Joël Bernat: «Psyché n’est qu’après-coup» (les temporalités psychiques)

Conférence donnée en 2008 à l’Université du Mirail, Toulouse. Paru in Cahiers d’études germaniques, Le thème de l’après-coup (Nachträglichkeit), n° 57, 2009/2, pp. 13-32.

Les conséquences psychiques de la notion d’après-coup sur la conception de la vie psychique.

«Dans les domaines auxquels nous avons affaire, la connaissance ne se présente qu’en éclair. Le texte est le roulement bien tardif du tonnerre.»
Walter Benjamin1


Introduction

Si le terme de Nachträglich fait partie du langage courant, celui de Nachträglichkeit est considéré par les commentateurs comme une invention de Freud, invention qui apparaît fort tôt dans ses écrits. Mais pas à n’importe quel moment: en effet, c’est avec la cure de patients hystériques et les premières théorisations en psychopathologie que ce terme vient naturellement sous la plume de Freud2. Naturellement: voici un adverbe qui demande quelques explications. Cette notion d’après-coup apparaît sans qu’il y ait une annonce de concept ou de nouveauté, sans bruit, pourrions-nous dire. Et c’est ainsi qu’elle restera tout au long de l’œuvre de Freud: comme un terme banal, voire évident.

En tous cas, cette impression de banalité est peut-être ce qui a joué dans la lecture des successeurs, puisque l’après-coup passera inaperçu et ne connaîtra qu’une fort brève renaissance ou reconnaissance, avec Jacques Lacan et surtout Jean Laplanche, mais cette fois comme concept essentiel, pour disparaître de nouveau3. Nous essaierons de voir pourquoi ce sont justement ces deux auteurs qui relèvent cette notion et de comprendre les raisons de la re-disparition. Mais faisons déjà une remarque: ce n’est qu’après-coup (les années soixante) que l’après-coup devint, brièvement, une notion centrale.

Dans l’immédiat, revenons à Freud. Ce terme lui vient donc, lorsque nous le lisons, comme une évidence, une banalité, ce qui est une interprétation et une façon d’introduire une première question: que pourrait indiquer et comment expliquer cette sorte d’évidence?

S’il y a une évidence, alors peut-on supposer qu’elle vient d’avant le Freud de la psychanalyse, c’est-à-dire qu’il possédait déjà cette notion par devers lui, de façon préconsciente, et qu’elle s’est tout naturellement glissée dans la conception de la psychanalyse. Ce qui indiquerait ici une conviction à l’œuvre chez Freud. Car, nous allons le voir, cette notion d’après-coup révèle une théorie ou plus exactement une conception du monde (Weltanschauung) et plus précisément du monde psychique.

Des temps pré-analytiques, nous pouvons relever trois registres ou trois influences majeures:

  • les lectures de jeunesse de Freud;
  • l’influence de sa culture;
  • sa formation de neurologue.

Nous allons donc parcourir rapidement ces trois registres que nous posons comme lieux où la notion d’après-coup a pu se construire en Freud.

1 – L’influence littéraire et philosophique (les Romantiques allemands)

1a: Cryptomnésie et après-coup

C’est essentiellement vers la fin de sa vie que Freud a reconnu l’énorme influence que purent avoir ses lectures de jeunesse, influences jusqu’alors préconscientes, et qu’il dénommera cryptomnésies4, et dont on ne peut prendre la mesure que bien après-coup. Et quelle mesure! Un exemple frappant du travail de la cryptomnésie est celui de la théorie des pulsions dont Freud saisira bien après tout ce qu’il en doit à Empédocle d’Agrigente, ce qui lui fera écrire:

«(…) personne ne peut prévoir sous quel habillage le noyau de vérité contenu dans la doctrine d’Empédocle se présentera à des vues ultérieures.»5

Et de conclure:

«Je sacrifie volontiers à cette confirmation le prestige de l’originalité, d’autant plus que, vu l’ampleur de mes lectures de jeunesse, je ne puis jamais savoir avec certitude si ma prétendue invention n’a pas été une production de la cryptomnésie.»6

Voici donc un premier exemple d’après-coup: une pensée, qui se veut originale, reçoit bien plus tard la révélation de sa source oubliée. Nous ne ferions, souvent, que redécouvrir après-coup des savoirs anciens, savoirs que nous avons connus et portés silencieusement en nous, mais qui restent actifs et ainsi orientent nos quêtes. La conscience, dans ce cas, vient donc bien après-coup.

Un autre exemple remarquable de fonctionnement de la cryptomnésie – bien que ne relevant pas d’une influence littéraire mais de la fréquentation de «maîtres» – est celui de la thèse de l’étiologie sexuelle des névroses, invention freudienne dans la mesure où c’est bien Freud qui, le premier, a théorisé une telle origine. Or, une vingtaine d’années plus tard, rédigeant en 1914 une «Contribution à l’histoire du mouvement psychanalytique» et revenant sur les fondements de la psychanalyse, Freud réalise ceci:

«L’idée [l’étiologie sexuelle des névroses] dont j’avais assumé la responsabilité ne m’était nullement personnelle. Je la devais à trois personnes (…), à Breuer lui-même, à Charcot et au gynécologue de notre université, Chrobak (…). Ces trois hommes m’avaient transmis une conception qu’à proprement parler ils ne possédaient pas. (…) Mes ces transmissions identiques que je m’étais assimilées sans les comprendre avaient sommeillé en moi pendant des années pour se révéler un jour comme une conception originale, m’appartenant en propre.»7

Ainsi, en ce qui concerne des contenus de pensées que nous pouvons tenir comme propres, il arrive parfois qu’une prise de conscience après-coup nous enseigne qu’ils ne sont pas le fruit de nos productions personnelles mais seulement des éléments étrangers que nous avons simplement assimilés. C’est en ce sens que Freud se décrivait, non pas comme inventeur, mais bien plus comme quelqu’un qui n’avait fait que prolonger ce qu’il avait reçu8.

1b: Einfall, censure et après-coup

Mais il y a une autre chose de tout à fait remarquable, un autre registre de l’après-coup, dont on peut mesurer l’effet sur la manière même de travailler et d’écrire chez Freud, en tant qu’élément de sa méthode.

C’est en 1919 que Freud reconnaît tout le poids d’une lecture de jeunesse9: il s’agit d’un recueil de textes de Ludwig Börne (1786 – 1837, de son vrai nom, Löb Baruch), seul ouvrage nous précise-t-il avoir conservé de cette époque:

«… j’ai reçu très tôt Börne en cadeau, peut-être pour mon 13è anniversaire, l’ai lu avec grand enthousiasme, et le souvenir de certains de ces petits articles m’est toujours resté très présent. Pas les cryptomnésiques, naturellement. Quand je les ai relus, j’ai été étonné de constater à quel point certaines choses qui s’y trouvent recouvrent quasi textuellement des choses que j’ai toujours soutenues et pensées. Il pourrait alors vraiment être la source de mon originalité.»

Il gardait en mémoire quelques textes sauf celui qui l’avait alors le plus impressionné: «L’art de devenir écrivain en trois jours» (1823), dont il extrait, à la relecture, le conseil suivant:

«Prenez quelques feuilles de papier et transcrivez trois jours durant, sans tricherie ni hypocrisie, tout ce qui vous passe par la tête. Écrivez ce que vous pensez de vous-même, de vos femmes, de la guerre contre les Turcs, du Jugement Dernier, de vos supérieurs – et au terme de ces trois jours vous n’en reviendrez pas d’avoir eu tant d’idées neuves et inouïes. Tel est l’art de devenir en trois jours un écrivain original!»

Nous pouvons voir ici une des lignes fondamentales de l’exigence en Freud, celui du mode d’accueil de «l’idée spontanée, incidente» (c’est-à-dire: Einfall), pour l’instant dans le champ de l’écriture. Cela vient en éclairer la place et la fonction chez Freud, tant au niveau du volume de sa correspondance, lieu donc d’émergence des idées, qu’au niveau de la brièveté du temps mis pour écrire certains textes, ou bien encore de sa «règle» de conduite: chaque soir, écrire.

Cette définition du mode d’accueil, devenu cryptomnésique, sera l’outil même de l’accueil de ce qui surgit et donc de l’auto-analyse, en soi comme dans le champ de la correspondance, mais aussi celui de bien d’autres éléments repérables après-coup dans le rappel que fait Freud d’autres fragments du texte de Börne, par exemple: «Une honteuse peur de penser nous retient tous. Plus oppressante que la censure des gouvernements est la censure qu’exerce l’opinion publique sur les œuvres de notre esprit.»

Le texte de Börne offre à l’adolescent Freud une première représentation – ou une crypto-représentation – de la psyché (l’opposition de la pensée et de la censure), et promeut le rôle et l’importance de l’écriture quant à la connaissance de soi. Mais Börne n’est pas l’inventeur de cette méthode de réception de l’idée; en effet, elle n’est pas nouvelle en soi, et à ce titre Freud cite une lettre de Schiller10, une autre lecture de jeunesse devenue cryptomnésique, et jugée assez importante pour être ajoutée lors d’une réédition de la Traumdeutung:

«Il me semble que la racine du mal est dans la contrainte que ton intelligence impose à ton imagination. Je ne puis exprimer ma pensée que par une métaphore. C’est un état peu favorable pour l’activité créatrice de l’âme que celui où l’intelligence soumet à un examen sévère, dès qu’elle les aperçoit, les idées qui se pressent en foule. Une idée peut paraître, considérée isolément, sans importance et en l’air, mais elle prendra parfois du poids grâce à celle qui la suit; liée à d’autres, qui ont pu paraître comme elle décolorées, elle formera un ensemble intéressant. L’intelligence ne peut en juger si elle ne les a pas maintenues assez longtemps pour que la liaison apparaisse nettement. Dans un cerveau créateur tout se passe comme si l’intelligence avait retiré la garde qui veille aux portes: les idées se précipitent pêle-mêle, et elle ne les passe en revue que quand elles sont une masse compacte. Vous autres critiques, ou quel que soit le nom qu’on vous donne, vous avez honte ou peur des moments de vertige que connaissent tous les vrais créateurs et dont la durée, plus ou moins longue, seule distingue l’artiste du rêveur. Vous avez renoncé trop tôt et jugé trop sévèrement, de là votre stérilité.» [Je souligne].

Ce qui se dessine ici est le rapport entre l’idée et la censure – censure qui, des années plus tard, deviendra le surmoi -: pour qu’une idée survienne, il faut donc supprimer un avant-coup, celui de la censure qui empêche ou inhibe l’idée qui vient. Cela veut dire que l’émergence même de l’idée est un après-coup, qu’elle ne peut venir qu’après l’opération qui écarte ou suspend la censure. C’est cela qui est indiqué dans les conseils de Schiller: écrire sans penser (du moins sans cette pensée qui juge), afin d’être saisi après-coup par les idées qui nous sont venues.

De plus, l’idée ainsi libre de surgir, ne vient pas selon un pur hasard: Freud n’en attribue aucun à l’Einfall (il n’y a pas de hasard dans la réalité psychique par opposition au Zufall, le hasard dans la réalité externe). Einfall n’est pas Zufall du seul fait du déterminisme psychique inconscient, et ainsi, l’Einfall est en lui-même un après-coup, c’est-à-dire la révélation, le surgissement d’une pensée inconsciente.

L’Einfall sera le premier «outil» de Freud, hérité de la littérature et des lectures de jeunesse, lui permettant de saisir les processus psychiques à l’œuvre grâce à la suspension de la garde de la censure, et sera aussi un mode d’être, importé comme technique dans la cure psychanalytique: suspension de la censure et libre cours des associations pour susciter le surgissement de l’idée. À cela se rajoute la conscience, qui vient ensuite, donc bien après-coup.

Bien plus, ce qui serait une sorte de conscience avant-coup de ce que je vais faire ou penser ne peut que relever de la censure. Ce que Freud ne cessa d’indiquer avec insistance à ses correspondants et disciples, soit au fil de citations comme celle de Cromwell: «un homme ne monte jamais aussi haut que lorsqu’il ne sait pas où il va»11, soit d’exclamations comme: «si seulement je le savais! Je dois m’en remettre à mon inconscient»12. Soit s’en remettre au seul déterminisme psychique, hors censure, dont la compréhension ne vient que bien plus tard (ce déterminisme psychique, chez Freud, est à mettre en lien avec le projet pindarique, goethéen ou nietzschéen: devenir ce que l’on est).

Ces indications sont réitérées à propos de la tentation ou du danger de l’effort théorique. Le fonctionnement psychanalytique n’est pas du côté de l’effort intellectuel ni des systèmes, d’une emprise sur l’objet, mais bien à l’inverse: l’emprise de l’objet inconscient sur le sujet, sur le mode de l’écoute flottante propice à la réception de l’Einfall:

«j’estime que l’on ne doit pas faire de théories – elles doivent tomber à l’improviste dans notre maison, comme des hôtes qu’on n’avait pas invités, alors qu’on est occupé à l’examen de détails.»13

La théorie ne peut être produite qu’après-coup, après l’expérience vécue (Erlebnis).

Nous le voyons: la suspension de la censure, prônée par Schiller et Börne, est élevée au rang de «méthode scientifique», mode d’accès à une saisie, une révélation dont la compréhension, l’intelligence ne peut être que dans l’après-coup, et surtout pas dans un «avant-coup» qui n’offrirait qu’une illusion de maîtrise. C’est ainsi, je pense, que l’on peut comprendre pourquoi Freud a pu écrire certains textes qui sommeillèrent dans ses tiroirs pendant des mois ou des années, avant que d’être repris et réélaborés.

Présence de Schiller – que Freud convoque très souvent – mais aussi de Kleist, au sujet duquel Lou Andreas-Salomé écrivait à Freud: «je sais maintenant à quel point Kleist était proche de notre, de votre cause.»14 En quoi? Certainement, entre autre, qu’un court texte, «De l’élaboration progressive des pensées dans le discours»15, a pu jouer de quelque influence, car on y relève, par exemple, que: «l’idée vient en parlant», car «ce n’est pas nous qui savons, c’est avant tout une certaine disposition de notre être qui sait.» Cette dimension infiniment sérieuse et sa prédétermination, qu’indiquent Novalis et Kleist, ne se dévoile qu’en un laisser-aller de la parole, à bâtons rompus (les bâtons de la censure?) comme les Romantiques allemands l’ont défini, et qui produira donc la règle des associations libres et de l’Einfall. Et Kleist de remarquer, un peu plus loin:

«Il est si difficile d’agir sur l’âme et de lui arracher une voix qui lui soit singulière, elle se désaccorde si vite sous des mains malhabiles, que même le plus exercé des praticiens de la nature humaine, le plus magistralement doué dans l’art d’accoucher les pensées, pour reprendre l’expression de Kant, là encore risque de se tromper parce qu’il connaît trop peu son parturiant.»

2 – L’influence culturelle: Itzig

Cette acceptation du conseil schillerien et de la pensée de Kleist chez le jeune Freud fut, il me semble, facilitée par des éléments présents dans sa culture juive, éléments parfaitement figurés par le personnage de Itzig, nom qui désigne familièrement le Juif en allemand, der Itzig, par déformation de l’hébreu Yizhaq (Isaac). Itzig est très présent chez Freud, du moins dans les premiers textes psychanalytiques, et souvent comme mode de réponse à certaines questions notamment quant à sa méthode. Un exemple:

«Mon travail m’a été entièrement dicté par l’ics suivant la célèbre phrase d’Itzig, le cavalier du dimanche: « Où vas-tu donc, Itzig? » – « Moi, je n’en sais rien. Interroge mon cheval! « Au début d’un chapitre, j’ignorais toujours à quoi j’allais aboutir.» 16

Ce type d’indication dévoile aussi quelque insistance à transmettre le psychanalytique en son essence; autre exemple:

«Même un travail aussi insignifiant que la disposition des matériaux ne dépend pas toujours et entièrement de la volonté de l’auteur: elle s’opère toute seule, et c’est seulement après-coup qu’on peut se demander pourquoi les matériaux se trouvent dispersés dans tel ordre plutôt que dans un autre.»17

Ceci éclaire l’occurrence et la nécessité, dans le texte freudien, des phrases qui remettent à plus tard un développement, une suite (qui n’eut jamais lieu dans certains cas) et n’eut pour fonction que de laisser ouvert (non censuré) un espace pour la pensée et ses rebonds (Einfallen). Soit une façon de cultiver, d’attendre l’après-coup sans le provoquer, c’est-à-dire une méthode qui devint celle de la psychanalyse de Freud.

3 – La formation neurologique ou les sources neurophysiologiques de l’après-coup (la fonction de la psyché)

Chronologiquement, après les lectures de jeunesse, viennent les études de neurologie. Avec elles, la vision du monde freudienne va se renforcer, trouver un appui scientifique18.

1: Le premier point qui est à relever – et que peu de lecteurs «admettent» -, point que Freud n’aura de cesse de répéter, de l’Esquisse en 1895 à l’Abrégé de 1938, son dernier écrit, est que la fonction première de la psyché est de lutter contre toute excitation (externe comme interne). C’est une acquisition de la neurologie, bien démontrée dans les laboratoires. Cela fait de l’ensemble de la vie psychique un gigantesque après-coup!

Ainsi, la vie psychique ne serait qu’une réaction de défense à l’excitation afin de la supprimer ou du moins la réduire pour ne pas être soumise, poursuivie19, débordée, «traumatisée» (voir les principes de Constance20 puis de Nirvâna21). Après tout, nous ne sommes que des organismes, mais une telle pensée est bien narcissiquement douloureuse à admettre.22

C’est le moi qui prend le relais de cette psyché primitive et qui sera donc en charge de cette lutte contre l’excitation, ou plutôt contre l’état d’être excité selon un seuil quantitatif. Mais le moi n’est équipé que par rapport à l’«extérieur», à l’instar de la musculature et de ses défenses. Débordé souvent par ce qui lui vient de l’intérieur, il projette aussi bien son effroi sur certains objets ou figures, que son sentiment ou son vœu de puissance sur d’autres. Ces projections étant inconscientes, elles donnent après-coup naissance à un monde comme miroir, un monde qui ne relève pas de la réalité mais de la seule réalité psychique.

«(…) Imagines-tu ce que peuvent être les mythes endopsychiques? (…) L’obscure perception interne par le sujet de son propre appareil psychique suscite des illusions qui, naturellement, se trouvent projetées au dehors et, de façon caractéristique, dans l’avenir, dans l’au-delà. L’immortalité, la récompense, tout l’au-delà, telles sont les conceptions de notre psyché interne… C’est une psychomythologie.»23

2: Coexistant avec cette première pensée du fonctionnement en après-coup de la psyché, il y a des adhésions théoriques de Freud qui pourraient sembler a priori totalement incompatibles, traçant une sorte de dualité:

  • d’un côté, il admet l’après-coup comme une évidence;
  • d’un autre côté, il est un fervent partisan de l’évolutionnisme de Lamarck et de Darwin et donc d’un déterminisme certain.

C’est en première année de médecine que Freud suivit les cours de biologie et de darwinisme du zoologiste Carl Claus qui était un disciple de Ernst Haeckel (1834-1919); ce dernier était un des premiers et plus fervents partisans de la doctrine évolutionniste de Darwin, et connu pour sa loi de biogénétique fondamentale: «l’ontogenèse (le développement de l’individu) est la récapitulation brève et rapide de la phylogenèse (développement de l’espèce).»24

Il y a, pour Lamarck et Haeckel, une transmission des caractéristiques acquises, que Freud rappelle en de nombreuses fois, par exemple:

«La continuité psychique dans la vie des générations successives semble en partie assurée par l’hérédité des dispositions acquises qui, pour devenir efficaces, ont cependant besoin d’être stimulées par certains événements de la vie individuelle.»25

Ce qui deviendra la thèse du biofeedback: un élément est présent dès la naissance (donc acquis phylogénétiquement), élément qui est en attente d’une information ou stimulation venant de l’extérieur, de l’environnement. C’est cette stimulation qui va activer l’élément – sinon, il dépérit. Ensuite, la boucle est créée et l’élément pourra de plus en plus intégrer et élaborer d’informations. Ce qui est intéressant ici est la mise en route après-coup d’un système et non de lui-même.

Cette loi est un des fondements de la pensée de Freud26, et malgré les critiques, il ne cédera en rien, fut-ce à Lou Andreas-Salomé. Un exemple parmi tant d’autres: suite aux soirées du 12 et 14 mars 1913 sur «Psychanalyse et théorie de l’évolution», Lou note, dans son journal, qu’en psychanalyse, l’approche philosophico-théorique n’a pas tout de suite la parole. Elle le remarque par «sensibilité», elle dont le trajet n’est pas celui des médecins viennois; et, ajoute-t-elle, «il faudrait aussi exclure avec plus de sévérité l’influence de la théorie de l’évolution (par exemple, le dogmatisme haecklien)»27, car cette conception pose, impose des représentations sur un mode génétique (au sens de linéaire). Ce qu’elle dénonce ici est le risque qu’une adhésion théorique vienne fonctionner avant-coup comme censure et empêcher l’émergence des idées.

4 – L’expérience clinique ou les sources neuropsychiques de l’après-coup (le système perception-conscience et l’épreuve de réalité)

Freud neurologue rencontre ensuite des patients hystériques. C’est avec eux qu’il va découvrir un autre registre de l’après-coup, car, comme nous allons le voir, l’après-coup ne fonctionne pas du tout comme avant-coup, comme a priori, chez Freud: c’est une dimension qu’il va sans cesse redécouvrir. Et donc, tout d’abord, dans sa pratique clinique.

Le proton pseudos

Jusqu’à cette époque (autour de 1895), Freud est convaincu de la réalité des plaintes de ses patientes, qu’elles furent toutes réellement séduites dans l’enfance par des adultes pervers, à tel point qu’il se demandait si tous les pères n’étaient pas des pervers: c’est-à-dire une conception linéaire, celle du traumatisme. Les pratiques d’alors étaient celles de l’hypnose et de la katharsis: retrouver l’élément refoulé, produire sa reviviscence et la décharge des affects qui lui sont attachés, dans le but de supprimer le symptôme28. Mais il y avait des échecs.

La psychanalyse commençait alors à prendre forme, et Emma Eckstein fut une patiente importante quant à la découverte, entre autres, de l’existence du fantasme par rapport au traumatisme.

1: Emma29 présente une phobie: elle ne peut se rendre seule chez un commerçant. Pour se protéger, elle se fait accompagner, de préférence par un enfant, mieux, une fillette. Elle associe d’emblée avec un souvenir conscient, celui d’une scène à laquelle elle rapporte sa phobie: à treize ans, elle entre dans une boutique où deux commis s’esclaffent. Prise de panique, elle s’enfuit avec l’idée qu’ils se moquent de sa toilette et reconnaît que l’un des deux commis avait exercé sur elle une attraction sexuelle, bien qu’il ne se soit rien passé. Cette scène, à ce moment-là de la conception freudienne, peut être tenue pour traumatique, c’est-à-dire comme scène d’origine. La phobie est une défense qui protège contre toute répétition du traumatisme.

2: Or, la cure va ramener à la conscience un souvenir plus ancien, donc jusqu’alors inconscient. Lorsque Emma avait huit ans, elle était entrée dans une boutique pour y acheter des bonbons, et le marchand d’alors avait touché ses organes génitaux à travers sa robe. Mais si elle a éprouvé une grande culpabilité, cela est du au fait qu’elle y est retournée une seconde fois sous l’emprise de l’excitation, excitation qui s’éteindra sous l’effet des auto-reproches de la culpabilité.

3: C’est à ce point que Freud (re)découvre l’après-coup dans la clinique, en comprenant que la scène des treize ans est à la fois un souvenir-écran qui masque la scène des huit ans et une ré-interprétation30 génitale d’un souvenir infantile non génital. Cette opération psychique sera d’abord nommée: proton pseudos, c’est-à-dire le premier mensonge31, pour désigner le jeu de passe-passe entre deux scènes, et la création d’un «faux-souvenir».

Mais cette opération d’interprétation après-coup se fait néanmoins en maintenant certains éléments non déformés, ce que Freud nommera par la suite des «noyaux de vérité historique». Pour exemple de points communs entre les deux scènes:

  • – le rire des commis et la grimace du marchand;
  • – les vêtements écrans du sexuel32;
  • – l’émotion, l’excitation et la décharge sexuelle.

De même que la défense contra-phobique, «se faire accompagner d’une fillette», contient en elle une indication: la fillette est une protection car si Emma va dans un magasin, c’est la fillette qui sera attouchée, et non plus elle.

Le traumatique est ainsi une construction après-coup: la scène inconsciente (refoulée par la censure) des huit ans est réactivée par la scène consciente des treize ans. Le proton pseudos est constitué par l’affirmation «mensongère» d’Emma qui pose que c’est cette scène consciente la cause de son symptôme. Or, l’affect éprouvé n’est pas en lien avec cette seconde scène, il est la reviviscence de la première. Mais c’est seulement la seconde scène qui donne à la première sa valeur pathogène: «Un souvenir est refoulé, qui n’est devenu traumatisme qu’après-coup»33.

En fait, le trauma n’est pas dans la seconde scène, et il n’est d’ailleurs pas dans la première (ce serait la conception médicale, linéaire, du trauma somatique). Le souvenir refoulé s’est transformé après-coup en traumatisme: en effet, entre les deux scènes, il y a la puberté qui va amener des éclaircissements (Aufklärung) nouveaux sur la sexualité, et ce sont ces informations nouvelles qui servent à l’interprétation d’une scène ancienne qui n’avait pas été élaborée et qui la transforme, déforme. Du coup, un incident sexuel d’une phase ancienne agit comme s’il était actuel; la conséquence est que les scènes de séduction sont des constructions, c’est-à-dire des fantasmes. Freud abandonne alors sa théorie de la séduction, qui était une théorie du traumatisme, pour privilégier les constructions psychiques après-coup, telles que les fantasmes et les souvenirs-écrans.

«… ce ne sont pas les expériences vécues elles-mêmes qui agissent traumatiquement, mais leur revivification comme souvenir, après que l’individu est entré dans la maturité sexuelle34

Dans l’hystérie, les fantasmes sont des défenses contre le retour des souvenirs relatifs aux scènes primitives: «Élaborés à l’aide de choses entendues qui ne sont utilisées qu’après coup, ils combinent les incidents vécus, les récits de faits passés (concernant l’histoire des parents ou des aïeux) et les choses vues par le sujet lui-même35.» Nous pourrions multiplier les exemples avec d’autres formations pathologiques, comme le délire par exemple.

4b – La sexualité biphasée

C’est dans la suite de ses études et de ses cures avec les névrosés, qu’en 1905 Freud pourra soutenir que la sexualité humaine est constituée de façon biphasée: il y a le temps de la sexualité infantile, puis celui de la puberté qui introduit au génital. Cet apparition du génital, porteur de nouvelles informations, va réinterpréter après-coup une grande partie des souvenirs de la sexualité infantile, parfois en les génitalisant. Ce que l’on a entrevu avec Emma: le génital ré-interprète le pré-génital. «Tout adolescent a des traces mnésiques qui ne peuvent être comprises par lui qu’avec la survenue de sensations proprement sexuelles36» génitales.

Pour donner une autre illustration clinique de l’après-coup psychique, je choisis le cas de «L’homme aux loups». Il ne comprit le coït «… qu’à l’époque du rêve, à 4 ans, et non à l’époque où il l’observa. À un an et demi il recueillit les impressions qu’il put comprendre après-coup, à l’époque du rêve, grâce à son développement, son excitation sexuelle et sa recherche sexuelle»37. Le rêve, dans l’histoire de cette névrose infantile est, comme Freud le montre, le moment déclenchant de la phobie: « … le rêve confère à l’observation du coït une efficacité après-coup»38.

Bref, dans tous les cas il se trouve qu’un souvenir est refoulé qui n’est devenu un trauma qu’après-coup. La cause de cet état de chose est le retard de la puberté par rapport aux autres aspects du développement de l’individu39.

4c – La morale (Surmoi)

C’est à partir des années 1920 que la censure est conceptualisée, localisée en une instance, le Surmoi. Cette formation tardive vient recouvrir les expériences infantiles, les transformer mais selon une orientation particulière. Le Surmoi est une sorte de transmetteur:

«Ce n’est évidement pas la seule personnalité des parents qui agit sur l’enfant, mais transmises par eux, l’influence des traditions familiales, raciales et nationales, ainsi que les exigences du milieu social immédiat qu’ils représentent40.» «…il devient porteur de la tradition41

Il s’agit là d’une constitution inconsciente du surmoi, à l’insu des protagonistes, à laquelle viendra s’ajouter son rôle d’héritier du complexe d’Œdipe. Le surmoi a donc une dimension phylogénétique; il

«figure le passé de la civilisation que l’enfant, au cours de ses courtes années d’enfance, est, pour ainsi dire, obligé de revivre42», «Il réunit en lui les influences du présent et du passé. Dans l’instauration du surmoi, on peut voir, semble-t-il, un exemple de la façon dont le présent se mue en passé43

Dès lors, le destin d’un sujet face à son surmoi, est au mieux encore indiqué par la phrase de Goethe qui vient clore ce texte: «ce que tes aïeux t’ont laissé en héritage, si tu le veux posséder, gagne-le44.» C’est-à-dire, perlaborer. Ce que d’une certaine façon Freud fit pour lui-même, notamment en écrivant le Moïse.

Le surmoi est donc une instance d’apparition tardive dans la psyché humaine, et qui vient donc après-coup porter un savoir nouveau, mais en partie impersonnel, au moi d’un sujet. Et une nouvelle temporalité: le présent se mue en passé.

Un exemple de censure après-coup

Ce rôle interne de censure que représente le surmoi n’est pas strictement réservé à l’intrapsychique. Le surmoi est constitué en partie par notre culture, il est à la source de certaines censures et déformations opérant au niveau collectif, déformant après-coup certains mouvements. Je vais prendre un exemple parmi mille…

Le Libertinage45 fut, d’une certaine façon, la dernière invention de l’aristocratie française. C’était un courant de pensée, né en France au XVIIe siècle, qui s’épanouit durant tout le XVIIIe siècle, se manifestant, dans les mœurs comme dans la pensée, par la revendication d’une liberté accrue face aux censures religieuses.

La branche philosophique du mouvement se différenciait en Matérialistes et Déistes. Le plus célèbre des matérialistes était Cyrano de Bergerac (1619-1655) qui, dans ses États et Empires de la Lune (1657), tourne en dérision l’idée d’une âme immortelle. Quant au plus célèbre des déistes, c’est Fontenelle (1657-1757) qui récuse le dieu de la Bible, dont l’existence implique trop de contradictions (existence du mal, du péché originel, de l’imperfection des créatures, etc.), mais admet celle d’un Être suprême. Cette conception s’épanouira au XVIIIe siècle (avec, par exemple, le culte rendu à l’Être suprême par Robespierre et les révolutionnaires, en 1793).

Ce mouvement de penser, d’émancipation du sujet individu, fut réduit après-coup par l’Église à l’image caricaturale d’une débauche sans frein. Or, ainsi que l’écrivit Remy de Gourmont, «Le libertin n’était aucunement un sacripant mais un homme qui se réservait de ne pas suivre servilement les idées ni les coutumes du jour», c’est-à-dire qu’il était un athée, en réaction contre l’austérité et le pouvoir des religions révélées46. Le libertinage revendiquait la liberté de pensée, le goût de la réflexion indépendante, le mépris du fanatisme et de tout esprit de système. Héritiers des Humanistes, les Libertins pensaient que l’on pouvait expliquer le monde par la raison, et faire ainsi l’économie de la religion. De leur rationalisme empirique naîtra les Lumières et la pensée scientifique moderne.

Il est vrai que c’est dans les mœurs amoureuses que le libertinage se développa au XVIIIe siècle, pour devenir un jeu érotique: mise en scène de la conquête amoureuse, intellectualisation du plaisir et rejet de toute contrainte morale, en une variante érotique de l’amour courtois, transgressant les tabous religieux47. La littérature en témoigne48. Et ce n’est pas un hasard si paraît, en 1732, la traduction du Banquet de Platon, qui plus est par une abbesse, celle de Fontevrault (Madame de Rochechouart de Mortenart).

5 – La reprise: Lacan et Laplanche

Ces deux auteurs49, à qui l’on doit d’avoir mis en lumière bien après-coup cette notion d’après-coup chez Freud (plus de soixante ans plus tard, et grâce au travail de traduction), ont quelque chose en commun: le fait de faire primer le langage, c’est-à-dire de lui donner une place fondamentale dans la vie psychique, ce qui n’était pas le cas chez Freud.

Que le langage en lui-même soit en position toujours seconde d’après-coup par rapport aux perceptions sensorielles et aux affects est une évidence. Mais cette inscription de l’après-coup dans le champ du langage, voire même comme fait de langage, a fait courir le risque, d’une part de réduire cette notion au seul fait du langage, et d’autre part, d’en faire un mécanisme qui serait spécifique du moi (c’est-à-dire l’instance où Freud situe les représentations verbales) et ainsi de faire primer un type de temporalité psychique et de la réélaboration essentiellement moïque.

Or, cette réduction, car c’en est une, de l’après-coup au seul langage, vient occulter le jeu des processus que je viens de rapidement évoquer, opérant avant tout langage, et notamment les processus inconscients tels que nous pouvons les repérer dans le ça: celui-ci, selon les définitions de Freud50, est entièrement régi par les processus primaires51 tels que nous pouvons les observer dans le travail de formation des rêves, des fantasmes, des symptômes, des lapsus et des actes manqués.

Dès lors, si l’on se questionne sur une temporalité psychique inconsciente (du ça), il n’y en a pas, en tous cas, il ne peut exister de temps dans l’inconscient sur un mode linéaire, chronologique, car la définition première, liée aux processus primaires, est qu’il n’y a aucune négation dans l’inconscient, et, du coup, pas de logique ni de temps: les contenus représentatifs y sont sans cesse remaniés, déplacés, associés, etc., selon des critères qui relèvent plus de la contiguïté que d’une logique a fortiori chronologique: l’inconscient ignore le temps..

C’est au niveau de la partie inconsciente du moi que Freud a situé les mécanismes de défense (parce qu’ils fonctionnent de façon inconsciente pour le sujet). Or, si l’on observe les mécanismes principaux (refoulement, régression, rétroaction, etc.), l’on voit qu’ils produisent une temporalité qui n’est pas linéaire dans la mesure où ils vont bouleverser les chronologies. Par exemple, une situation pénible pour le moi peut être niée et refoulée (elle fera retour plus tard sous une autre forme) ou susciter une régression (la situation actuelle sera interprétée selon un mode ancien qui fut satisfaisant et donc déformée: c’est un retour en arrière suivi d’une re-projection dans le présent, d’un retour au présent).

S’il y a une linéarité temporelle, cela ne concernerait que le système d’archives de la mémoire, ce que Freud nommait «couches mnésiques52». Mais nous le voyons, à côté de cette mémoire passive des couches, nous devons envisager, non pas une autre mémoire, mais plutôt un mécanisme très actif qui produit une pseudo-mémoire, c’est-à-dire en fait: une histoire (celle d’un individu).

6 – L’après-coup comme définition fondamentale de la conception de la psyché selon Freud

La conception de la vie psychique est, pour Freud, dans son état final un gigantesque ensemble d’incessants après-coups, qui empêche ou s’oppose à une conception bien plus confortable, celle d’un développement linéaire, à l’image de la géologie: des expériences vécues s’empileraient les unes sur les autres, déterminant impitoyablement le devenir de l’individu qui n’en serait que le sujet (au sens premier, latin, de sub-jectus, jeté sous). Une telle représentation n’est valable que pour la mémoire.

Conception freudienne où le psychique est en lui-même toujours après-coup, après le coup de l’excitation, le stimulus, l’information nouvelle, l’expérience vécue, etc., sur un mode si bien illustré par le mythe apulléen d’Éros et Psyché53.

«(…) je travaille sur l’hypothèse que notre mécanisme psychique s’est établi par stratification: les matériaux présents sous forme de traces mnésiques subissent de temps en temps, en fonction de nouvelles conditions, une réorganisation, une réinscription54

Dès lors, on ne peut vraiment pas parler de «vrais souvenirs» par exemple, mais seulement d’un «noyau de vérité historique» inclus dans le souvenir qui est forcément remanié, déformé (selon le mécanisme de l’Entstellung). C’est pour cela que Freud utilisera le terme de réalité psychique pour désigner qu’un souvenir est peut-être vrai pour le psychique, mais pas forcément dans la réalité réelle, et qu’il jouera sur l’opposition entre Realität et Wirklichkeit, l’effectivité pour désigner par exemple un souvenir qui n’est pas forcément vrai au sens de la réalité, mais qui est opérant, agissant, effectif (voir supra, Emma).

Autre exemple d’après-coup: on ne peut tenir comme identique le rêve que l’on fait, le souvenir que l’on garde au réveil, le récit que l’on en fait, etc. À chaque étape de ce processus, il y a des remaniements et des déformations, parmi lesquelles le travail de la censure et la mise en mots des images visuelles du rêve.

Si l’on tente une définition de l’après-coup, nous dirons:

Des expériences vécues (Erlebnis), des perceptions et des impressions, des traces mnésiques sont stockées dans l’appareil psychique, mais remaniées ultérieurement et sans cesse en fonction des nouvelles expériences.

Cela interdit une interprétation selon un déterminisme linéaire qui envisagerait la seule action du passé sur le présent (du genre: le destin de l’homme serait joué dès les premiers mois). C’est ce mode de représentation qui est à la source d’une théorie du traumatisme: tel événement produira telle pathologie.

Ce ne peut être la conception freudienne, car le psychique remanie après-coup les événements passés et c’est ce remaniement qui leur confère un sens et même une efficacité ou un pouvoir pathogène: par rapport à la notion de traumatisme, celui-ci n’est plus dans le «coup», celui de l’événement, mais dans le remaniement, c’est-à-dire l’après-coup. Pire: pour qu’un événement ait cette efficience, cette efficacité, il est requis un «avant-coup» qui prédétermine la réception de l’événement, du «coup», selon l’image que Freud utilise: le cristal se brise selon des lignes invisibles mais préexistantes55.

Nous nous retrouvons ici avec deux conceptions radicalement opposées du psychique:

  • la thèse linéaire, développementale (qui est responsable de l’effacement de la notion d’après-coup);
  • la thèse de l’incessant remaniement après-coup.

Par voie de conséquence, cela signifie que la psyché, puis le moi et la conscience, constituent leur passé, en remanient constamment le sens, en fonction de leur «projet». Mais ce n’est pas le vécu en général qui est remanié après-coup, mais électivement ce qui, au moment où il a été vécu, n’a pu pleinement s’intégrer dans un contexte significatif ou représentatif, du fait de l’immaturité par exemple: dans ce cas, ce qui est traumatique c’est le débordement de l’appareil psychique et son incapacité d’élaborer dans l’instant ce qui se produit.56

Cela signifie que l’on ne souffre que de ses interprétations, de ses «histoires», et non pas des événements en tant que tels car la signification n’est pas dans l’événement57.

Il n’est donc pas possible de réduire la conception freudienne de Nachträglichkeit à celle d’une simple «action différée».

De plus, cette conception freudienne va donner le principe même du travail analytique: analyser, mais au sens grec, c’est-à-dire défaire, détisser à l’image de Pénélope qui analysait, détissait chaque nuit le travail du jour. C’est-à-dire détisser ces histoires réinterprétant des événements vécus afin de dissoudre les symptômes et la souffrance. Ce travail, Freud lui a donné un nom, celui de Durcharbeitung, perlaboration: traverser, ce que marque le préfixe Durch, ce qui a été construit. Donc, la cure n’est pas tant la tentative de retrouver un souvenir qui serait «pur», premier, mais le travail de détissage des représentations (fausses) qui, après-coup, ont créées une interprétation de l’événement, interprétation qui est, elle, la cause de la souffrance.

Conclusion: Les temporalités de la psyché

La notion de Nachträglichkeit trace plusieurs temporalités psychiques:

1 du passé vers le présent ou futur: soit une signification temporelle simple, celle de «plus tard», désignant par exemple les représentations ou les traces mnésiques formant des couches sédimentaires successives et datées dans une psyché que l’on peut représenter par un modèle géologique. C’est une temporalité linéaire, selon une logique euclidienne: une cause produit un effet et donc l’effet actuel serait compris en retrouvant sa cause d’origine («il n’y a pas de fumée sans feu») par un travail souvent représenté par les métaphores archéologiques ou celle du forage géologique. Cette logique est par exemple à la base des conceptions développementales et du traumatisme58. Mais ce type de logique linéaire, si l’on y prête attention, impose d’elle-même une dimension d’inéluctable: l’événement et son cours, de même que la ligne du développement, produiraient des effets au-delà de toute participation de l’individu, voire, comme l’avancent certaines thèses actuelles, indépendamment de l’histoire personnelle. Ceci n’est pas entièrement faux, mais bien plus complexe qu’il n’y paraît;

2 un deuxième usage indique aussi une direction du temps passé vers le futur: mais ici avec l’idée d’un dépôt en attente, en tension, de quelque chose qui ne sera réalisé que plus tard (comme nous l’avons vu avec Emma), et deviendra ainsi actif seulement dans un «deuxième temps». Ce passé en dépôt demande à être déchiffré (car il produit une tension, une quête), et il est très souvent lié à des éléments d’origine externes, une action ou une parole énigmatique, qui ne pourront être «compris» qu’à une époque ultérieure de maturation. C’est par exemple la thèse de la séduction de Jean Laplanche;

3 il y a d’autres emplois du passé vers le futur comme, par exemple, celui du sujet face à l’inconnu du futur qu’il vient peupler par re-projections de menaces anciennes, c’est-à-dire en reprojetant son passé dans le futur afin que ce dernier (re)devienne du connu;

4 du futur ou présent vers le passé: cet usage inverse la flèche du temps pour une temporalité rétroactive: ce que nous sommes aujourd’hui est aussi en partie responsable de ce que nous avons été, dans le sens où nos réinterprétations actuelles du passé selon un «projet» vient transformer ce passé pour justifier notre présent, notre théorie ou l’histoire actuelle de nous-même. C’est le temps le plus exemplaire de l’après-coup, un temps qui n’est plus du tout linéaire. C’est une rétroaction qui fait que la construction d’un individu, son histoire, se fait à rebours et donc toujours après-coup par rapport à son développement. C’est ce qui fait qu’il est difficile de distinguer ce qui serait un souvenir d’enfance «vrai» de ce qui est un fantasme, au même titre que, l’histoire et la préhistoire: «(…) l’histoire, qui avait commencé de suivre et de noter les événements du présent, jeta un regard aussi en arrière, rassembla tradition et légendes, interpréta les vestiges laissés par le lointain passé dans les mœurs et les coutumes, et édifia ainsi une histoire du passé préhistorique. Il était inévitable que cette préhistoire fût plutôt l’expression des opinions et des aspirations du présent que l’image fidèle du passé (…)»59

Ces temporalités fonctionnent toutes en parallèle et simultanément dans nos psychés selon des degrés et des registres divers.

Ce concept d’après-coup est «propre à déstabiliser totalement la représentation que l’homme se fait spontanément de lui-même dans son rapport au monde et aux autres. Il fait éclater la notion de causalité. Non seulement l’individu ne peut pas ramener les actes de sa vie à sa volonté consciente, non seulement il est toujours déçu lorsqu’il a atteint ce qu’il croyait vouloir parce que son désir n’est pas apaisé, mais il ne peut jamais expliquer le présent par le passé. L’avant n’est jamais passé, il est toujours là, toujours insaisissable et toujours à élaborer60.» Et c’est en ce point qu’il y a un écueil de talle: le présent qui «explique», sans cesse, le passé…

Cela veut dire aussi que nous vivons en permanence avec tous nos âges, et qu’ainsi bien souvent un événement reçoit plusieurs interprétations simultanées et contradictoires: cela veut dire qu’il n’y a pas d’état unique ou achevé du sujet. Une telle acceptation peut donc sembler bien inconfortable en regard de la question de notre identité et de nos certitudes de penser.

Peut-être est-ce pour cela, sans doute, que la notion d’après-coup ne cessera d’apparaître et de disparaître?


Notes:

1 Benjamin W., in «Passages», Œuvres, N. I, 1. retour

2 Voir: les «Nouvelles remarques sur les psychonévroses de défense», in Sigmund Freud, Œuvres complètes, III, 1894-1899, PUF, 1989; Sigmund Freud: lettres à Wilhelm Fliess, 1887-1904, PUF, 2006. retour

3 Par exemple, l’après-coup est quasiment absent des lexiques lacaniens. retour

4 Quelque chose a été perçu et représenté; ce quelque chose serait devenu inconscient ou plus exactement préconscient, et vient, du fait de son élaboration, organiser, structurer ou orienter les perceptions suivantes et leurs élaborations; la cryptomnésie peut fonctionner, faire retour dans l’Anschauung et la Weltanschauung par exemple. Sur ce thème de la cryptomnésie, voir Joël Bernat, Le processus psychique et la théorie freudienne (au-delà de la représentation), collection «Études Psychanalytiques», L’Harmattan, 1996. retour

5 Sigmund Freud, in Résultats, idées, problèmes, tome II, Paris, PUF 1985, p. 260. retour

6 Ibid. retour

7 Sigmund Freud, «Contribution à l’histoire du mouvement analytique» (1914), in Cinq leçons sur la psychanalyse, Payot 1969, p. 77. retour

8 Par exemple, Sigmund Freud (1927), in Avenir d’une illusion, P.U.F, pp. 48 & 51: «je me suis borné (…) à ajouter à la critique de mes grands prédécesseurs quelques bases psychanalytiques». retour

9 Voir la lettre de Freud du 9 – IV – 1919 à Ferenczi, in: Correspondance Freud – Ferenczi, Tome II, Calmann-Lévy, 1996, p. 381; Rapporté aussi par Mahony P. J. in Freud l’écrivain, Paris, Les Belles Lettres, 1990, p. 233; Jones E., in La vie et l’œuvre de S. Freud, Tome I, Paris, PUF 1958, pp. 271-2. retour

10 Schiller, lettre du 1-XII-1788 à Körner, citée dans L’interprétation des rêves, Paris, PUF 1971, p. 96. retour

11 Rapporté par Sachs H. in Freud, mon maître et ami, Paris, Denoël 1977, p. 63, et Blanton S., Journal de mon analyse avec Freud, PUF, 1973, p. 28. Ce témoignage, avec toutes les réserves d’usage, est intéressant en ce qu’il est riche des incessants rappels de Freud quant à la règle de l’Einfall et ses résistances; voir pour exemple, les pp. 24-5, 31, 54-5, 58-9, 72, 82, 116. retour

12 Cité par Jones E., in La vie et l’œuvre de Sigmund Freud, trois volumes, PUF 1958. retour

13 Freud S., lettre de 1915 à Ferenczi citée dans Vue d’ensemble sur les névroses de transfert, Paris, Gallimard 1986, p. 113. retour

14 Freud – Salomé, Correspondance, Gallimard 1970, lettre du 3 – III – 1934, p. 249. retour

15 Kleist H. von, in Sur le théâtre de marionnettes, suivi de «De l’élaboration progressive des pensées dans le discours», préface de Jean-Claude Schneider, Éditions Séquences, 1991, pp.42, 56, 57. retour

16 Freud S., lettre à Fliess du 7-VII-1898, in La naissance de la psychanalyse, Paris, PUF 1969, p. 229. retour

17 Freud S., Introduction à la psychanalyse, Petite Bibliothèque Payot n°.6, p. 357. retour

18 Pour plus de développements, voir Joël Bernat, Transfert et pensée, collection «Perspectives Psychanalytiques», L’esprit du temps – P.U.F., 2001. retour

19 Voir les rêves de poursuite (ou de persécution, qui en latin signifie: poursuite). retour

20 Konstanzprinzip: principe selon lequel l’appareil psychique tend à maintenir à un niveau aussi bas ou, tout au moins, aussi constant que possible, la quantité d’excitation qu’il contient. La constance est obtenue d’une part par la décharge de l’énergie déjà présente, d’autre part par l’évitement de ce qui pourrait accroître la quantité d’excitation et la défense contre cette augmentation. retour

21 Nirwanaprinzip: terme proposé par Barbara Low et repris par Freud pour désigner la tendance de l’appareil psychique à ramener à zéro ou du moins à réduire le plus possible en lui toute quantité d’excitation d’origine externe ou interne. retour

22 On ne peut pas soutenir que la psychanalyse est la troisième attaque narcissique infligée à l’humanité (après celles de Galilée et de Darwin: l’humain n’est pas le centre de l’univers) si d’un autre côté on réfute le fondement neurophysiologique de la vie psychique. retour

23 Freud S., lettre à Fließ du 12.XII.1897, in La naissance de la psychanalyse, P.U.F 1969, pp. 210-211. retour

24 Haeckel Ernst, Les preuves du transformisme (réponse à Virchow), préface de J. Soury, Paris 1879. Haeckel forgea aussi, en 1886, le terme de Ökologie qui a donné, en français, Œcologie puis Écologie. retour

25 Freud S., (1912-1913) «Totem et tabou», in OCF-P XI, P.U.F 1998, pp. 379. retour

26 Pour plus de développements, voir: Joël Bernat, Transferts et pensée, L’Esprit du Temps 2001. retour

27 Andreas-Salomé Lou, «Journal d’une année» in Correspondance avec Sigmund Freud, Gallimard 1970, pp. 347-9. retour

28 La thèse était médicale: un événement imprévu crée un traumatisme chez une personne prédisposée (par sa constitution par exemple): des défenses et des symptômes s’organisent contre ce traumatisme, par défaut de pouvoir traiter l’événement. retour

29 Les Eckstein sont des amis des Freud et Emma plus particulièrement de Martha. Pour le récit du cas, voir le «Projet d’une psychologie», part. II, §4, in Sigmund Freud. Lettres à Wilhelm Fliess, 1887-1904, PUF, 2006. retour

30 Ré-interprétation ou interprétation, ce qui fut dénommé aussi «déformation», Entstellung: déformation au sens premier de 1900, comme résultat de l’élaboration secondaire, par exemple du rêve, sous l’effet de la censure (voir L’interprétation des rêves). retour

31 Du grec pseudês, menteur. Freud, dans un premier temps, écrit «mensonge» en référence à la tendance hystérique au mensonge. Ce terme disparaîtra dès qu’il aura saisi l’existence du fantasme. retour

32 La robe devient le représentant de l’attentat sexuel, son symbole, selon un déplacement des organes génitaux au tissu qui les voile, déplacement qui est typique de la formation du souvenir-écran: la honte actuelle de sa robe remplace et représente (c’est le noyau de vérité) la honte liée à la scène et son excitation. Et le rire du commis représente aussi sa honte (quant à la robe et son désir), qui relaie la culpabilité de son désir. La robe est donc un double représentant: celui de l’attentat et de son excitation, et celui de la honte, double représentation – comme dans la formation du symptôme – alliant le désir et son interdit. retour

33 Freud S., «Projet d’une psychologie», op. Cit., p. 367. retour

34 «Nouvelles remarques sur les psychonévroses de défense», op. cit., p. 99. retour

35 «Esquisse d’une psychologie scientifique», in La naissance de la psychanalyse, P.U.F. 1956, pp. 174-175. < retour/p>

36 Freud S. «Esquisse d’une psychologie scientifique», op. cit., p. 367. retour

37 Freud S., «Extrait de l’histoire d’une névrose infantile», in Cinq psychanalyses, PUF 1971, p. 350, n. 3. retour

38 Freud S., Ibid., p. 409. retour

39 «Esquisse d’une psychologie scientifique», op. cit., p. 366: «Nous ne manquons jamais de découvrir qu’un souvenir refoulé ne s’est transformé qu’après-coup en traumatisme. La raison de cet état de choses se trouve dans l’époque tardive de la puberté par comparaison avec le reste de l’évolution des individus.» retour

40 Abrégé de psychanalyse, PUF 1973, p.5. retour

41 Freud S., Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse, Gallimard 1984, pp. 87 & 93. retour

42 Abrégé de psychanalyse, op. cit., p. 86. retour

43 Ibid. retour

44 Voir Freud S., «Totem et tabou» (1912-13) in OCF-P XI, P.U.F. 1998, p. 379; Abrégé de psychanalyse (Abriss der Psychoanalyse), (1938), P.U.F. 1967, p. 86. Goethe: „Was Du erebt von Deinen Vätern hast, / Erwirb es, um es zu besitzen“, Faust I, Flammarion, op. cit.: vers 682-683 de «La nuit» (Monologue de Faust). Ou bien, selon les traductions, «L’héritage qui t’est venu de ton ancêtre, // Il te faut l’acquérir pour le mieux posséder.»; «Ce que tu as hérité de tes pères, // Acquiers-le afin de le posséder». retour

45 Libertinage vient de libertus qui en latin signifie: affranchi. retour

46 «Pourvu que la raison conserve son empire, tout est permis», écrit Hamilton (1646-1720), auteur des Mémoires du comte de Grammont (1704), «c’est la manière d’user des plaisirs qui fait la liberté ou la débauche». retour

47 Depuis l’Antiquité, l’on observe que Éros a chaque fois été l’outil de la désaliénation de l’individu, du fait de son pouvoir hautement individualisant et donc subversif par rapport aux lois de groupes. retour

48 Voltaire fit des Contes érotiques en vers; Diderot des Bijoux indiscrets; Vivant Denon Point de lendemain; Crébillon fils Égarements du cœur et de l’esprit; Laclos Les Liaisons dangereuses; citons encore Mirabeau (Erotika Biblion), Restif de la Bretonne et Sade. retour

49 J. Lacan, «Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse» (1953), in Écrits, Seuil, 1966; J. Lacan, Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique psychanalytique (1954), Seuil, 1978; J. Laplanche et J-B. Pontalis, Vocabulaire de psychanalyse, PUF, 1964; J. Laplanche, «Notes sur l’après-coup», in Entre séduction et inspiration: l’homme, Quadrige/PUF, 1999.< retour/p>

50 Voir par exemple les textes de 1915 regroupés sous le titre de Métapsychologie, Gallimard 1968, ou in OCF-P XIII, P.U.F. 1988. retour

51 Du fait de ces processus, l’énergie psychique s’écoule librement, passant d’une représentation à une autre selon les mécanismes de déplacement et de condensation, pour les principaux. retour

52 Voir Sigmund Freud, L’interprétation des rêves, P.U.F. 1950. retour

53 Lucius Apulleius, (125-170), L’âne d’or, ou les métamorphoses (161). Voir aussi une fable de Jean de La Fontaine, Les amours de Psyché et Cupidon (1669), où Cupidon est le nom romain d’Éros, ainsi que la tragédie de Molière et Corneille en 1671, Psyché. Psyché, en grec, signifie «souffle vital», «âme» ou «papillon» (qui représente souvent l’âme lorsqu’elle quitte le corps du défunt). Pour rappel: Aphrodite est jalouse de la beauté de Psyché. Pour lui nuire, elle demande à son fils Éros d’inspirer à sa rivale une passion pour un être monstrueux. Celui-ci, sur le point de s’exécuter, tombe lui-même amoureux de Psyché qui lui rend sa passion. Un seul obstacle à cet amour: Psyché devra s’engager à ne jamais voir le visage d’Éros. Tout va pour le mieux jusqu’à ce qu’une nuit, poussée par ses sœurs jalouses, la curiosité l’emporte. Psyché approche une chandelle du visage de son amant endormi dont elle découvre, émerveillée, la grande beauté. Immédiatement, les dieux interviennent et séparent les amoureux. Folle de douleur, Psyché recherche inlassablement son amour perdu. Les dieux lui infligent de nombreuses et pénibles épreuves jusqu’à ce que Zeus, apitoyé, se laisse fléchir, et permette à Psyché d’accéder à l’immortalité. Éros et Psyché sont alors libres de s’aimer éternellement et engendrent une fille, Volupté. retour

54 Freud S., lettre du 6-12-1896 à W. Fliess, in «Esquisse d’une psychologie scientifique», op. cit., p. 153. retour

55 Cela fut étudié après la première guerre mondiale avec les «névroses de guerre» où il était montré que les traumatisés (psychiques) graves par la guerre étaient, dans la majorité, déjà névrosés. La situation traumatique vécue en guerre ne faisait que répéter ou mettre en acte une situation plus ancienne. retour

56 Les systèmes de défense, le plus souvent, s’installent bien après, en fragmentant l’événement, puis en traitant chaque fragment séparément. retour

57 Thèse remise en cause par les orientations modernes. Par exemple, la Société Américaine de Psychiatrie et son DSM, en 1972, décrète que c’est l’événement qui est en lui-même traumatique quels que soient les sujets, et non plus un sujet qui est traumatisé par un événement précis… retour

58 Mais aussi les thèses behaviouristes et cognitivistes, etc. retour

59 Sigmund Freud, Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci, Gallimard 1977, pp. 50-51. retour

60 Jean Laplanche, «Notes sur l’après-coup», in Entre séduction et inspiration: l’homme, Quadrige/PUF, 1999; «Après-coup», in Dictionnaire international de la psychanalyse, Hachette, 2002. retour

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