Roseline Bonnellier : « Pour introduire à une lecture de L’interprétation du rêve de Sigmund Freud » (3)

Notes de cours (extraits) de Roseline Bonnellier, chargée d’enseignement en 2010-2015 dans l’UFR d’« Études psychanalytiques » à l’université Paris VII Denis-Diderot.

Suite de :

Avertissement :

  1. Bonnellier se réfère davantage à la nouvelle traduction des OCF.P (PUF/Quadrige) tout en reliant le plus possible notions, références et citations à l’ancienne traduction bien connue de Meyerson (M.).

Références bibliographiques principales :

Sigmund Freud,

  • Die Traumdeutung (1900), dans Sigm. Freud, Gesammelte Werke II/III (GW II/III), Fischer Taschenbuch Verlag, Frankfurt am Main, 1999.
  • L’Interprétation des rêves (La Science des rêves, 1926), traduction d’Ignace Meyerson (M), nouvelle éd. révisée par Denise Berger en 1967, Paris, PUF, 1987.
  • L’interprétation du rêve, traduit par Janine Altounian, Pierre Cotet, René Laîné, Alain Rauzy et François Robert, dans Sigmund Freud, Œuvres complètes Psychanalyse (OCF.P), tome IV, Paris, PUF, 2003 ; Quadrige / PUF, avec préface de François Robert, 2010.

GRILLE DE LECTURE POUR LA SUITE (3)

 

CHAPITRE III. Le rêve est un accomplissement de désir/souhait [M : p. 113-122 ; OCF.P : p. 157- 168] :

Introduction : autour de la thèse principale du rêve comme « accomplissement de souhait » quant à la suite des rêves analysés par Freud dans la Td :

Le chapitre II avec le rêve de l’injection faite à Irma, rêve complexe, introduisait et démontrait la thèse de Freud : Le rêve est un accomplissement de souhait.

  • (p. 157) « [Le rêve] est un phénomène psychique à part entière et pour tout dire un accomplissement de souhait ; il doit être inséré dans l’ensemble cohérent des actions animiques de l’état de veille qui nous sont compréhensibles ; une activité hautement compliquée de l’esprit l’a édifié. »

Mais une « multiplicité de questions » se posent : « d’où provient la forme frappante et déconcertante dans laquelle cet accomplissement de souhait est exprimé ? » Freud s’avance donc vers ce qui donne le titre au chapitre qui suit : la déformation de rêve (/M : « dans le rêve »).

– Rêves de commodité

– Rêves d’enfants : avec le fameux « rêve des fraises » d’Anna Freud. Les rêves des petits enfants sont souvent de « simples accomplissements de souhait », ils « n’offrent pas d’énigme à résoudre » comme ceux des adultes.

Chapitre IV [M : p. 123-147 ; OCF.P : p. 169-197] : La déformation de rêve (die Traumentstellung) [/ M : La déformation dans le rêve] :

Dans le chapitre IV suivant sur « la déformation de rêve (/ M : dans le rêve) »,  où arrivent le rêve de l’oncle, le rêve de la belle bouchère, le rêve de l’enfant mort, voici dans quelle suite de l’argumentaire de Freud ces rêves vont se présenter :

– p. 170-171 : rêves qui semblent s’inscrire en faux contre la thèse générale de l’accomplissement de souhait, comme les rêves d’angoisse (celui ou ceux de l’enfant mort sont pratiquement des cauchemars). Distinction importante que Freud dégage : le contenu de rêve manifeste et le contenu de rêve latent (citation p. 170).

– Dans l’interprétation du rêve de l’oncle, nous avons l’argument combien important de la censure de rêve (/ dans le rêve) qui provoque la déformation.

Le rêve de la bouchère s’inscrit dans le cadre des rêves de souhait inaccompli et décrit le trajet indirect de l’identification hystérique.

– Arrivent ensuite et encore l’objection à la thèse du rêve comme  accomplissement de souhait avec les rêves à contenu pénible et les accomplissements de souhait méconnaissables. C’est là qu’interviennent le ou les rêves de l’enfant mort. Ce dernier rêve revient beaucoup dans le chapitre VII de métapsychologie, car son analyse fait grandement question et semble non finie.

– Contenu de rêve manifeste et latent

– *Rêve de l’oncle : La censure de rêve [dans le rêve] (die Traumzensur)

– Rêves à contenu pénible

– Rêves de souhaits inaccomplis, l’identification hystérique – *rêve de la bouchère

– Objections à la théorie de l’accomplissement de souhait

– Accomplissements de souhait méconnaissables (unkenntliche) – *Rêve de l’enfant mort  (M. : p. 138-140, Charles et Otto, infanticide, p. 140-142 ; plus loin dans la Td, 217 : *rêves de la mort de personnes chères ; p. 433-434 : *Père, ne vois-tu pas que je brûle ? [chap. VII] ; p. 453 sq) : le motif du rêve était le désir de représenter l’enfant encore vivant, régression figuration de la scène comme actuelle, transformation en images visuelles et discours ; p 460 : caractère régrédient du rêve (métapsychologie du chap. VII, 1ère topique) ; 467-468 : contradiction du cauchemar, signification des pensées de la veille qui se prolongent dans le sommeil, stimulation d’une impression sensorielle ; p. 485-486 : nous ne pouvons pas analyser ce rêve, le désir de dormir seconde les désirs inconscients.

– Rêves de contre-souhait

– Le rêve comme accomplissement de souhait

– Rêves d’angoisse (die Angstträume)

  • Le rêve de l’oncle à la barbe jaune (Chapitre IV : la déformation de rêve, P, pp. 172-180)

Cf. aussi l’interprétation sur « L’oncle Josef » par Octave Manonni dans Freud, Écrivains de toujours / Seuil, 1968, dans le chapitre consacré à la Td, pp. 73-79 :

– O. Manonni, plus nettement que Freud intimement concerné par ce rêve qui est le sien, « appelle un chat un chat » et prononce le mot « juif » clairement. Ce rêve concerne la judéité de Freud et l’obstacle que celle-ci représente dans l’avancée de sa carrière à Vienne en Autriche.

– L’ami R. est l’oncle Josef par condensation : c’est une combinaison d’images. O. Manonni relève que l’importance prise par « la barbe – sa clarté particulière – doit être un déplacement » que Freud remarque sans l’expliquer : « ce devait être trop personnel ! » estime O. Manonni. « Tout n’est pas encore interprété, il s’en faut » (O. Manonni).

– Le « souhait du rêve » – O. Manonni dit « le désir du rêve » : « que les échecs de ses collègues s’expliquent par des raisons qui ne soient pas valables pour lui ». (p. 76 de Manonni).

– Reste « une partie du rêve que l’interprétation n’a pas touchée » (Freud) [O. Manonni pp. 76-77] : la pensée latente du rêve – R. est un faible d’esprit – est une « distorsion » par rapport aux vrais sentiments du rêveur Freud, c’est une « calomnie », qui doit être masquée  « hypocritement » par une « distorsion en sens contraire » : le sentiment d’affection.

Les 2 distorsions, explique O. Manonni à la suite de Freud, ne viennent pas du même « lieu » ou de la même « instance » : « la calomnie fait partie de la pensée qui a été refoulée. L’affection est au service du refoulement. » (O. Manonni). [Je souligne auprès de vous les mots importants, devenus des « concepts » psychanalytiques. RB]. La calomnie est au service du « désir » [souhait] : le désir d’être nommé + un « désir inconscient de l’enfance » qui s’y est « transféré » (O. Manonni), c’est dans la pensée latente du rêve.  L’affection ne sert qu’à dissimuler le mensonge et à innocenter le rêveur.

– Le « travail du rêve » rapporte deux souvenirs d’enfance (Manonni pp. 78-79) : la source de l’ambition de Sigmund Freud s’enracine dans la sexualité infantile, rapport que O. Manonni fait avec le « complexe d’Œdipe » en train de se découvrir en même temps que s’écrit la Td. [RB : Attention ! Le mot « complexe » n’existe pas encore au moment de la Td. Didier Anzieu signale dans L’autoanalyse de Freud que le mot « complexe » a été donné par Jung et n’arrive qu’en 1910 dans la théorie freudienne.] N.B. : l’ambition serait d’origine urétrale, note Freud.

 

Chapitre V. Le matériel et les sources du rêve (M : p. 148- 240 ; OCF.P  p. 199-317).

– Sections A : « Le récent et l’indifférent dans le rêve » et B : L’infantile comme source du rêve  (M. : jusqu’à la p. 193 et OCF.P jusqu’à la p. 257)

Sections C : « Les sources somatiques du rêve » et D : « Rêves typiques » (OCF.P. p. 258-317)

Le chapitre V est un très long chapitre comportant de grands rêves comme le  *rêve de la monographie botanique.

 Le caractère général du rêve, à savoir que le rêve est un accomplissement de souhait, ayant été mis à jour, sans que toutefois le sujet en soit épuisé, nous pouvons nous permettre, dit Freud, de « revenir en arrière » … pour « nos flâneries (Streifungen)  à travers les problèmes du rêve ».

La méthode d’interprétation met à découvert le contenu de rêve latent, en laissant loin derrière lui « en fait de significativité (Bedeutsamkeit) le contenu du rêve manifeste. Les énigmes et contradictions paraissaient inabordables tant qu’on ne connaissait que le contenu du rêve manifeste.

Il s’agit de se pencher sur « la corrélation entre le rêve et la vie de veille (Zusammenhang des Traums mit dem Wachleben» et « la provenance du matériel du rêve ». […]

Le récent et l’indifférent dans le rêve

Le rêve se rattache aux expériences de la journée qui vient de s’écouler.

  • Dans les longues notes en bas de pages (OCF.P, 203, 204), ajouts des années 1910/1911, l’expérience du rêve fait invalider à Freud la doctrine de Fliess sur les périodes (23 jours pour la masculine, 28 jours pour la féminine)

(OCF.P, 205) Il y a pour chaque rêve « un excitateur du rêve » (Traumerreger): qui provient des expériences vécues (Erlebnissen) qu’on n’aurait pas encore abréagies en quelque sorte en « passant une nuit de sommeil » après.

La relation du passé tout récent au contenu du rêve  n’est pas différente de celle « provenant de n’importe quelle époque plus éloignée ». [RB : Cf. Méditation grammaticale associative sur  le discours indirect en grammaire allemande : contrairement au français il n’y a pas de concordance des temps (entre la principale et la subordonnée) ! Le Discours Indirect dans la vie diurne « réelle » s’exprime en allemand par le changement de mode, le passage au Subjonctif, principalement le Subjonctif 1 pour celles et ceux qui auraient  fait de l’allemand jusqu’à un niveau plus poussé, disons LV1 du 2e cycle au lycée]. Toute époque de la vie peut être choisie, à condition qu’il existe un fil de pensée (Gedankenfaden), un « pense-bête » (associations au « fil d’Ariane », aux cailloux du Petit Poucet… mais c’est aussi comme ça que fonctionnent la langue allemande et les langues germaniques : le contact avec les choses concrètes est gardé dans les mots ; il n’y a pas l’écran amnésique du latin comme dans les langues romanes.]  On voit que Freud découvre, applique, vérifie la règle de libre association.

Mais d’où vient la préférence donnée aux impressions récentes ?

Rêve de la monographie botanique (205 sq ;  M. :153 sq) :

1er niveau d’interprétation : le cyclamen, la fleur favorite (Lieblingsblume) de sa femme ; l’oubli – celui d’apporter des fleurs à sa femme. Déplacement sur une histoire racontée dans un cercle d’amis pour prouver que « l’oubli est très souvent l’exécution d’une intention de l’inconscient et permet de toute façon d’inférer la disposition d’esprit secrète de celui qui oublie ». Histoire de la jeune femme qui pleure parce que son mari a oublié de lui apporter des fleurs et de lui souhaiter son anniversaire.

2e niveau : le souvenir de son écrit de 1884 « De la coca », la monographie de Freud sur la coca + sa « fantaisie diurne » (/ M. : « fantasme diurne » – D. : Tagesphantasie. RB : Cf. le problème de traduction pour die Phantasie : voir le Vocabulaire de la psychanalyse Laplanche et Pontalis (1967) à « fantasme », tr. « fantasmes conscients ou rêves diurnes » ; # mot discuté dans la « terminologie raisonnée » de J. Laplanche dans Traduire Freud en 1988 avec adoption, sur une suggestion de D. Lagache, du mot français « fantaisie » pris dans son sens ancien) « Fantasme / fantaisie diurne » donc associée à l’opération du glaucome de son père par un ami ophtalmologiste, le Dr Königstein, tandis que le Dr Koller procédait à l’anesthésie par cocaïne. L’élément excitant du rêve : la coca. Conversation de la veille au soir (avec le Dr Königstein).

Elément diurne : dans le vestibule, le Dr Gärtner (= « Jardinier ») et sa jeune femme félicités sur leur mine « florissante ». Travail sur la représentation de mot signifiante (mot pris comme chose : processus primaire)

L’herbier : souvenir de lycée. Le Bücherwurm : (= « ver des livres »), en français « rat de bibliothèque ». Association à l’examen de Freud en botanique (p. 208). Embarras. Les crucifères et l’artichaut, la fleur favorite de Freud / la planche en couleurs repliée + souvenir d’enfance / souvenir couverture : arracher les feuilles page à page d’un livre remis exprès par leur père pour qu’ils le détruisent. Cf. p. 209 (OCF.P) bibliophilie de Freud…  « Je cédais trop à mes occupations favorites ».

Comme dans le rêve d’Irma, il s’agit d’un plaidoyer, d’un rêve en sa faveur ? Avec un accent porté sur la reconnaissance de l’homme Freud qui a bien écrit ce travail de valeur  sur la cocaïne. […]

Maillons intermédiaires : L’homme ayant troublé la conversation s’appelle Gärtner, sa femme est « florissante » et souvenir d’une patiente qui s’appelle Flora. Fusion des 2 sphères de représentations en une seule. Domaine d’influence sans limite du Witz ou trait d’esprit. La monographie convenait le mieux à la connexion (destin).

Processus de déplacement de rêve / processus davantage « primaire » (annonce chapitre VII, section E)

L’accueil des restes d’expériences vécues accessoires  correspond à la déformation de rêve  (par déplacement), laquelle est une conséquence de la censure (214).

Les relations entre l’impression du jour précédent et la source du rêve ne sont pas toujours là d’emblée : elles « ne sont établies pendant le travail du rêve qu’après coup, en quelque sorte au service du déplacement visé. Il faut donc qu’il existe une obligation à frayer des voies de liaison » vers l’impression récente indifférente et que celle-ci s’y prête par telle ou telle qualité [vocabulaire de l’Esquisse, Entwurf, traduit plus littéralement par J. Laplanche Projet].

OCF.P, p. 215 : Le rêve obéit à une contrainte, celle de former, à partir de deux expériences vécues dignes de susciter des rêves, une unité. Note 1909-1922 p. 216 (OCF.P) : cette contrainte à la composition est une partie de la condensation.

Source excitatrice du rêve : L’excitateur du rêve peut être un processus interne qui est en quelque sorte devenu récent par le travail de pensée de la journée.

En résumé, sur la source du rêve  (OCF.P, 217) :

[…] OCF.P, p. 217 : « Il y a une condition qui est maintenue sans exception pour l’interprétation du rêve : c’est qu’un constituant du contenu de rêve répète une impression récente du jour précédent. Cette part destinée à la représentance (Vertretung) peut appartenir à la sphère de représentations de l’excitateur du rêve […] ou bien provenir du domaine d’une impression indifférente qui a été mise en relation », selon qu’il y a déplacement ou non. […]

Rêves innocents (résultats de la psychanalyse chez les névrosés) : il n’y a pas d’excitateurs du rêve indifférents, donc pas de rêves innocents non plus (OCF.P, 219), sauf les rêves des enfants. « Le rêve ne s’adonne jamais à des vétilles », nous ne rêvons jamais pour rien. OCF.P, 220 : les rêves « ont plus d’un tour dans leur sac » (220)  Exemples donnés I. la jeune dame sur le marché p. 221 adresse à l’analyste. (221) « fermer l’étal du boucher » (la braguette). Jeu de mots schwarzer Rettich (= « radis noir » littéralement). II. Rêve d’accorder le piano  Brustkasten (= « caisse de [la] poitrine », littéralement) : la poitrine. III. Rêve du jeune homme au pardessus  (condom). IV. Rêve de la bougie cassée dans le bougeoir de la jeune patiente. V. Rêve de la petite malle.

OCF.P, 225 : « Dans tous ces rêves « innocents », c’est le facteur sexuel qui se signale de la façon la plus frappante comme le motif de la censure ».

L’infantile comme source du rêve (OCF.P, 226-258)

Le *rêve des Trois Parques (Rêve des Parques / des Knödel : M. :181-4, OCF.P : 242-246, 272) et le *rêve révolutionnaire du comte Thun (OCF.P pp. 246-257) sont deux rêves importants concernant les sources infantiles du rêve.

La preuve contraignante

Rêves dit pérennes – le lion jaune (227) : das begehrteste Spielzeug= « le jouet le plus désiré ».

Souvenir de jeunesse – *la monographie botanique.

(228-229) « le souhait qui a lui-même été l’excitateur du rêve – le rêve se présentant comme son accomplissement – est issu de la vie d’enfance » On trouve « dans le rêve l’enfant continuant de vivre avec ses impulsions » (Impulse).

L’ambition infantile dans le rêve de l’oncle – les prophéties du grand homme et du ministre et la judéité (229-230).

Rêves de Rome de Freud : Rêve de la désirance (Sehnsucht) pour Rome (231-235) :

L’humiliation du père de Freud (234-235) et l’ambition d’être Hannibal (Cf. Roseline Bonnellier, juillet 2013, « Freud de ‘tous les chemins mènent à Rome’ » dans la revue psychanalytique en ligne D’un divan l’autre, site : http://www.dundivanlautre.fr/ ).

Mise à découvert d’expériences vécues dans l’enfance

Autres rêves de patient(e)s : soif insatiable d’amour (238), transfert sur Freud…

Rêve des trois femmes, des Parques (242 sq ; M. 181-184) ; l’anecdote du jeune homme et de sa belle nourrice : illustration de l’après-coup [= la *Nachträglichkeit. *Sur la « traduction » du concept freudien de la Nachträglichkeit avec l’apport que suppose toute la théorie de la séduction généralisée de Jean Laplanche, cf. R. Bonnellier (mai 2013), « Nachträglichkeit / « Postférabilité » (HÖLDERLIN, LAPLANCHE, FREUD) », dans D’un divan l’autrehttp://www.dundivanlautre.fr/ ],  p. 243, souvenir d’enfance quant aux Knödel : « tu es redevable d’une mort à la nature » ; le plagiat, le vol de redingote…

L’un des fils concernant le matériel du rêve : « cette façon de jouer sur les noms relève des vilaines manières des enfants » (245)

(246 sq) Un rêve révolutionnaire : le comte Thun. Récit du rêve p. 248.

Matériel infantile contribuant au rêve (253 sq) Les problèmes urinaires de l’enfant reliés chez Freud au thème de la soif des grandeurs de l’enfant (p. 256 sq), à l’ambition [RB : le mythe du héros, jonction avec Otto Rank].

Caractéristique du Chap. V : l’importance de l’infantile dans le rêve :

Le chapitre V démontre quelque chose de nouveau par rapport au rêve comme accomplissement de désir, Anzieu le formule exactement (D. Anzieu, L’auto-analyse de Freud I, 373) : « le désir réprimé de la veille ne produit un rêve que s’il s’associe à un désir réprimé de l’enfance ».

OCF.P, 256-257 : « chaque rêve comporterait dans son contenu manifeste un point de rattachement au vécu récent, mais dans son contenu latent un point de rattachement au vécu le plus ancien dont je puis effectivement montrer dans l’analyse de l’hystérie qu’il est, au bon sens du terme, resté récent jusque dans le présent. » Phrase de Freud qui me paraît reprendre l’essentiel, à savoir l’extrême importance de la sexualité infantile, ce qui est la grande découverte de la psychanalyse avec le lien également capital qui est fait avec l’hystérie.

Rêves typiques

Les *rêves « typiques » de la mort des personnes chères introduisent au « complexe d’Œdipe » à un moment de la Td où le mot « complexe » n’est pas encore là (Rappel : il sera donné par Jung et n’arrivera qu’en 1910, nous informe Didier Anzieu dans L’auto-analyse de Freud). La théorie proprement dite du complexe « nucléaire » des névroses dites « de transfert » n’est donc pas encore mise en place autour du « complexe de castration », qui provient surtout de « L’analyse du petit Hans » (1905) supervisée par Freud. La Td, au chapitre V, et encore par rapport aux « sources infantiles du rêve », dégage le lien profond de la sexualité infantile refoulée dans « l’inconscient », au sens freudien où « l’inconscient » serait en quelque sorte « créé » après coup (nachträglich) par le « refoulement » en tant que « refoulé » (RB : je me réfère ici à l’œuvre et à la théorie de Jean Laplanche).

Sur la question du « rêve typique » et de « l’Œdipe »:

La section D (dernière section) du Chap. V. sur les rêves typiques (OCF.P, p. 288-308)

comporte les paragraphes suivants :

– le rêve de l’embarras dû à la nudité, plaisir-désir d’exhibition chez l’enfant, apport de l’infantile au rêve de nudité

– Les rêves de la mort de personnes chères

– Autres rêves typiques comme les rêves de vol et de mouvement

– le rêve d’examen

RB (Réflexions) : l’Œdipe, comme vous vous en êtes peut-être rendu compte, la théorie de l’Œdipe freudien recouvert par « le retour à Freud » lacanien de 1953, de la psychanalyse française, n’a plus trop bonne presse aujourd’hui, bien qu’il soit complètement maintenu : ce qui est maintenu, c’est la « castration ». Mais dire seulement « la castration », c’est lire Freud avec les lunettes de Lacan, celles du « retour à Freud » (Lacan, « Discours de Rome, 1953). Freud parle quant à lui du « complexe de castration ».

 

Chapitre VI (p. 241-432 ; OCF.P p. 319-559) Le travail de rêve (Traumarbeit)

Voici le plan du chapitre VI, qui est également un très gros chapitre :

Important par rapport, notamment, aux 2 notions : la condensation et le déplacement.

  1. [M. I] Le travail de condensation (die Verdichtungsarbeit)
  2. [II] Le travail de déplacement (die Verschiebungsarbeit)
  3. [III] Les moyens de présentation [M. : figuration] du rêve

(die Darstellungsmittel)

  1. [IV] La prise en considération de la présentabilité [M. : figurabilité]

(Darstellbarkeit)

  1. [V] La présentation au moyen de symboles dans le rêve. Autre rêves typiques [la symbolique…]

Symboles et autres rêves typiques 

– Rêve du Prater (représentation des organes génitaux), 312

– Symbolique urinaire (et rêve de réveil), (M. : 315 ; OCF.P : 413-415)

– d’escalier (Otto Rank), 315-16

– de dents, de vol,  de chutes (M. : 331-9 OCF.P : 432-443)

  1. [VI] Exemples. Calculs et paroles dans le rêve (Rechnen und reden im Traum): Travail sur les mots, locutions, nombres et calculs
  2. [VII] Rêves absurdes.

Les opérations intellectuelles dans le rêve

Les rêves absurdes, l’activité intellectuelle en rêve, 363 sq

 L’absurdité du contenu de rêve n’est qu’une apparence (travail de rêve)

            – Rêve du « Père sur son lit de mort », (OCF.P : 476-477, 496)

 H.[VIII] Les affects dans le rêve (OCF.P 509)

  1. [IX] L’élaboration secondaire (die sekundäre Bearbeitung)

Noter : « Pensées de rêve et contenu de rêve s’offrent à nous comme deux présentations du même contenu en deux langues distinctes, ou pour mieux dire, le contenu de rêve nous apparaît comme un transfert de pensées de rêve en un autre mode d’expression dont nous devons apprendre à connaître les signes et les lois d’agencement par la comparaison de l’original et de sa traduction. » (319) [cf. Lettre à Fliess  52/112]

Mots : die Übertragung : le transfert

             die Übersetzung : la traduction

Le travail de condensation (die Verdichtungsarbeit)

« A été effectué : un prodigieux travail de condensation » (Verdichtungsarbeit), alors que le rêve est « concis, pauvre et laconique, comparé à l’ampleur et à la richesse des pensées de rêve. » […]

Nous avons bien souvent la sensation d’avoir rêvé beaucoup de choses pendant la nuit et d’en avoir oublié ensuite la plus grande partie. Le rêve dont nous nous souvenons serait un reste de la totalité du travail de rêve.

Le souvenir du rêve serait lacunaire. Mais d’un autre côté, la sensation d’avoir rêvé beaucoup plus que ce qu’on peut en reproduire au réveil repose, dit Freud, sur une illusion (Illusion). […]

Condensation de mots (OCF.P : 339 sq) : « les mots sont fréquemment traités par le rêve comme des choses et connaissent alors les mêmes compositions que les représentants de chose. »

Le travail de déplacement  (Die Verschiebungsarbeit)

OCF.P : pp. 349 et suiv.

– p. 349 : « Ce qui dans les pensées de rêve est à l’évidence le contenu essentiel n’a nul besoin d’être représenté. Le rêve est en quelque sorte autrement centré, son contenu prend pour point central d’autres éléments que les pensées de rêve. » Exemple du rêve de la monographie botanique. Relation d’opposition lâche  avec la botanique (au centre du rêve), laquelle n’est pas l’une des occupations préférées de Freud ;

– p. 350 Rappel du « Rêve de l’oncle » : La barbe blonde au centre semble n’avoir aucune relation de sens avec les souhaits de grandeur (noyau des pensées du rêve).

« De tels rêves donnent donc à bon droit une impression de « déplacé » »

Au contraire de ces exemples : le rêve de l’injection faite à Irma : « les différents éléments peuvent bien se maintenir à la place qu’ils occupent dans les pensées du rêve. » […]

Ch. VII (M. : p. 433-528 ; OCF.P: p. 561-677) : Sur la psychologie des processus du rêve. [Approche de la métapsychologie freudienne, 1ère topique : Cs, Pcs, Ics]

  1. La régression (586-603) avec les schémas de l’appareil psychique (1ère topique) O : p. 590-594 ; M. p. 456-459

[Références bibliographiques en allemand: Freud, Gesammelte Werke, II/III Die Traumdeutung, Frankfurt am Main, Fischer Taschenbuch Verlag, 1999, B. Die Regression, pp. 538 et suiv.]

Rêve de L’enfant mort qui brûle [Chapitre VII (OCF.P : 561-563, 567-568, 586-587, 595, 604, 625)]

Mots en allemand:

[N.B. : Graphie (rappel) : β = ss. Exemple : Flieβ équivaut à Fliess. N.B. : La réforme officielle de l’orthographe en allemand date seulement de 2005 (dans les dictionnaires actuels). Elle ne concerne évidemment pas les écrits de Freud. ]

 1ère théorie de l’appareil psychique [der psychische Apparat / der seelische Apparat : l’appareil animique (tr. OCF.P) – die Seele, « l’âme »]

das Bewusste: le Conscient (Cs); das Bewusstsein : la conscience (psychologique) ; das Bewusstwerden : le « devenir conscient »

das Vorbewuβte (Vbw): le Préconscient (Pcs)

das Unbewuβte (Ubw): l’Inconscient (Ics)

Ces 3 concepts sont des participes passés substantivés formés à partir du verbe wissen, « savoir » (verbe faible irrégulier, participe passé : gewusst)

Die Wahrnehmungen (W) : les perceptions (Pc) [wahrnehmen (littéralement traduit): « prendre pour vrai »] ; das Wahrnehmungsende: l’extrémité-perception; das sensible Ende: l’extrémité sensitive; les Reize (excitations) : stimuli

Die Motilität : la motilité (M), das motorische Ende : l’extrémité motrice

die Erinnerungsspur (Er) : la trace mnésique (S=souvenir) [verbe : sich erinnern : se souvenir au sens littéral : intérioriser ; la Erinnerung est une « intériorisation », une « mise à l’intérieur »]

das Gedächtnis : la mémoire, vient du verbe denken : penser

Réf. bibliogr. complémentaires : Octave Mannoni Freud, Seuil (résumé – dans le sillage de Lacan)

Jean Laplanche, Sexual, PUF, 2007, « Rêve et communication : faut-il récrire le chapitre VII ? », pp. 51-78.

Où en sommes-nous dans la Td quand on aborde le chapitre VII à la section II, la régression ?

Lecture de la p. 63 dans Sexual (2007) de Jean Laplanche, extrait de l’article « Rêve et communication : faut-il réécrire le chapitre VII ? » :

  1. Laplanche sur la composition de la Td: « La Traumdeutung est un travail immense. L’essentiel des chapitres II à VI est consacré à deux trajets, considérés comme réciproques, même s’ils ne sont pas identiques : le trajet interprétatif, remontant du récit du rêve à ses éléments d’origine, et, à l’inverse le trajet du travail de rêve, supposé rendre compte réellement de la genèse du rêve rêvé et du rêve raconté. »

Regroupement des principaux résultats de l’investigation menée jusqu’ici :

  • Le rêve est un acte psychique complet;
  • sa force de pulsion est toutes les fois un souhait à accomplir ;
  • la méconnaissance qu’il rencontre comme souhait, et ses bizarreries et absurdités proviennent de la censure psychique : déformation opérée par le travail de rêve
  • en dehors de l’obligation de se soustraire à cette censure ont concouru à la formation du rêve une obligation de condensation du matériel psychique, une prise en considération de la présentabilité en images sensorielles et – même si ce n’est pas régulièrement – la prise en considération d’un aspect rationnel et intelligible du rêve finalement formé (élaboration secondaire, section I du chapitre VI, 539-559)

Rappel du *rêve de l’enfant qui brûle : L’un des motifs du rêveur est le souhait de représenter l’enfant vivant ; si l’on défait (macht man diese rückgängig…) cet accomplissement de rêve… p. 387 : le seul caractère qui différencie les deux sortes d’advenir psychique, le rêve et la pensée du rêve, c’est que dans le rêve la situation est appréhendée « au présent et avec les sens, comme une expérience vécue de l’état de veille ».

2 caractères presque indépendants marquent la forme d’apparition du rêve de l’enfant qui brûle :

1) Présentation de la pensée comme situation au présent avec omission du « peut-être »

2) transposition de la pensée en images visuelles et en paroles

Le présent pour l’optatif

Mais l’accomplissement de souhait joue dans ce rêve un rôle accessoire.

Dans le rêve de l’injection faite à Irma, le rêve refoule l’optatif : « si seulement le responsable de la maladie d’Irma pouvait être Otto ! », et le remplace par un simple présent : « oui, Otto est responsable de la maladie d’Irma. »

« Le présent est la forme temporelle sous laquelle le souhait est présenté comme accompli »

Mais cette mise en « présence » – qui fait partie de la « présentabilité » (OCF.P / M. : figurabilité) –, on l’a aussi dans les « rêves diurnes », fantaisies, fantasmes diurnes.

Particulier au rêve (non diurne) : la transformation en « images sensorielles auxquelles on accorde alors foi et que l’on croit vivre » (à la nuance près qu’il y a des rêves qui ne sont constitués que de pensées, et dans les rêves assez longs des éléments qui n’ont pas participé de cette transformation dans le sensoriel. Cette transformation des représentations en images sensorielles n’est pas l’apanage du rêve, mais l’est aussi bien de l’hallucination, des visions, qui peuvent survenir quand on est en bonne santé ou comme symptômes des psychonévroses.

(p. 589) Freud cite G. Th Fechner (Psychophysique, IIe partie p. 520) : « la scène des rêves est une autre scène que celle de la vie de représentation vigile », il évoque alors pour cette « autre scène » de Fechner, l’idée d’une « localité psychique ».

La description de l’appareil psychique n’est pas d’ordre anatomique ou neurologique : « nous restons sur le terrain psychologique ». Le chapitre VII de la Td est le pendant de L’esquisse [Traduction des OCF.P : Le projet pour Der Entwurf ; le verbe werfen signifie « jeter »].

Exemple d’appareils optiques, une sorte de boîte, d’appareil photo.

C’est un échafaudage qu’il ne faut pas confondre avec la construction, dit Freud.

 Schéma de l’appareil animique (l’appareil psychique): OCF.P pp. 590-594 (dans la section B « La régression »)

Précédent sur l’appareil psychique :

Un 1er schéma de l’appareil psychique, dans l’ordre de Freud, se trouve dans la lettre 52/112 à Fliess du 6 décembre 1896, après vérification du texte dans Edition complète des Lettres à Fliess, PUF, 2006, p. 264, Trad. F. Kahn et F. Robert, et La naissance de la psychanalyse, p. 154 :

                         I                             II                           III   

  Pc                 Spc                         Ics                         Pcs                       Consc.

 

Cette lettre est difficile. Pour celles et ceux qui souhaitent commencer d’approfondir ce qui concerne les perceptions (en relation avec L’Esquisse pour les « neurones »)  et la 1ère inscription des perceptions (Spc), il faut bien lire en particulier le bas de la p. 264 /154 et le haut de la p. 265/155, et sinon toute la lettre. Ainsi peut-être et par exemple « l’avant-propos de l’éditeur » concernant L’Esquisse dans « La naissance de la psychanalyse », pp. 309-311.

Topique de l’appareil psychique :

Résumé utile dans O. Manonni, Freud, sous le schéma, p 70 de  Manonni :

Octave Manonni, Freud, p. 70 : « La topique de l’ « appareil psychique » suppose plusieurs instances que le « processus d’excitation »  parcourt dans le sens de la flèche, jusqu’à la « motricité », au-delà du préconscient (Pcs). Le rêve régresse en sens inverse en traversant l’inconscient (*Ics [*O. Manonni écrit *Ucs : il mêle apparemment les 2 orthographes, allemande et française. Je rétablis Ics en français pour plus de clarté. RB]) et les différentes inscriptions mnésiques (Mnem. [S pour « souvenir » dans les OCF.P. RB]) jusqu’à la perception (Pcpt) où il devient « hallucination ». »

  1. L’instrument est composé d’instances ou systèmes. Orientation spatiale constante. Les systèmes sont parcourus par l’excitation dans une succession temporelle déterminée. Parties constituantes : « Systèmes Ψ». Une direction : Toute notre activité psychique part de stimuli (internes ou externes) : flèche afférente et finit dans des innervations. Extrémité sensitive et extrémité motrice (flèche efférente). Modèle de l’appareil réflexe.
  2. 1ère différenciation : les traces mnésiques. Des perceptions qui nous parviennent, il reste dans notre appareil psychique une trace que nous pouvons appeler « trace mnésique ». La fonction qui en est responsable : la mémoire. Hypothèse : un système tout à l’avant de l’appareil accueille les stimuli de perception, mais ne garde rien d’eux, donc n’a pas de mémoire ; l’excitation momentanée due aux perceptions est transformée en traces permanentes. Schéma 2

Nos perceptions sont connectées dans la mémoire les unes aux autres selon leur conjonction antérieure dans la simultanéité (cf. notion de présent qui va venir dans le rêve) : le fait de l’association.

Le système Pc (= Perception) n’a pas de mémoire : le fondement de l’association réside donc dans les systèmes mnésiques : 1er système, association par simultanéité ; systèmes suivants, autres sortes de conjonction, gradation de la résistance de conduction.

Pc : conscient ; Souvenirs inconscients (ne sont plus dans la conscience, cf. le bloc magique. P. 593 : Les impressions d’enfance sont les plus fortes et ne deviennent presque jamais conscientes. Les souvenirs ne comportent aucune qualité sensorielle : « mémoire et qualité, pour la conscience, s’excluent l’une l’autre au niveau des systèmes psy »

 Avec le rêve. Le rêve devient une source de preuves pour un autre morceau de l’appareil psychique. P. 593 : Hypothèse des 2 instances psychiques : Censure, critique qui a pour conséquence l’exclusion du devenir conscient [refoulement]. Ecran. Schéma 3. pp. 594-595. Régression : la censure fait prendre à l’excitation une voie rétrograde jusqu’à l’hallucination.

 600 : Importance de l’infantile.

Dans le passage déjà cité sur le chapitre VII de Laplanche dans Sexual p. 63, celui-ci écrit que sur la thèse de l’hallucination, « Freud restera jusqu’à la fin insatisfait », mais qu’en revanche « la thèse de l’accomplissement de souhait est fondamentale ».

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