle des comportements. Pour cela sa théorie des émotions serait le point d’équilibre recherché entre l’innées et l’acquis : l’enjeu est d’éviter un comportementalisme biologique selon lequel les émotions seraient des réactions préprogrammées depuis la naissance.
La distinction entre les émotions primaires et les émotions secondaires est encore bien commode pour séparer ce qui serait les réactions mécaniques des expériences imaginaires de l’émotion. A cet égard A.R. Damasio rejoint la thèse de Jean Didier Vincent[114] qui reconnaissait à l’imaginaire un rôle déterminant dans la cristallisation du désir sur un objet. Mais, en appliquant son concept de représentations potentielle, le neurobiologiste américain espère lui lier le cognitif et l’affectif au sein d’une seule théorie : « l’émotion résulte de la combinaison de processus d’évaluation mentale, simples ou complexes, avec des réponses à ces processus, issues de représentations potentielles. Ces réponses s’effectuent principalement au niveau du corps proprement dit, se traduisant par tel ou tel état émotionnel du corps, mais elles peuvent aussi s’effectuer au niveau du cerveau lui-même (neurone modulateur du tronc cérébral), ce qui conduit à des changements mentaux supplémentaires »[115]. Le corps serait donc cet intermédiaire privilégié dont la relation avec l’environnement affectif faciliterait l’incorporation des émotions. Cette théorie retient la spécificité des mécanismes neuraux mais voudrait situer l’importance du corps comme principe régulateur de l’activité neurochimique du cerveau. Le corps fournirait au sujet des états psychologiques suffisamment intenses pour les lui faire ressentir par la perception. Le corps lancerait des signaux au système neural dont la force de déclenchement induirait des décharges nerveuses. Il s’agit bien de reconnaître une perception corporelle des émotions, mais le corps émotif est-il la cause ou l’effet du système neural ?
En affirmant que sans le corps il n’y aurait pas de représentation mentale, A.R. Damasio refuse l’hypothèse de l’indépendance du cerveau. Le cerveau ne peut penser sans le corps sauf à convenir de sa réduction computationnelle. Le corps lui-même n’est pas pure passivité au service du déroulement programmé. Or le jeu alternatif de l’action sur l’environnement et de la réception de ses signaux place le corps dans la donation de sens : « le corps fournit au cerveau davantage que ses moyens d’existence et que la modulation de ses activités. Il fournit un contenu faisant intégralement partie du fonctionnement mental normal »[116]. On pourrait désigner ce type de matérialisme du corps, pour autant que le neurobiologiste ne veuille pas entièrement se résoudre à adopter un point de vue phénoménologique, le nom de matérialisme sémantique car il accorde à l’unité somato-psychique la production de signification autonome.
Conclusion
La philosophie du corps dans la cognition doit donc se séparer d’une philosophie de l’esprit par trop cognitiviste. La philosophie analytique pourrait s’appliquer aux contenus sensibles dès lors que les propriétés plutôt que les énoncés pourraient être l’objet d’une connaissance directe et non inférentielle. Pour autant il reste beaucoup à décrire, une fois opérer le renversement épistémologique de la raison en émotion et action, pour parvenir à modéliser les liens incarnés et vécus par le corps pensant.
Pr. d’Epistémologie du Corps & des Pratiques Physiques, Faculté du Sport, Université de Lorraine, 30 rue du Jardin Botanique, CS 30156, 54603 Villers les Nancy Cedex (France), 00 (33) (0)3.83.68.29. 00.; Fax : (0)3.83. 68.29.02. ; Directeur du Master STAPS Univ. Lorraine ; Editeur des Archives Binet ; Membre EA 4360 APEMAC/EPSaMetz ; MSH 5 Lorraine USR CNRS 3221; Membre Associé UMR 7268 CNRS ADES ; Rédacteur des revues : Corps, Ed CNRS: Recherches & Educations ; Expert International des Recherches sur le Corps en SHS ; Professeur Invité: Brésil, Québec, Australie
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[1] David M. Rosenthal, ed., 1991, The Nature of the Mind, Oxford University Press.
[2] Alain Berthoz a su republier les leçons sur le corps, le cerveau et l’esprit (Paris, O. Jacob, 1999) pour montrer les racines de la cognition au Collège de France.
[3] Denis Fisette, Pierre Poirier, 2000, Une longue tradition, une courte histoire, Philosophie de l’esprit. Etat des lieux, Paris, Vrin, p. 11-32.
[4] Natalie Depraz, 2001, Des psychologies à la philosophie de l’esprit, La conscience. Approches croisées aux sciences cognitives, Paris, Armand Colin, chap. 13.
[5] J. Dokik, 2000, Philosophie de l’esprit, dans P.Engel ed., Précis de philosophie analytique, Paris, P.U.F., p. 35-62, ici p. 32.
[6] B. Andrieu, 2000, « Du cerveau à l’esprit en psychopathologie cognitive », M. Musiol, A. Trognon ed., Eléments de psychopathologie cognitive. Le discours du schizophrène, Paris, Armand Colin, Coll.U., Série psychologique, p. 50-61.
[7] E. Pacherie, 1993, Naturaliser l’intentionalité. Essai de philosophie de la psychologie, Paris, P.U.F, p. XII.
[8] Pierre Livet, 2002, Article « Philosophie de l’esprit », dans Guy Tiberghien eds, Dictionnaire des sciences cognitives, Paris, Armand Colin,p. 211-213.
[9] D. Andler, 2002, Processus cognitifs, D. Andler, A. Fagot-Largeault, B. Saint-Sernin, Philosophie des sciences I., Paris, Folio Essais, p. 226-408.
[10] A.D. Ritchie, 1936, The Natural History of Mind, Longmans, Green and Co, p. 1 : « En fait il est important d’éviter deux sortes d’erreurs, d’un côté le dualisme traditionnel du corps et de l’esprit comme une distinction substantielle et d’un autre côté le monisme grossier qui guide aussi bien le matérialisme ou le mentalisme » (notre trad.)
[11] Jean Delacour, 2001, Le problème des qualia, dans Conscience et cerveau. La nouvelle frontière des neurosciences, Ed. De Boeck Université, chap.2.
[12] Ned Block [1978], Le fonctionnalisme face au problème des qualia, trad. fr., JM. Roy ed., La théorie computationnelle de l’esprit, Les Etudes Philosophiques, Paris, P.U.F., n°3/1992, p. 337-370.
[13] Bertrand Russell [1948], La science de l’esprit, dans La connaissance humaine. Sa portée et ses limites, Paris, Vrin, 2002, trad. N. Lavand, chap.VI, voir en particulier p. 85-90.
[14] Bertrand Russell [1913], Le monisme neutre, dans Théorie de la connaissance, Paris, Vrin, 2002, trad. Jean-Michel Roy, chap. II, p. 27.
[15] Bertrand Russell [1921], Sensations et images, dans Analyse de l’esprit, Paris, Payot, 1926, trad. M. Lefebvre, chap. VIII, p. 143.
[16] Bertrand Russell, 1927, Physics and neutral monism, dans The Analysis of Matter, London, Ed. P. Kegan, chap.XXVII, p. 391.
[17] B. Andrieu, 1999, Les théories matérialistes de l’esprit dans les neurosciences, Ed. Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa, Annales de l’Institut de Philosophie de Philosophie de Bruxelles, « Matière pensante. Etudes historiques sur les conceptions matérialistes en philosophie de l’esprit », Paris, Vrin, 1999, p. 119-149.
[18] D.M. Armstrong, 1961, The Nature of Perception, dans Perception and the Physical World, Routledge and Kegan Paul, p. 131 (notre trad).
[19] D.M. Armstrong, 1968, Bodily sensations, A Materialist Theory of the Mind, Routledge and Kegan, chap. 14, p. 307.
[20] D.M. Armstrong, 1981, The Causal Theory of the Mind, dans The Nature of Mind and Other Essay, Cornell University Press. Reprinted, dans William G. Lycan, Mind and Cognition, A Reader, Basil Blackwell, 1990, p. 37-46.
[21] Jean-Pierre Changeux, Alain Connes, 1989, Les machines à penser, dans Matière à pensée, Paris, O.Jacob, chap.VI.
[22] J.P. Changeux, Le cerveau, représentation du monde, dans L’Homme neuronal, Paris, Fayard, 1983 : « Désormais, à quoi bon parler d’Esprit ? Il n’y a plus que deux d’un seul et même événement », coll. Pluriel, p. 334.
[23] Alain Prochiantz, 1997, Introduction dans Les anatomies de la pensée, A quoi pensent les calamars ?, Paris, O. Jacob, p.10.
[24] B. Andrieu, 1998, Le fonctionnalisme contre la neurophilosophie, dans La neurophilosophie, Paris, P.U.F. coll. Que-sais-je, n°373, p. 100-110.
[25] Jerry Fodor, 1975, The language of thought, HarvardUniversity Press, p. 52.
[26] Pascal Engel, 1992, Causes mentales, dans Etats d’esprit. Questions de philosophie de l’esprit, Aix en Provence, Ed. Alinéa, p. 33.
[27] Jerry Fodor, 1981, Representations : Philosophical essays on the foundations of cognitive science, Ed. The Harvester Press, p. 98-99.
[28] Jerry Fodor, [1983], La modularité de l’esprit. Essai sur la psychologie des facultés, trad. Abel Gerschenfeld, Paris, Minuit, p. 67.
[29] Op. cit., p. 156.
[30] Vincent Descombes, 1995, L’esprit mécanique, La denrée mentale, Paris, Minuit, p. 224-257.
[31] J. Fodor, [2000], L’esprit, ça ne marche pas comme ça,Portée et limites de la psychologie computationnelle, trad. C. Tiercelin, Paris, O.Jacob, 2003, p. 95.
[32] Daniel Dennett, [1969], The ontological problem of the mind, dans Content and Consciousness, Routledge, 1986, p. 18.
[33] Pascal Engel, 1994, Théories de l’interprétation et théorie de l’esprit, Introduction à la philosophie de l’esprit, Paris, Ed. La découverte, p. 71-92. Et p. 192-209.
[34] D. Dennett, [1991], Les Versions Multiples contre le Théâtre Cartésien, dans La conscience expliquée, trad. Pascal Engel, Paris, O. Jacob, 1993, p. 135-178.
[35] B. Andrieu, Stefan Leclerq, 2003, La mobilogie. De l’épistémologie à l’ontologie, Liège, Ed. Sils Maria.
[36] The Oxford Companion of Mind, dirigé par Richard L. Gregory, Oxford University Press 1987 a été traduit sous le titre le cerveau, un inconnu. Dictionnaire encyclopédique, Paris, Robert Laffont, 1993.
[37] B. Andrieu, 1996, Wittgenstein et la grammaire du cerveau, Philosophie, n°49, p. 50-67.
[38] Ludwig Wittgenstein, Blue book,[1933-1934], Le Cahier Bleu, trad.Guy Durand, Paris, Gallimard, coll. “Tel”, 1965, p. 54, [p. 7]. L. Wittgenstein développe ce thème de l’analogie entre le physique et le mental dans Le Cahier brun, [1934-1935], trad. G. Durand, op. cit., pp. 244-250.
[39] Michel Dupuis, 2001, L’esprit sous-cortical, dans J.-N. Missa ed., Philosophie de l’esprit et sciences du cerveau, Paris, Vrin, p. 71-80.
[40] Jean-Noël Missa, L’esprit-cerveau. La philosophie de l’esprit à la lumière des neurosciences, Paris, Vrin, p.18-19.
[41] John R. Searle, [1983], L’intentionalité. Essai de philosophie des états mentaux, trad. Claude Pichevin, Paris, Minuit, 1985, p. 313.
[42] Op. cit., p. 11.
[43] Op.cit., p. 320.
[44] J.R. Searle, [1984], La relation corps-esprit, Du cerveau au savoir, trad. Catherine Chaleyssin, Paris, Hermann, 1985, p.15.
[45] Op.cit., p. 32.
[46] Op. cit., p. 34.
[47] Op. cit., p. 89.
[48] J.R. Searle, [1992], La redécouverte de l’esprit, trad. Claudine Tiercelin, Paris, Gallimard, p. 305.
[49] Israel Rosenfeld, [1992], La conscience, activité principale du cerveau, Une anatomie de la conscience, trad. Oristelle Bonis, Paris, Flammarion, p. 13-48.
[50] J.R. Searle, [1997], Israel Rosenfield, L’image du corps et le moi, Le mystère de la conscience, trad. C. Tiercelin, 1999, p. 193.
[51] Stuart F. Spicker ed., 1970, The philosophy of the body. Rejections of cartesians dualism, Chicago, Quadrangle Books.
[52] Michel Bitbol, 2000, Physique et Philosophie de l’esprit, Paris, Flammarion, p. 330-331.
[53] C.D. Broad, 1923, The traditional problem of body and mind, dans The mind and its place in the nature, London, Ed.Lund Humphries, p. 558.
[54] Jacques Hochmann, Marc Jeannerod, 1991, Esprit, où es-tu ? Psychanalyse et neurosciences, Paris, O.Jacob, Chap. 1 et chap.2.
[55] Rudolf Carnap, [1928], La construction logique du monde, trad.Thierry Rivain, Elisabeth Schwartz, Paris, Vrin, 2002, p. 275-276.
[56] W.V.O. Quine, [1951] Les deux dogmes de l’empirisme, dans PierreJacob ed., 1980, De Vienne à Cambridge. .L’héritage du positivisme logique de1950 à nos jours, Paris, Gallimard, p. 87-112.
[57] Voir sur ce point l’analyse d’Elisabeth Pacherie Naturaliser l’intentionnalité,Paris, P.U.F, 1993, p. 58-61.
[58] Thomas Nagel, [1974], Quel effet cela fait d’être une chauve-souris, Questions mortelles [1979], trad. P. Engel et C. Engel Tiercelin, Paris, P.U.F.
[59] Saul Kripke, [1972], La logique des noms propres, Paris, Ed. de Minuit, 1982, p. 141.
[60] Thomas Nagel, [1987], Le problème corps-esprit, Qu’est-ce que tout cela veut dire ?, 1993, trad. Ruwen Ogien, Paris, Ed. de L’éclat, p. 34.
[61] Wilfrid Sellars[1956], Empirisme et philosophie de l’esprit, trad. Fabien Cayla, Ed. de l’Eclat, 1992.
[62] J. Proust, 1998, Article Esprit, dans O.Houdé, D. Kayser, O. Kœnig, J.Proust, F. Rastier, Vocabulaire de sciences cognitives. Neuroscience, psychologie, intelligence artificielle et philosophie, Paris, P.U.F., p. 169-170.
[63] P.M. Churchland, [1995], Le cerveau, Moteur de la raison, siège de l’âme, Ed. de Boeck, 2001.
[64] Olivier Houdé, Bernard Mazoyer, Nathalie Tzourio-Mazoyer, La naissance d’une nouvelle discipline : l’imagerie cérébrale fonctionnelle, Cerveau et psychologie. Introduction à l’imagerie cérébrale anatomique et fonctionnelle, Paris, P.U.F., 2002, p. 1.
[65] Marc Jeannerod, La Nature de l’esprit, Paris, O. Jacob, 2002, p. 29.
[66] Serge Nicolas, Histoire de la psychologie française. Naissance d’une nouvelle science, Ed. In Press, 2002.
[67] Posner M., Pea, Volpe, 1982, Cognitive neuroscience : Developments toward a science of synthesis, dans J. Melher, E. Walker & M. Garett (Eds), Perspectives on mental representations, Hillsdale, NJ Erlbaum, p. 251-275
[68] Mikael Posner M., 2002, Les neurosciences cognitives, Synthèse de l’esprit et du cerveau, dans E. Dupoux ed., Les langages du cerveau, Paris, O.Jacob, p. 401-414.
[69] terme inventé fin des années1970 par Mickael S. Gazzaniga qui se rendait en compagnie de Georges A. Miller dans un taxi new-yorkais à un dîner de travail réunissant des chercheurs de la Rockfeller University et de Cornell University, cf « Brève histoire des neurosciences cognitives », dans M.S. Gazzaniga, Richard B. Ivry, Georges R. Mangoun, [1998], Neurosciences cognitives. La biologie de l’esprit, trad. 2001, De Boeck Université, p. 1-23. Le terme de sciences cognitives aurait été inventé selon Georges A. Miller le 11 septembre 1956.
[70] Roy J.M., 2001, L’émergence de la neuroscience cognitive, Cahiers Alfred Binet, Ed. B. Andrieu, L’Histoire du cerveau, Juin, n°667, p. 9-33.
[71] Aline Pélissier, Alain Tête, 1995, Sciences cognitives. Textes fondateurs (1943-1950), Paris, P.U.F., p.XI-XXIV.
[72] John von Neumann, [1956], L’ordinateur et le cerveau, trad. P. Engel, Paris, Ed. La découverte, 1992.
[73] W. Bechtel, A. Abrahamsen, [1991], Le connexionisme et l’esprit. Introduction au traitement parallèle par réseaux, trad. 1993, Paris, Ed. de la découverte, p. 272-322.
[74] B Andrieu, 1991, « Intelligence Artificielle : la tentation des sciences sociales. Des neurosciences sociales ? », Technologie Idéologies Pratiques TIP, Sciences sociales et Intelligence artificielle, Université de Provence, vol. X., n°2-4, p. 223-237.
[75] Patricia Kitcher, 1996, « From Neurophilosophy to Neurocomputation : Searching the Cognitive Forest », dans R. N. McCauley ed., The Churchlands and theirs critics, Blakwell, p.48-85.
[76] Jodouin J.F., « Les modèles connexionnistes », Intellecta, Paris, n°9-10, 1990, pp. 9-39.
[77] Bienenstock(Elie), « Visual pattern processing using a neural -network-based approach », dans Georges Vignaux ed.,Les sciences cognitives en débat, Paris, CNRS, 1991, pp. 301-315.
[78] David Marr, 1982, Vision, : a Computational Investigation into the Human Representation and Processing of Visual Information, San Francisco, Freeman.
[79] Georges Vignaux, 1992, Les sciences cognitives, une introduction Paris, La découverte, p. 172.
[80] Paul M. Churchland, 1989, Some Reductive Startégies in Cognitive Neurobiology, A Neurocomputational Perspective. The Nature of the Mind and the Structure of Science, MIT Press, chap.5.
[81] Jean Bullier, Paul Salin et Pascal Girard, 1992, Le cerveau en temps réel , La Recherche, 246, sept. , vol. 23, p. 977 et p. 980.
[82] Francisco Varela et Evan Thompson, « Color Vision : a case study in the foundations of cognitive science », Revue de Synthèse, IVe S. Nos 1-2, Janvier-juin 1990, pp. 129-138 ; repris dans leur livre L’inscription corporelle de l’esprit, chap. 8, notamment « l’auto-organisation revisitée : l’exemple de la couleur », Paris, Le Seuil, 1993.
[83] Semir Zeki, 1992, Les images visuelles, Pour la science, n°181, nov., p. 64.
[84] Patricia S. Churchland, Terrence J. Sejnowski, 1992, Representing in the brain : What can we learn from the visual system ?, Computational Brain, MIT Press, p. 157-162.
[85] P.S. Churchland, 2002, How Do Brains Represent ?, Brain-Wise. Studies in Neurophilosophy, p.273-319.
[86] B. Andrieu, 2003, Le laboratoire du cerveau psychologique. Histoire et Modèles, Paris, Ed. CNRS.
[87] J. Ioteyko, La fatigue, Paris, Flammarion, Bibliothèque de Philosophie Scientifique, 1920.
[88] Op. cit., p. 86.
[89] D. Davidson, [1980], Actions et Evénements, Paris, P.U.F., trad. P. Engel, 1983. Cf P. Engel, Introduction à la philosophie de l’esprit, Paris, Ed. De la découverte, 1994, Chap.1.
[90] J.A. Fodor, Z.W. Pylyshyn, [1988], Connexionnisme et architecture cognitive, analyse critique, trad. Bruno Vivicorsi et Rémi Clignet, Bulletin de Psychologie, tome 55 (7), 457, Janvier-févr. 2002, p. 9-50. ici p. 45.
[91] F. Eustache, M. Wolf Ed., 2002, Trouble neurologique, Conflit psychique, Monographies de Psychopathologie, Paris, P.U.F., p. 7.
[92] B. Andrieu, 2002, La chair du cerveau. Phénoménologie et biologie de la cognition, Ed. Sils Maria.
[93] Marc Jeannerod, Henry Hecaen, Adaptation et restauration des fonctions nerveuses, Villeurbanne, Simep, 1979.
[94] Pierre Karli, « Le développement d’une identité biologique multiple », Le cerveau et la liberté, Paris, O. Jacob, 1995, p.55-88.
[95] Michel Morange, La part des gènes, Paris, O. Jacob, 1998.
[96] Renaud Barbaras, « De la phénoménologie du corps à l’ontologie de la chair », Le tournant de l’expérience. Recherches sur la philosophie de Merleau-Ponty, Paris, Vrin, 1998, p. 95-136.
[97] Marc Richir, « Le problème de l’incarnation en phénoménologie », M.-P. Haroche ed., L’âme et le corps. Philosophie et psychiatrie, Paris, Plon, 1990, p. 163-184.
[98] F.J.Varela, E. Thompson, E. Rosch, [1991], L’inscription corporelle de l’esprit. Sciences cognitives et expérience humaine, Paris, Le Seuil, 1993, p. 234.
[99] Op. cit., p. 235.
[100] F. J. Varela ed., [1997], Dormir, rêver, mourir. Explorer la conscience avec le Dalaï-Lama, Paris, 1998.
[101] Muriel Combes, « La relation transindividuelle » , Simondon. Individu et collectivité. Pour une philosophie du transindividuel, Paris, P.U.F., 1999, p.48.
[102] André Pichot, 1991, Petite phénoménologie de la connaissance, Paris, Aubier, p. 21.
[103] Michel Lefeuvre, 1997, Les échelons de l’être. De la molécule à l’esprit, Paris, L’Harmattan, p.127-176.
[104] B. Andrieu, 2003, Le somaphore. Naissance du sujet biosubjectif, Liège, Ed. Sils Maria
[105] A.R. Damasio, 1999, Le sentiment même de soi. Corps, émotions, Conscience, trad. Claire Larsonneur et Claudine Tiercelin, Paris, O.Jacob, p. 149.
[106] V.S. Ramachandran, [2000], Le fantôme intérieur, trad. Michèle Garène, Paris, O. Jacob, 2002, p. 48.
[107] Alain Berthoz, 2003, La décision, Paris, O. Jacob, p. 170.
[108] Pour comprendre comment la physiologie de Descartes n’est pas si mécanique, Denis Kambouchner, 1994, L‘Homme des passions, tome 1, Paris, Albin Michel, chap. II, L’explication physique, p.131-205. Notre présentation des textes de Descartes, « Cerveau et glande pinéale chez Descartes », dans B. Andrieu ed., 2002 L‘invention du cerveau, PressPocket, n°233, p. 43-63.
[109] Antonio R. Damasio,1994, Descartes’Error. Emotion, Reason, and the Human Brain, trad. franç.Marcel Blanc, L’erreur de Descartes. La raison des émotions, Paris, O.Jacob, 1995, p. 121-122.
[110] Op. cit., p. 124.
[111] Marc Renneville, 2000, Le langage des crânes, Une histoire de la phrénologie, Paris, coll. Les Empêcheurs de penser en rond, p. 23-76. « De la phrénologie », dans B. Andrieu ed., 2002, L‘Invention du cerveau, Press Pocket n°233, p.77-110.
[112] Op. cit., p. 139.
[113] Op. cit., p. 141.
[114] Jean-Didier Vincent, 1986, La biologie des passions, Paris, O. Jacob.
[115] Op.cit., p. 183.
[116] Op. cit., p. 285.